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Résistance dans les Balkans (Yougoslavie Grèce Albanie) 1942
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patrikev



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MessagePosté le: Mar Fév 08, 2011 22:48    Sujet du message: Répondre en citant

14 septembre (suite)

Limnos –
Deux hommes arpentent la plage encore criblée de cratères d’obus. Le plus jeune observe, en grec, mais avec une pointe d’accent français : "Vous ne trouvez pas que nous ressemblons au chevalier de la Manche et à son biographe, mon colonel ?"

– Merci pour la comparaison !
répond son compagnon en souriant. Mais vous avez raison, puisque voici qu’arrive un géant.

En effet, le colonel Stefanos Sarafis, âgé, maigre et sec, évoque un Don Quichotte grec, et le commandant Henri Van Effenterre, Français, archéologue et chef scout dans le civil, est manchot comme Cervantès : il a perdu un bras et gagné une croix de guerre dans les combats de 1940. Et la silhouette massive qui vient à leur rencontre est celle du colonel Christodoulos Tsigantes, ou Gigantes – ce qui veut effectivement dire "géant".

– Les casse-pieds de l’état-major ont enfin donné le feu vert. Les Saints Isidore seront prêts à lever l’ancre cette nuit. A vous de jouer !

L’officier français a soudain la gorge sèche. Ça y est, enfin !

– Mon colonel, je ne sais comment vous remercier…

– Inspectez vos gars et vérifiez qu’il ne leur manque rien. Je vous ai donné deux ou trois des miens, veillez à ce qu’ils ne fainéantent pas. Nous avons contacté par radio le groupe de Volos. D’après les renseignements envoyés par mon frère, c’est un groupe tout à fait fiable. Il devrait vous convoyer vers l’intérieur dans de bonnes conditions.


Tsigantes regarde la tête vers la mer et reprend, d’une voix plus basse : "J’aurais voulu partir avec vous, mais on me trouve plus utile ici. Croyez-moi, j’aurais bien sacrifié un bras, moi aussi, pour aller me venger des salopards de l’OVRA(*) qui ont eu Jean. Mais l’Italie est en train de se dégonfler comme une baudruche, et l’ennemi qui compte, c’est le Fritz. Bien, à cette nuit."

Le chef du Bataillon Sacré part sans se retourner. Van Effenterre se sent gêné d’avoir vu ce rude guerrier au bord des larmes.


15 septembre
Thessalie (Grèce)
– Dans la soirée, un caïque lourdement chargé entre dans le port de Volos. Les transports terrestres en Grèce fonctionnent si mal que personne ne s’étonne qu’un banal caboteur, chargé de couffins, fasse la navette entre Le Pirée et Volos avec du fret et quelques passagers. Il entre dans la baie à la voile et n’allume son moteur que pour la manœuvre d’accostage. Heureusement d’ailleurs, car l’engin tousse et bringuebale à faire pitié, au point qu’on s’attend à le voir tomber en panne avant le quai. Il s’appelle Les Saints Isidore, car chacun sait qu’il y en a deux (**), et le nom est bien connu dans ces eaux. Ce qui est moins connu, c’est que deux caïques circulent sous ce nom en mer Egée, en échangeant leurs cargaisons et leurs papiers si besoin est. Celui qui vient d’entrer à Volos a un moteur excellent, capable de donner ses neuf nœuds, mais un judicieux réglage et quelques ferrailles suspendues au bon endroit le font paraître à l’agonie.

Sur les quais de Volos veillent les militaires italiens de la 29e Division Piemonte. Encore que le mot "veillent" soit excessif : comme le nom de leur unité ne l’indique pas, ils sont pour la plupart Siciliens et connus pour leur manque de zèle. Au demeurant, même la Guardia di Finanzia a renoncé à mettre de l’ordre dans les trafics du port, et on dit que l’officier de service, à force de fermer les yeux, a accumulé une petite fortune dans des monnaies plus solides que la “drachme méditerranéenne” d’occupation. Aussi le contrôle de la cargaison et des passagers est-il de pure forme. Les Grecs ne cachent pas leur mépris pour les Italiens, qu’ils considèrent comme des occupants de second ordre. Et les Italiens, en retour, savent qu’ils n’obtiendraient que des ennuis en manquant de respect à un mutilé grec, sans doute un vétéran de la guerre récente où les Hellènes ont mis en déroute les soldats du Duce. Après un rapide coup d’œil, le maresciallo laisse passer le jeune manchot et son compagnon plus âgé, tous deux en brassard de deuil, respectivement cousin et parrain de feu Jean Tornakis, décédé et en instance d’enterrement à Trikala.

Les parents du défunt passent la nuit dans une maison d’un quartier ouvrier. Deux jeunes gens, en qui un œil attentif reconnaîtrait une paire de matelots des Saints Isidore, montent la garde dans l’entrée. Vers 23h00, ils laissent entrer un homme bien mis, discret et courtois, muni d’une trousse de médecin qui lui permet de circuler après le couvre-feu. Le temps de boire un café, de fumer une cigarette et d’échanger les dernières nouvelles, les endeuillés et le médecin s’entendent sur le sort de la cargaison des Saints Isidore – des primeurs, paraît-il. "Alors, c’est entendu, moitié pour vous, moitié pour nous. Votre camion sera prêt demain." Le manchot et son compagnon n’apprendront que bien plus tard le nom de leur visiteur : Kostas Karagiorgis, bel et bien médecin mais surtout chef de maquis de l’ELAS, la résistance communiste.

__________
* OVRA: Office de répression de l'antifascisme, l'équivalent italien de la Gestapo.
** Et même beaucoup plus... Mais les deux plus connus en Grèce sont Isidore de Chios, patron des marins, et Isidore de Péluse, patron des vignerons.

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Fantasque



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MessagePosté le: Mar Fév 08, 2011 23:56    Sujet du message: Répondre en citant

Superbe

Des caïques au moteur toussotant...Bientôt verra-t-on sans doute Casey Brown réparer l'engin sous l'oeil d'un Mallory tandis qu'un "dusty" Miller fabriquera ses machines infernales à partir de boites de conserves et de pains de plastic...

Bref, avec un peu d'avance on est en plein dans l'atmosphère d'Alistair MacLean....


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folc



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MessagePosté le: Mer Fév 09, 2011 19:02    Sujet du message: Répondre en citant

Citation:
Sur les quais de Volos veillent les militaires italiens de la 29e Division Piemonte. Encore que le mot "veillent" soit excessif : comme le nom de leur unité ne l’indique pas, ils sont pour la plupart Siciliens et connus pour leur manque de zèle.


Judicieux commentaire de Patrick : le nom des divisions d'infanterie italiennes, quand il est géographique [rien à tirer de ou Regina], ne correspond pas forcément à la zone de recrutement réel de leurs effectifs.
Je n'y avais pas insisté pour les deux divisions du XIIIe Corps victimes de Marignan, mais il devait être évident que la 30e Sabauda ne comptait guère de Savoyards. Quant à la 31e Calabria, casernée à Sassari, elle n'avait guère de Calabrais dans ses rangs !
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patrikev



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MessagePosté le: Sam Fév 12, 2011 03:09    Sujet du message: Répondre en citant

5-10 octobre
La Résistance en Europe

Herzégovine – Opération “Alfa”. Après cinq jours de combat, les Italiens (4 000 hommes de la 59e Division d’Infanterie de Montagne Cagliari, soutenus par 5 000 Tchetniks) reprennent la ville de Prozor aux Partisans. Les Tchetniks massacrent plusieurs centaines de civils, croates catholiques et musulmans.

20 octobre
Etolie (Grèce)
– Vers la fin de la nuit, sous un violent orage, des maquisards de l’ELAS (communiste) prennent par surprise leurs collègues de l’EDES (royaliste). Aris Velouchiotis, kapetanios de l’ELAS, s’était déjà plaint plusieurs fois que les parachutages anglais ne profitaient qu’à l’EDES et que ses hommes n’en recevaient que les miettes. Il a décidé de se servir, et sans permission de quiconque ! Encerclés, mis en joue, les “Edessis”, ébahis, se laissent désarmer et dépouiller de leur stock, y compris les chaussures neuves. Les “Elassis” repartent à cheval avec leur butin, en vrais “klephtes” (hors-la-loi).
Quand Napoleon Zervas, chef militaire de l’EDES, apprend la chose le lendemain, il est furieux et menace de monter une expédition punitive contre "les bandits de l’ELAS". Komninos Pyromaglou, chef civil de l’EDES, et Xan Fielding, représentant britannique du SOE, l’en dissuadent à grand-peine.


25 octobre
Thessalie (Grèce)
– Un petit groupe d’hommes, baissant la tête, pénètre dans une grotte. Une lampe à pétrole, des couvertures, des bottes de paille et quelques caisses forment un mobilier sommaire.

– Je suis désolé de ne pas être allé vous chercher jusque sur le terrain. Les nouvelles consignes de sécurité d’Alger, vous savez : interdiction d’exposer un cadre de maquis dans une mission trop repérable. Installez-vous, je réchauffe le café.

Le commandant Van Effenterre s’occupe lui-même de la cafetière, malgré son bras amputé, tout en jaugeant de l’œil son interlocuteur. Il l’a déjà vu à l’entraînement : Benjamin Tagger, « Français juif russe libanais né en Ouzbékistan » comme il s’est présenté une fois. Jeune, droit, silencieux, avec des yeux en amande de type oriental.

– Comment s’est passé l’atterrissage ? Avec la météo de ces derniers jours, je n’étais pas trop rassuré pour vous.

– Le pilote a fait du très bon travail. Le vent d’est a nettoyé les nuages, le terrain était un peu lourd, mais le coucou a pu se poser et repartir sans casse. Les “andartes” étaient fous de joie en déchargeant les conteneurs d’armes. Apparemment, votre groupe a un très bon moral.

– Ils ont hâte d’agir. Nous n’attendions plus que votre arrivée pour fixer les objectifs. Les Italiens ne sont pas trop gênants en ce moment : avec les orages des derniers jours, les inondations leur causent presque autant d’embarras qu’à nous. La plaine du Pinios a l’air de vouloir redevenir le lac préhistorique qu’elle était. Mais…

– Vous allez me dire qu’il y a un souci plus grave.

– En effet. Le professeur Picard a dû vous communiquer mes derniers rapports. Notre mouvement, l’AAA, “Combat-Renouveau-Indépendance”, se développe à toute vitesse. Le colonel Sarafis est à Mitropoli, au sud, et je vais le rejoindre demain. Il est né à Trikala, et il a beaucoup de parents et amis dans la région. Des volontaires commencent même à arriver d’Athènes. Les autres mouvements…

– C’est assez compliqué, paraît-il ?

– C’est le moins qu’on puisse dire. L’EDES, “Ligue nationale républicaine grecque”, est le mouvement le plus important en Epire. Il est républicain et socialiste à la base, mais armé et financé par les Anglais ; il a été obligé de faire allégeance au roi de Grèce, ce qui déplaît à beaucoup de ses membres. A côté, il y a l’ELAS, “Armée de Libération Nationale Grecque”. Elle est réputée communiste, mais à ce que j’ai vu, il n’y a peut-être pas un communiste sur dix parmi ses membres : la plupart sont simplement des patriotes grecs. J’ai appris que les maquis de Thessalie orientale, vers les monts Olympe, Pélion et Ossa… Je sais, c’est très mythologique, vous finirez aussi par vous y habituer…J’ai appris que ces maquis dépendaient de l’ELAS. Ensuite, dans les monts du Pinde, vous rencontrez un autre groupe de l’ELAS: celui d’Aris Velouchiotis. Très dur, très combatif. Et c’est là que les choses se gâtent.

– Pourquoi ?

– L’EDES est bien approvisionnée par les Anglais, et Aris réclame sa part de matériel, ce qui est juste : ses andartes sont très actifs, ils harcèlent les Italiens et n’hésitent pas à attaquer les Allemands de la garnison d’Andirrion quand ils les rencontrent. Mais l’EDES ne leur cède que ses fonds de stock, parfois de vieilles armes dans un état douteux. Il y a quelques jours, les hommes de l’ELAS ont décidé de se servir eux-mêmes et ont dévalisé un arsenal de l’EDES. Il n’y a pas eu de morts, heureusement, mais si on ne fait rien, les fusils vont partir tout seuls.

– Surtout les Sten. Je sais ce que donne une Sten avec un soldat un peu nerveux. Eh bien, dès que vous m’aurez présenté à l’AAA, nous verrons ce que nous pouvons faire.

– Si vous permettez, il va bientôt faire jour et j’aimerais vous montrer quelque chose avant de partir.


Les deux Français ressortent, échangent le mot de passe avec les sentinelles – le capitaine Tagger apprécie au passage la stricte surveillance du camp – et grimpent quelques centaines de mètres par un raidillon jusqu’à une terrasse rocheuse. "Rhododaktylos Eos", l’aurore aux doigts de rose, s’éveille comme aux temps antiques et illumine un fabuleux paysage de pitons rocheux, comme des tours naturelles surmontées de petites chapelles. Les Météores.
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patrikev



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MessagePosté le: Sam Fév 12, 2011 03:19    Sujet du message: Répondre en citant

28 octobre
Monts du Pinde (Grèce)
– Si les Italiens y songeaient, ils auraient un beau coup de filet à faire près du petit village de Mavrolithari… à supposer qu’ils y arrivent vivants, ce qui n’est pas garanti. D’une part, le colonel Zervas et le professeur Pyromaglou, de l’EDES, le capitaine Alexander (Xan) Fielding, conseiller anglais de l’EDES, plus un autre officier anglais, le colonel Eddie Myers. D’autre part, le kapetanios Aris Velouchiotis et le docteur Karagiorgis, chefs des deux principaux maquis de l’ELAS communiste. Enfin, le colonel Sarafis, chef du troisième mouvement de résistance, l’AAA, et ses officiers de liaison français Henri Van Effenterre et Benjamin Tagger. Tous ont décidé de se réunir pour vider les conflits qui empoisonnent la résistance grecque.

« Je ne redoutais guère une incursion des Italiens : les hommes d’Aris et ceux de Zervas faisaient bonne garde. Mais je craignais beaucoup plus de voir l’hostilité éclater entre les uns et les autres. L’EDES et l’ELAS avaient accumulé les différends depuis quelques mois. Zervas tempêtait et vociférait, mais je sentais que le plus redoutable des deux était Aris. Si aucun ne tempérait ses exigences, ce serait un bain de sang. L’AAA ne devait à aucun prix être entraînée dans un affrontement entre résistants.

Mon expérience de chef scout m’a appris que pour apaiser une querelle, le mieux est de faire appel aux sentiments élevés. Je rappelai alors tout le mal qu’avait fait aux Grecs la discorde d’Agamemnon et d’Achille, et (dans un raccourci audacieux) tous les malheurs qui leur étaient venus des dissensions depuis l’indépendance. Sarafis, le vieux Nestor de cette assemblée, me soutenait. Myers comprenait très peu le grec, mais son collègue Fielding lui traduisait au fur et à mesure, et je sentais qu’il avait une idée derrière la tête.

“Messieurs, dis-je, si nous n’avons pas assez d’armes pour tout le monde, il me semble que le colonel Myers pourrait nous en faire venir en abondance, pourvu que nous nous entendions pour une action commune.” J’avais deviné juste : Zervas-Agamemnon et Aris-Achille, plus raisonnables que leurs antécesseurs, se réconcilièrent aussitôt pour se tourner vers Myers. Celui-ci, une sorte d’ascète à longue barbe, s’exprima dans une sorte d’extase : il était officier du Génie et semblait engagé dans une guerre personnelle contre les voies de communication du IIIe Reich. Son grand projet était de faire sauter le viaduc de Gorgopotamos, un des plus longs de Grèce, chaînon essentiel de la voie ferrée de Salonique à Athènes. Aris, qui connaissait bien la région, parla aussitôt des dispositions à prendre. Myers allait commander le nécessaire pour la pleine lune suivante : pas moins de trois cents kilos d’explosifs et un commando de saboteurs entraînés. Parmi les assistants, seul le colonel Sarafis ne semblait pas partager l’enthousiasme général, et je me demandai pourquoi. »

(Henri Van Effenterre, Le Nœud d’Hercule, 1967)


1er novembre
La Collaboration en Europe
Bosnie-Herzégovine.
Les massacres de civils catholiques et musulmans par les Tchetniks, mais aussi l’épuration violente des Effendis (*) par les Partisans ont soulevé l’inquiétude des musulmans bosniaques. Un collectif de notables musulmans adresse un mémorandum au Führer, insistant sur l’origine "gothique" (donc aryenne) des Bosniaques et demandant sa protection, car le sort des musulmans n’est pas la priorité des Italiens ni du régime oustachi catholique. Ils proposent la création d’une force armée de volontaires musulmans armés par le Reich.


4 novembre
Italie
- Badoglio, lui, se préoccupe tout d’abord de maintenir l’ordre, d’autant plus que c’est la Fête de la Victoire, que les autorités escamotent discrètement depuis plusieurs années, car elle commémore la victoire de l’Italie sur l’Autriche-Hongrie en 1918. Le maréchal confirme les consignes données par le général Roatta. Dans la journée, de nouveaux incidents opposent manifestants et militaires à Milan, Turin et Bologne, où l’on compte de nouveaux morts. À Rome, l’Armée doit intervenir pour décrocher des banderoles où l’on peut lire « Le fascisme est fini ! Vive la Démocratie ! Vive la Paix ! » ainsi que « Paix et Liberté ». Si des incidents surviennent, ils ne font heureusement aucune victime – les représentations allemandes sont barbouillées de vert-blanc-rouge, voire de matières de couleur moins visible, mais d’odeur plus puissante.

7 novembre
La Collaboration en Europe
Rastenburg.
"Et vous n’avez nulle idée de la grâce, de la jeunesse, de la douceur, du charme et du teint clair du Grand Mufti." C’est sur cette note ironique qu’Albert Londres concluait, en 1930, un article sans complaisance sur le massacre de Juifs d’Hébron en Palestine par les partisans de Hajj Amin al-Husseini, descendant du Prophète et Grand Mufti (chef du clergé musulman) de Jérusalem. Adolf Hitler n’a pas lu Albert Londres, mais le physique et les manières de Hajj Amin font le meilleur effet sur lui.
Exilé par les Britanniques en Irak, puis en Italie, le Grand Mufti n’a cessé de prêcher la guerre sainte contre les impérialistes occidentaux et les Juifs. Dans ce conflit où aucun concours n’est à négliger, Hitler consent à relancer l’action psychologique auprès des populations musulmanes, en sommeil depuis l’opération Ostmond en 1941. Il a justement deux projets sur sa table, l’un émanant de la Wehrmacht et de l’Abwehr, l’autre des SS.
Le Reich a fait prisonniers un bon nombre de soldats musulmans soviétiques – pas autant qu’il aurait pu, sans doute – et l’armée a mis à l’étude la création d’une ou plusieurs « Ostlegionen » à partir de ces hommes qui, pour beaucoup, n’ont aucune affection pour la Russie et Staline. Le rapport est signé d’un officier d’état-major du Groupe d’armées A : le commandant Claus Philipp von Stauffenberg. Un bon élément, paraît-il, bien que le rapport du SD signale son laxisme sur la question raciale. Parmi ces musulmans du Caucase et d’Asie centrale, certains sont tout à fait aryens, d’autres carrément mongols. Un curieux mélange ! Même après la défaite de la Russie, le Reich aura besoin d’hommes pour continuer la guerre contre les Franco-Britanniques dans les Balkans, au Caucase et au Moyen-Orient. La "Legion Turkestan" est donc créée : elle sera rattachée à la 162e DI allemande, décimée dans la bataille de Smolensk et qui est au repos à Radom en Pologne.
Le second projet a été visé par les services de Himmler et Kaltenbrunner. Cette fois, les volontaires seraient des Aryens incontestés, et même "d’origine gothique" selon la note : des musulmans de Bosnie. L’encadrement viendrait du bataillon SS Prinz Eugen, des Allemands des Balkans, donc, et d’autres unités SS. Le "fidèle Heinrich"(**), qui n’aime pas la prêtraille, est disposé à faire une exception pour les imams. Accepté.


__________
(*) Notables musulmans.
(**) Himmler.


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Dernière édition par patrikev le Sam Avr 02, 2011 14:59; édité 3 fois
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MessagePosté le: Sam Fév 12, 2011 10:05    Sujet du message: Répondre en citant

Tient, c'est amusant cette histoire d'armes confisqués. Ca me rapelle deux séquences de films de la série "Don Camillo". ! Une autour d'un mystérieux dépot d'armes et une autre autour d'un butin de guerre allemand capturé. Les cinéphiles reconnaitront les séquences.
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patrikev



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MessagePosté le: Lun Fév 14, 2011 19:39    Sujet du message: Répondre en citant

patrikev a écrit:

21 janvier
Voïvodine (nord de Belgrade)
- Opérations de l'armée hongroise contre les Partisans yougoslaves, qui durent une semaine. Les militaires hongrois emploient les mêmes méthodes que leurs partenaires de l’Axe : plus de 3 000 civils serbes sont abattus ou jetés dans le fleuve glacé. Fait inattendu : le régime hongrois de l’amiral Horthy étant nettement moins totalitaire que ses associés, il se trouvera un magistrat courageux pour inculper les auteurs du massacre. L’affaire sera encore pendante en 1943.


Et voilà que cette affaire resurgit en 2011:

http://www.lefigaro.fr/flash-actu/2011/02/14/97001-20110214FILWWW00537-hongrie-un-ancien-nazi-inculpe.php

Hongrie: un ancien nazi inculpé

AFP
14/02/2011 | Mise à jour : 15:12 Réactions (4)

Un ancien nazi hongrois, Sandor Kepiro, 97 ans, a été inculpé pour des crimes de guerre perpétrés en Serbie en 1942, a annoncé aujourd'hui l'Office du procureur de Budapest.

"Selon l'acte d'accusation, Sandor Kepiro a contribué lors d'une razzia entre les 21 et 23 janvier 1942 à l'exécution illégale de civils innocents en tant que commandant d'une patrouille", a précisé l'Office du procureur dans un communiqué.

A Novi Sad, dans le nord de la Serbie, des gendarmes et des soldats hongrois avaient tué plus de 3.000 personnes, des Serbes et des Juifs, dont 147 enfants.

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MessagePosté le: Mar Fév 15, 2011 10:25    Sujet du message: Répondre en citant

Espérons que ce triste sire n'est pas devenu complètement gateux afin qu'il puisse apprécier son propre procès et qu'il soit contraint d'assumer les conséquences de ses actes presque 70 ans après les faits.
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MessagePosté le: Ven Fév 18, 2011 23:07    Sujet du message: Répondre en citant

8 novembre
La Résistance en Europe
Herzégovine –
Les Partisans ont une fois de plus repris la ville de Prozor, à la faveur du violent orage de la veille. Les territoriaux italiens de la 154e Division Murge, déjà démoralisés par l’abdication du Duce, ont pris la fuite sous la pluie en abandonnant presque tout leur matériel. Avec les derniers parachutages, les Partisans sont de mieux en mieux équipés.

Tito et son état-major déjeunent dans le monastère de Scit – franciscain, c’est à dire catholique, donc épargné par les Oustachis. Au milieu du repas, ils voient arriver Milovan Djilas et l’officier français Yves de Daruvar, parachuté six semaines plus tôt. Ils reviennent d’une tournée dans le nord, où ils sont allés étudier les perspectives des maquis de Slavonie. Ils amènent avec eux un homme silencieux qui mâchonne obstinément un cure-dents. Avant qu’ils aient eu le temps de finir les présentations, un convive des plus importuns s’invite : un Messerschmitt Bf-109 Jabo aux couleurs croates, volant au ras des arbres. Sa bombe fracasse une fenêtre et vient se planter au milieu de la salle à manger… sans exploser. Tandis que l’avion s’éloigne, accompagné par une vaine pétarade d’armes à feu, l’homme silencieux retire son cure-dents et lâche un sonore « P… de fasciste ! », avant de faire signe à tout le monde de sortir. Lui reste dans la salle et commence à ouvrir une sacoche de cuir.

Une fois les autres dans la cour, Daruvar explique à Laurent Ravix, l’autre Français de la mission, à qui ils ont affaire : « Iljas le Tonnant. Tu sais qu’ici, le prophète Elie est considéré comme le maître de la foudre ? Notre Iljas, ou Elie, porte bien son nom : c’est le meilleur dynamiteur de Yougoslavie. Il va désamorcer la bombe et récupérer l’explosif, c’est un de ses talents. Pendant ma tournée dans le nord, j’ai fait sa connaissance et celle d’un autre homme aux talents très complémentaires : un officier domobran* de la Sécurité des chemins de fer. Il parcourt la région à bicyclette et il est au courant de tout ce qui circule sur les voies. Pas besoin de vous dire ce qu’Iljas peut faire de ses informations…

– Comment s’appelle ce domobran ?
demande Ravix.

– Ferid Dzanic. Un musulman, je crois. On s’entend bien avec les musulmans, ici ?

– Plutôt bien. Mais je crois que le commandant Tito avait quelque chose à nous annoncer…


Tito, en effet, reprend la parole. Après avoir plaisanté sur cette bombe « sans résultat concret », il sort de sa poche une carte fort usée et explique ses prochains desseins. Les 1ère et 2e Divisions de Partisans vont continuer leur marche vers l’est, bousculer les Italiens à Konjic et précipiter leur débandade, puis couper la voie qui relie Sarajevo à l’Adriatique, avant d’aller rappeler dans l’est du pays – en territoire Tchetnik, ce que Tito s’abstient de préciser – que les Partisans sont toujours présents et actifs.
Le doigt de Tito s’attarde sur la longue ligne sinueuse d’une rivière rapide qui coupe le pays comme un coup de sabre : la Neretva.

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(*) Domobran : armée régulière de conscription de l’Etat indépendant de Croatie, plus « civilisée » que la milice fasciste des Oustachis.
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Dernière édition par patrikev le Sam Fév 19, 2011 20:59; édité 1 fois
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MessagePosté le: Sam Fév 19, 2011 10:32    Sujet du message: Répondre en citant

C'est vrai que comme OTL, en FTL le retrait des italiens du conflit offre de nombreuses possibilités pour les partisans. Est-ce que l'on verra des italiens chercher asile avec armes et bagages chez leurs ex-ennemis pour echapper aux allemands?
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MessagePosté le: Lun Fév 28, 2011 23:27    Sujet du message: Répondre en citant

Pardon d'avoir mis longtemps à répondre, mais je suis justement en train de plancher sur cette phase et je n'aime pas dévoiler mes effets trop vite. La situation des Italiens est plus favorable qu'OTL parce que les Allemands ont moins de forces dans les Balkans, que les Alliés occidentaux sont plus proches et que la saison hivernale va freiner la contre-attaque allemande. Beaucoup de choses ne devraient se dénouer qu'en 1943.
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patrikev



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MessagePosté le: Mer Mar 16, 2011 21:33    Sujet du message: Répondre en citant

La chrono 1941-1942 a été éditée en y intégrant l'Albanie. Pour 1941, voir:

http://www.1940lafrancecontinue.org/forum/viewtopic.php?p=15879#15879

Et voici un épisode supplémentaire en Bosnie et une nouvelle série de péripéties intéressant l'Italie, dans ses rapports avec les Balkans.
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MessagePosté le: Dim Avr 03, 2011 20:42    Sujet du message: Répondre en citant

9 novembre
La Résistance en Europe
Herzégovine –
Pendant la nuit du 8 au 9, les Partisans de la 1e Brigade Patriotique ont attaqué prématurément la ville de Konjic. Ils ont été repoussés avec des pertes : les Italiens de la division Murge, démoralisés par leur échec précédent, ont été renforcés par des éléments de la 59e DI de Montagne Cagliari et de la 6e DI croate, venus de Mostar. Tito est fort mécontent de cette initiative malheureuse, d’autant qu’une grande partie de ses hommes, et surtout les blessés, lents à déplacer, sont encore loin à l’ouest.
Dans la nuit du 9 au 10, une bonne nouvelle compense la mauvaise: un hydravion français se pose sur le lac de Scit, amenant à pied d’œuvre le colonel Alfred Pillafort, un nouvel opérateur radio yougoslave et quelques munitions bienvenues. Pillafort est un solide combattant qui s’est illustré en France, en Mésopotamie et dans le Péloponnèse. Il a de longues discussions avec ses deux collègues français et avec l’état-major des Partisans : il est décidé que Daruvar repartira vers le nord-ouest, aux confins de la Bosnie et de la Dalmatie, où Edvard Kardelj et le jeune Ivo Lola Ribar maintiennent un tissu d’organisation partisane. Les autres, y compris Pillafort, continueront vers l’est avec le gros des Brigades Patriotiques.

11 novembre
Rome –
Malgré la gravité des circonstances, l’anniversaire du roi Victor-Emmanuel est célébré dans les formes. Mais l’ambiance est grave, presque funèbre : tous ignorent s’ils se reverront. La princesse Mafalda a pu venir à Rome avec ses enfants, en laissant en Allemagne son mari, le prince Philippe de Hesse-Darmstadt. Les deux époux forment un couple uni en apparence, mais ils ne sont guère sur la même ligne politique. Philippe, membre du parti national-socialiste depuis 1930, est gouverneur nazi de Hesse-Nassau. En outre, il est l’ami personnel du Reichsmarschall Göring et lui sert quelquefois de rabatteur pour ses fameuses collections d’objets d’art.
Une autre fille du roi, Ioanna, épouse du tsar Boris III de Bulgarie, a également fait le voyage de Rome. En privé, Mafalda a des entretiens fort sérieux avec sa sœur, et le peu qui en filtre suggère que la princesse n’est pas bien disposée du tout envers les compatriotes de son mari.
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MessagePosté le: Dim Avr 03, 2011 20:50    Sujet du message: Répondre en citant

16 novembre
La Résistance en Europe
Herzégovine –
Les Partisans ont dû lever rapidement le siège de Konjic : la 717e DI allemande, venue de Sarajevo, arrive en train blindé au secours des Italiens. Tito apprend avec un temps de retard qu’un autre corps allemand, venu de Serbie par le chemin de fer, est en train de se déployer sur ses arrières, entre Donji Vakuf et Bugojno : des éléments des 187e et 718e DI, suivis par une unité à la réputation déjà sinistre, le bataillon de montagne SS Prinz Eugen.
La situation des Partisans est d’autant plus mauvaise qu’un corps de 12 000 Tchetniks, commandés par Pavle Djurišić et Zaharije Ostojić, est en train de se rassembler sur la rive est de la Neretva. Tito s’apprêtait à faire sauter les ponts de Jablanica pour faire passer toute son armée par Konjic : il a juste le temps d’envoyer le contrordre. Dans l’après-midi, le colonel français Pillafort traverse la Neretva pour aller négocier avec les Tchetniks. Ceux-ci, que les Italiens ont transportés et armés, auraient été enchantés de régler leur compte aux Partisans révolutionnaires et athées, mais ils n’osent tout de même pas trahir leurs compatriotes en présence d’un envoyé d’Alger, car ils comptent bien, un jour ou l’autre, s’appuyer sur les Alliés. Ils accordent le passage, à condition que les Partisans se dirigent vers l’est de la Bosnie, contre les Allemands et les Oustachis, sans empiéter sur les zones tenues par les Tchetniks.


17 novembre
La Résistance en Europe
Herzégovine –
Les Partisans traversent en hâte la Neretva par le pont de chemin de fer de Jablanica : environ 22 000 combattants, plus une foule de civils et de blessés fuyant les représailles de l’Axe, plus un ou deux milliers de prisonniers italiens, portant les blessés graves et les bagages. En milieu de journée, des Stukas bombardent le pont et le coupent : il faut le réparer tant bien que mal avec des troncs d’arbres. Le temps tourne à la pluie, ce qui rend la progression plus difficile, mais empêche de nouvelles sorties des avions allemands.


18 novembre
La Résistance en Europe
Herzégovine –
Sous une pluie battante, les Partisans achèvent la traversée de la Neretva et se dispersent dans les monts du Pranj. Au nord-ouest du pont, entre Prozor et Jablanica, la 5e Brigade Patriotique (les Monténégrins de Sava Kovačević) livre une série de combats de retardement contre les Allemands. Au nord-est, les SS du bataillon Prinz Eugen commencent à franchir le fleuve et menacent de couper la retraite des Partisans. Un détachement de la 1e Brigade qui tente de les arrêter est décimé en moins d’une heure, et perd tous ses officiers. Le colonel Pillafort prend le commandement, et, par un temps épouvantable, ses Yougoslaves arrêtent les SS jusqu’à la tombée de la nuit. Quelques Tchetniks, impressionnés par l’héroïsme des Partisans, sont venus leur prêter main forte.
Pendant la nuit, Pillafort, blessé au foie, est capturé par les SS. Il a eu le temps de détruire ses documents de mission. Les Allemands, surpris de découvrir un officier français parmi les "bandits rouges", s’efforcent vainement de le faire parler en menaçant de le priver de soins médicaux. Pillafort mettra fin à leur embarras en mourant le 25 novembre (*) .

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(*) Une polémique s’est développée sur la nature de la mission de Pillafort et des documents qu’il transportait. Le chef tchetnik Pavle Djurišić, informé par un de ses espions chez les Partisans, a prétendu qu’il apportait les plans détaillés d’un débarquement aéronaval franco-britannique sur l’Adriatique entre les bouches de la Neretva et de Kotor. Ce plan aurait eu pour but d’attirer les Partisans et les Tchetniks vers cette zone et d’obliger les pays de l’Axe à y transférer une part importante de leurs forces, ce qui aurait facilité le débarquement allié en Italie. Il n’est pas impossible que certaines des instructions données à Pillafort aient fait partie d’un des nombreux plans d’intoxication qui ont précédé les débarquements en Europe. Cependant, il est bien établi, par les rapports de Ravix, les souvenirs de Djilas et de Dedijer et les archives yougoslaves ouvertes depuis, que Tito avait décidé le passage de la Neretva avant l’arrivée de Pillafort.
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Dernière édition par patrikev le Dim Avr 03, 2011 21:04; édité 1 fois
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MessagePosté le: Dim Avr 03, 2011 21:00    Sujet du message: Répondre en citant

19 novembre
Constance (Allemagne)
– La princesse Mafalda de Savoie, fille de Victor-Emmanuel, fête cette fois son propre anniversaire en compagnie de ses enfants et de son époux, le prince Philippe de Hesse-Darmstadt. Mafalda a choisi d’organiser les festivités non pas au château hessois de la Fasanerie, mais chez son cousin le prince Michel de Monténégro (la mère de Mafalda est Elena de Monténégro, fille du dernier roi, Nicolas Ier Petrovic-Njegos). Le prince séjourne à Constance, près de la frontière suisse, et tout le monde fait semblant d’ignorer qu’il est en fait captif depuis qu’il a refusé la couronne de son grand-père, que Mussolini voulait lui offrir en 1941.
Le prince Philippe s’est retiré de bonne heure. Mafalda et Michel bavardent entre les lauriers du parc. « Michel, comment supportez-vous de rester ici ? La frontière et à deux pas, la Suisse est pleine d’agents français, ils ont déjà fait évader je ne sais combien de généraux. Moi, j’ai mes enfants, mais vous ? » Michel détourne la tête. Il évite de dire à sa cousine qu’un commando monténégrin envoyé pour le libérer a été arrêté en France quelques jours plus tôt.


20 novembre 1942
Rastenburg (Prusse-Orientale) –
Le Führer a convoqué dans sa tanière le tsar de Bulgarie, Boris III. A l’ordre du jour : l’anéantissement des maquis balkaniques. Hitler en a plus qu’assez de ce foyer de rébellion au cœur de la "forteresse Europe". L’armée allemande est très éprouvée par la gigantesque bataille dans les plaines russes, et l’allié italien, menacé sur son propre sol, ne peut guère fournir d’effort supplémentaire. En fait, la loyauté des Italiens au Pacte Tripartite devient chaque jour plus douteuse… Ces difficultés sont pour le Führer une bonne raison de faire appel aux partenaires mineurs de l’Axe – et, comme Hongrois et Roumains payent déjà (et cher) de leurs armées sur le front russe, il ne reste guère que les Bulgares !
Fin décembre lui paraît la saison idéale pour l’opération "Weiss" (Blanche), bien nommée : les traces des fugitifs seront parfaitement visibles dans la neige. Le général von Brauchitsch a déjà préparé la carte, mais c’est à peine si le Führer lui laisse placer un mot. D’une voix hachée, Hitler énonce son plan d’opération. L’armée bulgare a 21 divisions opérationnelles, dont 6 en territoire ex-yougoslave (les 6e, 14e, 15e, 17e, 21e et 24e DI, rappelle poliment Brauchitsch). En les faisant relever par des divisions de réserve, au moins les deux tiers de ces forces devront se déplacer vers l’ouest de la Bosnie où elles participeront à l’encerclement du territoire titiste. Une fois ce "repaire de bandits" anéanti, les divisions bulgares seront équipées de neuf, grâce aux usines allemandes qui leur fourniront le meilleur de leur matériel, promet Hitler, et elles iront sur le Dniestr se préparer à la grande offensive de printemps qui, cette fois, portera le coup de grâce aux Russes…
Le malheureux tsar, abasourdi par la logorrhée du Führer, essaie en vain d’objecter le sous-équipement de son armée, la menace des Franco-Britanniques, qui avancent en Grèce, et des Turcs, toujours prêts pour un mauvais coup contre leurs voisins balkaniques. Enfin (argument très juste, mais particulièrement maladroit), il invoque la russophilie du peuple bulgare.
Hitler se déchaîne alors contre son petit allié, qui n’a pas brillé par son zèle depuis le début du conflit, contre les Slaves, "misérables nains sans culture", contre les Juifs, trop tolérés en Bulgarie et qui s’y livrent à leur habituel travail de sape, et enfin contre la parenté italienne du tsar, en particulier sa belle-sœur Mafalda, "la charogne la plus trouble de la maison d’Italie", dont la petite diplomatie familiale n’a pas échappé aux oreilles de l’Abwehr. Que le tsar s’écarte du droit sentier de l’Axe, et lui et son royaume seront écrasés sans pitié !
Boris III reprend l’avion, tremblant et pâle comme un mort. De retour à Sofia, il doit s’aliter.

22 novembre
Monts du Pinde (Grèce centrale) –
Novembre est froid, cette année, en Grèce et dans les Balkans. Du 17 au 20, de fortes pluies ont arrosé la région. Mais depuis le 21, le beau temps revient, et c’est heureux, car voici la pleine lune avec ses parachutages.
« Les dieux nous jouent parfois des tours. J’étais venu en visite chez nos voisins de maquis, les Elassis d’Aris Velouchiotis, pour assister à leurs derniers préparatifs d’attaque contre le viaduc de Gorgopotamos. Le SOE britannique et notre vieil ami le colonel Tsigantes avaient royalement fait les choses : deux avions identiques, l’un pour l’EDES, l’autre pour l’ELAS, chargés de matériel et de deux instructeurs chacun. Catastrophe : un régiment de troupes aéroportées allemandes venu d’Athènes (une unité, comme je l’appris plus tard, qui n’avait pu être engagée à Limnos) venait juste de remplacer la paresseuse garnison italienne. Et, comme s’ils s’attendaient à notre visite, ils avaient renforcé les défenses du pont. Le fleuve semblait se moquer de nous. Aris Velouchiotis ressemblait tout à fait au lion décrit par Homère, qui, après avoir rôdé toute la nuit autour des étables, doit repartir le ventre creux (*) .
Le colonel Sarafis, au contraire, était soulagé. Il m’expliqua pourquoi. Si la voie ferrée avait été coupée à Gorgopotamos, les Allemands auraient été incapables d’approvisionner leurs troupes en Grèce centrale contre une offensive alliée, et ils auraient dû se retirer jusqu’au Sperchion, très facile à défendre en période de hautes eaux. Mais ils seraient restés en Thessalie, située au nord du fleuve, et la province se serait retrouvée sur le front, avec les destructions et les pertes humaines que cela impliquait. Sarafis, avec son intégrité d’homme et de soldat, n’avait rien dit pour ne pas rompre l’unité retrouvée de la résistance grecque, mais il souffrait de devoir lui sacrifier sa région natale. »
(Henri Van Effenterre, Le Nœud d’Hercule, 1967)

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(*) Iliade, chant XI.
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