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Bataille de France-Sud, Mars 1944
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Casus Frankie
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Inscrit le: 16 Oct 2006
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MessagePosté le: Jeu Nov 25, 2021 20:34    Sujet du message: Bataille de France-Sud, Mars 1944 Répondre en citant

1er mars
Opération Charleroi
Ardèche
– Dans le secteur de la 4e DI belge et de la 14e DI française, la situation se stabilise peu à peu. Les Français atteignent Thueyts, mais sont bloqués un peu au sud, devant le rocher d’Abraham qui verrouille tout le Grand Val.
La progression est moindre également pour la 19e DI associée aux Chasseurs Ardennais, dont l’attaque s’est quelque peu “diluée”. L’assaut initial avait été donné sur moins de 20 km par quatre régiments face à deux régiments allemands, mais les mêmes attaquants sont maintenant étalés sur plus de 35 km et font face au 755. GR de la 334. ID et à deux régiments de la 165. ID. Celle-ci avait d’abord été bien bousculée, mais elle s’est reprise et arrive à reculer en bon ordre, plus vite que les Alliés n’arrivent à franchir les coupures.

Opération Waffle
Causse
– Les grenadiers de la 355. ID se battent rageusement pour endiguer le flot américain. La nouvelle d’une contre-attaque dans le secteur de Millau et l’effort logistique demandé pour la traversée des Causses (des parachutages de munitions, d’essence et d’eau sont organisés dans la journée) entravent quelque peu la progression vers le nord des troupes américaines. Les combats les plus violents se déroulent dans le secteur de Florac, où les Allemands du 866. Grenadier Rgt repoussent dans la journée pas moins de trois tentatives du 349e RCT, ce qui permet au 756. GR de la 334. ID de retraiter en bon ordre.


2 mars
Opération Charleroi
Ardèche
– La 19e DI recolle au dispositif de la 165. ID sur une ligne allant du sud de Luc jusqu’au hameau de Cubières. En face, le 205. Grenadier Rgt et le StuG Abt 394, à l’est, verrouillent la haute vallée de l’Ardèche entre Barnas et Saint-Pierre de Colombier.

Opération Waffle
Causse
– La situation se calme pour les deux camps à l’est de Millau. La 266. ID stoppe son attaque, car les trous qu’elle tentait d’exploiter sont en voie d’être colmatés.
En défense, la 355. ID achève de prendre position de l’autre côté des gorges du Tarn – le 867. GR réussit même l’exploit de se désengager pour se repositionner 20 km plus à l’ouest, en dépit d’une aviation alliée omniprésente. La 334. ID, de son côté, se repositionne au sud et à l’est de Mende, sans perdre le contact avec sa voisine, la 165. ID.
Les Américains, suivant ces mouvements, mènent une poursuite prudente. La séquence coupure, embuscade, demande de soutien d’artillerie ou d’appui aérien, puis nouvelle progression, se répète à bien des reprises.


3 mars
Opérations Charleroi et Waffle
Massif Central
– Chez les Alliés, à présent que les combats cessent peu à peu sur toute la ligne de front et que les différentes unités s’installent sur leurs nouvelles positions, c’est l’heure du bilan. La double opération Charleroi/Waffle est vue comme une incontestable réussite. Elle a permis de progresser et de raccourcir la ligne, mais surtout de libérer des unités. Ainsi, dans la fonction de garde au fleuve, le terrain gagné le long des rives du Rhône permet aux 10e et 15e DBLE de relever la 1er DP, qui stationnait dans ce secteur depuis Nordwind en décembre. A l’état-major français, on est très satisfait du comportement de la 19e DI. Les deux régiments de Chasseurs Ardennais, qui avaient été de tous les coups depuis le débarquement, peuvent passer en réserve de corps.


4 mars
Réorganisation allemande
Paris
– Une réunion tenue autour du Feld-maréchal von Rundstedt examine les conséquences des opérations alliées des jours précédents. Un aide de camp de Keitel, l’Oberst Ernst-John von Freyend, est également présent. Après avoir fait part du fort mécontentement du Führer après ce nouveau recul, il accepte d’examiner la situation de manière objective avant de rendre un rapport à l’OKW. Après examen des divers rapports et discussion sur les autres possibilités ouvertes aux forces allemandes dans le Massif Central, il apparaît que leur retraite, pour précipitée qu’elle apparaisse, a sauvé tout un ArmeeKorps d’un encerclement et empêché une percée alliée critique.
Mais l’envoyé de Berlin a un autre message, plus inquiétant sans doute pour von Rundstedt. Une offensive majeure se prépare sur le Front Est – elle débarrassera la Heer du souci soviétique pour six mois au moins. Mais avec l’arrivée du printemps, les Alliés occidentaux vont sûrement repartir à l’attaque et ne pas se contenter du grignotage de ces dernières semaines. Il faudra, dans la grande tradition de l’armée allemande, contre-attaquer impitoyablement.
Avec quelles troupes ? Il y a moins d’un mois, le Heeresgruppe G a déjà perdu le II. SS-PzK ! Hé bien, Rundstedt n’aura qu’à prélever des troupes dans le HG D, qui est depuis assez longtemps en villégiature à Paris et dans le nord de la France. Du moins, c'est ainsi qu'on voit les choses à l'OKW…

Impatience française
Front du Rhône
– Après un hiver plutôt doux, les Français sur la ligne de front piaffent d’impatience. Ne pourrait-on lancer plus tôt que prévu l’opération Cobra ? Mais les Américains – tout en précisant qu’ils comprennent le désir de leurs alliés – s’opposent à toute modification du calendrier. Le ravitaillement qui parvient sur le front est écartelé entre les Balkans, l’Italie, la Provence et l’Angleterre, où se prépare l’opération Overlord – attaquer trop tôt serait risquer de gâcher la seconde partie de la Deuxième Campagne de France.
Les Français se font une raison, d’autant plus qu’ils se disent que chaque jour de délai leur permettra d’améliorer la formation des nouvelles recrues levées depuis Dragon. L’état-major a en effet décidé de les amalgamer aux unités déjà constituées.


5 mars
Renforts alliés
Marseille
– Les quais d’Arenc voient débarquer les hommes et les engins de la 6e BMLE. Cette unité venant d’Italie va être affectée au Ier Corps français, qui opère dans les Alpes et face à l’Italie. Elle a été au passage la dernière à être rééquipée en chars moyens Taureau, alors qu’elle avait été la première, presque un an plus tôt, à recevoir des chars légers Mouflon.


6 mars
Renforts alliés
Golfe de Fos
– Le débarquement de renforts en provenance d’Italie continue. C’est la 13e BACA qui met pied à terre. Les artilleurs vont prochainement monter en ligne pour se joindre au 2e Corps belge qui opère en Ardèche, remplaçant le 35e Artillery Group américain qui lui avait été prêté.

Guerre aérienne
Sud de la France
– Le lieutenant André Lesueur, du GC III/6, s’adjuge sans trop de mal un Fw 190 : « Nous étions en couverture dans le secteur de Valence. Nous devions faire l’essuie-glace pour dégager le chemin de la tournée du laitier des Forteresses revenant d’Allemagne. Or, voilà que le vol bleu nous annonce tout un groupe de Focke-Wulf dans nos trois heures, entre les nuages. Nous avons engagé le combat. Il y avait quelques experts chez eux et on a perdu deux gars – Dieu merci, ils se sont parachutés. En revanche, le mien devait être un débutant ! Il poursuivait le 6 rouge de Félix [le lieutenant Félix Brunet], mais il avait toutes les peines du monde à l’aligner, ses traçantes passaient chaque fois à côté. Il ne m’a pas vu arriver, j’ai tiré et j’ai vu un bout d’aile se détacher avant qu’il parte en vrille. Le pilote a été fait prisonnier, paraît-il. »
Pas de nouba pour le lieutenant le soir, bien que ce soit sa cinquième victoire confirmée. Juste une rasade d’Elixir de la Mort, mélange de toutes sortes d’alcools forts servant à fêter les victoires au mess.


7 mars
Guerre aérienne
Sud de la France
– La balance militaire penche de plus en plus en faveur des Alliés, mais la JG 2 continue de veiller au débouché de la vallée du Rhône, où elle constitue la première ligne de défense contre les bombardiers lourds qui passent tous les jours ou presque pour aller bombarder le Reich.
Dans la matinée, le major Egon Mayer s’offre un quadrimoteur et un P-38, tandis que le Hauptmann Siegfried Lemke abat un P-51 du 33rd FG. Plus tard dans la journée, les mêmes augmenteront encore leurs tableaux de chasse respectifs : le premier en abattant un Liberator éclopé qui tentait de rallier les lignes alliées (74e victoire), le second en s’offrant un second P-51, du 86th FG cette fois (52e victoire).


8 mars
Guerre moderne…
Robert Capa, Carnets de Provence
« Tout journaliste, et en particulier tout correspondant de guerre, doit faire des choix, souvent des paris, pour être au bon endroit au bon moment. J’aurai pu intituler ce billet comment être au mauvais endroit au bon moment – ou comment perdre en misant sur le 28. En effet, mon intuition me susurrait que notre 28th Infantry Division Keystone serait au cœur de la prochaine action. Et mon intuition s’est lourdement trompée.
Fin février, j’attendais, j’attendais, alors que tout autour de nous tout s’était à nouveau mis en mouvement. Finalement les combats commencent, me donnant l’occasion de faire quelques clichés, mais voilà que nous sommes relayés sur nos positions par les gars de la Rock of the Marne et que nous embarquons tous dans des camions. Après une nuit à rouler tous feux éteints dans le froid vif de cette campagne française en fin d’hiver (même si j’ai connu des hivers plus froids dans mon enfance en Europe de l’Est), nous débarquons. Le chef de section me renseigne. Les Allemands ont déclenché une contre-offensive dans le secteur de Millau et notre division a reçu l’ordre d’aller boucher le trou en urgence. Nous nous sommes donc déplacés d’une soixantaine de kilomètres vers l’ouest. Je n’aurai du front ce coup-ci que des images confuses, faites de fumées d’artillerie lointaines, d’appareils piquant sur des reliefs distants en déchaînant leurs armes. Tout s’est finalement terminé avant même que je sois au courant des tenants et des aboutissants, notre mouvement avait suffi.
Je comprends mieux maintenant comment les Français ont pu être ainsi vaincus en 40 : tout va tellement vite que l’impression que l’on peut en tirer est d’une confusion absolue. Vitesse et confusion, c’est aussi ça la guerre moderne. En 40, les Français ont été pris de vitesse par une armée plus mécanisée que la leur. Aujourd’hui les choses sont inversées (grâce à Ford et General Motors, Dieu les bénisse) et ce sont les Allemands qui subissent. Mais pour le pauvre fantassin qui se déplace à pied, tout n’est que chaos. »



9 mars
Accalmie
Sud de la France
– La tramontane souffle fort en Languedoc et le ciel est lourd de nuages en vallée du Rhône, mais dans les deux cas, les soldats alliés passent une journée des plus tranquilles. Il faut évidemment baisser la tête en cas de duel d’artillerie, ce qui arrive de temps en temps, mais les huiles n’ont pas décidé d’assaut, ce qui n’est pas pour déplaire à la plupart des soldats.


10 mars
En montagne
Alpes
– La 6e BMLE, récemment arrivée sur ce front, est venue se positionner dans les Basses Alpes, à la jonction de la 9e DIC et de la 4e DMM. Parallèlement, le 1er RCA a quitté ses quartiers face à la frontière italienne pour se redéployer à quelques kilomètres de là, dans la vallée du Var, aux alentours de Carros.


11 mars
En montagne
Alpes
– Dans les Alpes de Haute-Provence, au sud-est de Colmars, le 6e RTM lance une série de reconnaissances agressives du ravin de la Lance vers les positions du 901. Gebirgsjäger Regiment à la cabane de la Sanguinière et aux Aiguilles de Pelens. Le but n’est pas tant de tenter de déborder un adversaire qui tient les hauts que de le fixer pour l’empêcher de réagir à l’offensive qui se développe plus au sud.
Là en effet, le 902. Rgt de la 188. Gebirgs Division est la cible d’une attaque en pince. Le 4e RTM déborde au pied de la montagne de Beaussebérard et met la pression sur les positions ennemies de la Tête de Travers, et le 5e RTM, renforcé d’éléments du génie et du II/4 Chasseurs, s’avance dans la vallée en direction de Guillaumes.
Et cette offensive n’est pas purement alpine. Le verrou d’Entrevaux, déjà attaqué les mois précédents, est la cible d’une double attaque : de la part de la 6e BMLE par le vallon de Brec et du 3e GTM par le sud. Pour faire bonne mesure, la 9e DIC pousse également avec le 20e RIC, appuyé par le 5e RAC, en direction d’Aiglun depuis le plateau de Gréolières.
Enfin, dans la vallée du Var, le 5e RTS, accompagné des M7 Mouflon du 1er RCA et d’éléments de la 12e BACA, attaque les positions de la 715. ID sur les hauteurs de la Roquette sur Var.


12 mars
En montagne
Alpes
– Alors qu’au nord, le 6e RTM poursuit ses opérations de fixation, les 4e et 5e RTM ne progressent que lentement dans le massif de la Tête de Travers. En effet, dans ce secteur, les Allemands tiennent bien leurs positions, aux gorges de Daluis notamment.
Plus au sud, si les fantassins de la 148. ID sont solidement retranchés sur les crêtes de Val de Chalvagne et les hauteurs d’Aiglun face aux Marocains du 3e Tabors et aux Marsouins du 20e RIC, le secteur du vallon de Brec craque sous les coups de boutoir des légionnaires. En dépit de la contre-attaque du bataillon de fusiliers de la division, la 6e BMLE arrive en vue d’Entrevaux, menaçant de déboucher sur les arrières de la 148. ID.
Dans la vallée du Var, dans les collines dominant le village de la Roquette, la situation est bloquée entre les hommes du 5e RTS et ceux du 774. Grenadier Rgt, qui tiennent toujours le mont Arpasse, dominant la route de Levens. En effet, le régiment de tirailleurs a dû engager son 3e bataillon sur ses arrières en compagnie du I/8 RCA à cause d’une contre-attaque allemande lancée par le 725. GR, renforcé du bataillon de fusilier de la 715. ID, dans le secteur de Contes et de Berre-les-Alpes. L’assaut est repoussé grâce à l’intervention de l’aviation mais aussi à la montée en ligne d’éléments du génie divisionnaire et du 3e RSM, tandis qu’une partie des pièces de la 12e BACA se sont rapidement repositionnées pour appuyer la défense.


13 mars
En montagne
Alpes
– Alors que les éclaireurs-skieurs du 4e RTM obtiennent une percée sur la Tête de Travers avec l’aide de l’aviation, ce sont les mortiers de 160 qui permettent de forcer le dispositif allemand aux gorges de Daluis. Les Gebirgsjägers n’ont d’autre solution que de reculer en direction du Mont Saint-Honorat et de Guillaumes. Dans les gorges, si un coup heureux des artilleurs français a permis la prise du premier tunnel intact, les Allemands se sont retirés en faisant sauter les deux autres, bloquant ainsi la progression des tirailleurs.
Les combats continuent autour d’Entrevaux et Aiglun. Si les Allemands s’accrochent autant dans ce secteur, c’est pour permettre le recul en bon ordre du 281. GR, qui a cédé sur les pentes de Val de Chalvagne et de Castellet Saint-Cassien. A l’est, dans la matinée, une frappe réussie de la 25e EB contre les positions d’artillerie de la 715. ID permet de contenir les velléités des grenadiers du 725. Rgt. Du coup, le 5e RTS, qui a récupéré son 3e bataillon et qui est maintenant soutenu par les 75 du 1er RCA, dont les blindés ont rallié, réussit à prendre pied sur le mont Arpasse. Il force ainsi les Allemands à se réfugier autour de Levens.
Dans les airs, les Allemands, ou plutôt leurs alliés de la RSI tentent de réagir. Quatorze Bf 109 et Macchi 202 tentent de s’en prendre aux bombardiers français. Ils en sont pour leur frais, perdant pas moins de cinq appareils contre un Mustang du GC II/2 abattu et deux Boston endommagés. Le commandant Jean-Marie Accart, qui n’avait plus augmenté son score depuis quelque temps, obtient sa 11e victoire.


14 mars
En montagne
Alpes
– Alors que le 5e RTM se bat toujours dans les gorges, le 4e RTM continue avec succès sa manœuvre de débordement en direction de la vallée où passe la D74. Leurs positions sur le Mont Saint-Honorat risquant d’être isolées, les Allemands les abandonnent.
La perte de la Tête de Travers et d’Entrevaux ouvre non seulement une porte sur les arrières de la 148. ID, mais elle sépare aussi cette dernière de la 188. Gebirgs Division. La 148. ID n’a d’autre solution que de décrocher. En effet, pendant que les Goumiers et les Coloniaux du 20e Rgt nettoient les secteurs d’Entrevaux et de Puget Théniers, la 6e BMLE progresse dans la vallée, culbute un 281. Grenadier Rgt qui a bien souffert et menace maintenant les arrières du 286. Grenadier Rgt.
Pour ajouter à cette série de mauvaises nouvelles pour les Allemands, dans la vallée du Var, c’est maintenant le village de Gilette, sur l’autre versant, qui est sous la pression de l’artillerie française, et même des M7 tirant des hauteurs en face, ce qui laisse présager un assaut prochain. La 148. ID va devoir très vite se retirer dans ce secteur aussi si elle veut éviter l’encerclement.


15 mars
En montagne
Alpes
– Le débouché dans la vallée d’Entraunes du 4e RTM menace maintenant les arrières du 901. GbJg Rgt, qui tenait fermement ses positions face aux tirailleurs du 6e RTM. Les Chasseurs de montagne allemands sont obligés de déménager sur l’autre versant de la vallée pour préserver l’intégrité du dispositif.
Plus au sud, la retraite de la 148. ID sur la ligne de relief suivante a permis à cette division de retrouver le contact avec les Autrichiens de la 188. GD. La route de Carros est donc ouverte, ce qui n’empêche pas les combats de continuer toute la journée. Ils mettent notamment aux prises des éléments retardateurs allemands très accrocheurs avec les légionnaires et les tirailleurs, appuyés par une 2e EC qui traque impitoyablement tout mouvement ennemi.
Dans les Alpes Maritimes, la 715. ID doit également réorganiser son dispositif pour ne pas se faire tourner sur son flanc nord.

Les Ides en échec
Rastenburg
– Le fait capital de la journée ne se déroule pas, cependant, dans le sud de la France, mais en Prusse orientale, au Wolfsschantze (la Tanière du Loup). La bombe qui devait tuer le Führer et sauver de nombreuses vies en mettant fin à la guerre épargne Adolf Hitler. Cet évènement est encore inconnu des Alliés, mais il va avoir des conséquences graves sur tous les fronts d’Europe.


16 mars
En montagne
Alpes
– Alors que les combats se calment peu à peu dans le sud des Alpes, les éléments de pointe de la Légion, qui ont remonté toute la vallée, font leur jonction avec le 5e RTS au niveau des villages de Gilette et de Malaussène, abandonnés par les grenadiers du 285. Rgt.
Par ailleurs, la remontée du front a provoqué un allongement excessif de la ligne tenue par la 9e DIC. Aussi l’état-major a-t-il décidé d’engager en première ligne le 1er GTM, qui s’est brillamment illustré dans les Pyrénées, pour permettre à l’infanterie coloniale de se concentrer sur ses nouvelles positions.


17 mars
Renouveau
Alès
– L’ancienne caserne Thoiras est aujourd’hui le lieu d’une prise d’armes pour déclarer opérationnelle la nouvelle 36e Division d’Infanterie de l’Armée de Terre française. Cette dernière intègre, à l’image de sa sœur aînée, la 19e, beaucoup de jeunes éléments dont certains ont connu les maquis du Languedoc ou, pour certains, ceux des Alpes Maritimes.
Si l’état-major français a tenu à “faire de la réclame” autour de cette prise d’armes en invitant les correspondants de guerre de tout poil, c’est surtout pour tenter de faire croire aux Allemands que le nouveau corps belge se muscle considérablement. En réalité, le gros de cette nouvelle unité est déployé dans les Hautes Alpes, sur les arrières de la 27e Division Alpine.


18 mars
Guerre aérienne
Sud de la France
– L’actualité du jour est représentée par le triplé du capitaine “Sully” Varnell, du 52e FG, lors de l’escorte d’un raid sur Francfort. Il atteint un total de huit victoires. Le capitaine, qui a connu l’époque du Spitfire V au 52e, ne tarit pas d’éloge sur sa nouvelle monture, le Mustang D, qui lui a permis d’obtenir ce triplé.


Dernière édition par Casus Frankie le Ven Nov 26, 2021 10:11; édité 1 fois
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Bob Zoran



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MessagePosté le: Jeu Nov 25, 2021 22:41    Sujet du message: Répondre en citant

Dans le témoignage de Capa :

Citation:
Je n’aurai vu du front ce coup-ci que des images confuses,
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Etienne



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MessagePosté le: Ven Nov 26, 2021 08:28    Sujet du message: Répondre en citant

Citation:
Le commandant Jean-Marie Accart, qui n’avait plus augmenté son score depuis quelque temps, obtient sa 11e victoire.


Accart a scoré 12 victoires lors de la campagne de France...

D'une manière générale, je trouve que les scores FTL de nos pilotes qui ont fait 3 à 4 ans de combat en plus sont beaucoup trop faibles.
Dans ce contexte, même avec des périodes de repos de 6 mois (ce qui est énorme), Accart devrait avoir fait 3-4 tours de plus, et approcher la quarantaine de victoires, par exemple.
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Casus Frankie
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MessagePosté le: Ven Nov 26, 2021 10:18    Sujet du message: Répondre en citant

19 mars
Renforts alliés
Marseille
– Aujourd’hui commence à arriver d’Italie la 83e DIA. Cette dernière a recomplété ses effectifs et doit prochainement prendre la route de la Drôme et de l’Isère, où elle a été affectée.

Sur le terrain
Châteaubon (Drôme)
Dans le parc malmené qui avait fait autrefois la fierté de la bourgade, la langue pointant entre les dents, le sergent Bonestu tirait avec application sur son pinceau sous le regard approbateur du sergent Martinez. Finalement, le capitaine ne manquait pas d’humour. L’artiste se releva pour se reculer et avoir une vision d’ensemble de la portière. Un superbe “Baraka” blanc, qui n’était pas de son fait, flottait sous le bleu-blanc-rouge du drapeau. Dommage que le vert que requérait l’insigne fût introuvable. Baste, ce beige ferait momentanément l’affaire. Ça avait quand même de la gueule !
Un troisième larron contourna les décombres, passablement essoufflé, et s’appuya sur l’Opel.
– Les gars… Oh, putain, les gars…
– Ben dis donc, Jérem’ ! Qu’esse t’arrive ? T’as croisé Laval ?
– Oputainlémek !
– Sergent, tu te répètes !
– Ça va ! Respire, et accouche !
Bonestu, le pinceau d’une main, le pot de l’autre, abandonna sa contemplation pour lâcher :
– Alors quoi ? T’es promu officier ? T’as une perm’ spéciale ? Tu vas te marier ?
– Déconne !… Dis-donc, c’est pas mal, ton truc, là…
– Ça en jette, hein ? Et encore, j’ai pas la bonne couleur pour la tasse…
– C’est Tisane qu’a fait l’dessin ? Vrai ?
– Vrai ! Tiens, regarde, v’là l’crobar. Bon, tu vois, j’ai juste un peu modifié l’anse, là, et l’dessus… Mais qu’esse tu voulais tant nous dire ?
– J’crois que tu peux ranger tes pinceaux, l’Africain… Oh putain, les mecs… la guerre est finie !
– Merde !
– La guerre est finie ? Jérem’… Tu t’foutrais pas de not’ gueule, des fois ?
– Merde, non ! J’y crois pas moi-même ! Juré ! C’est mon pote Marceau, des Transmissions, qui m’a filé l’tuyau : les Boches ont dessoudé l’Adolf !
– Hein ?
– Comme j’voul’ dis ! Y’zinterceptent les communications boches, hein… Et d’habitude, c’est presque toujours chiffré, mais là, c’était en clair : l’aut’jour, une bombe a expédié l’Adolf ! Et pas une des nôtres ! Un type de chez eux ! T’imagines le chambard !
– J’y crois pas !
– D’accord avec toi, l’Africain : c’est trop gros. Encore un de leurs coups tordus…
– Ouais, sauf que d’après Marceau, ça a pas arrêté entre le QG et les huiles, depuis qu’on sait ça ! En clair et en chiffré ! Et même avec les Ricains ! Paraît qu’y a une grande réunion des huiles !
– C’est vrai que tantôt le colon est parti avec Serviac. Pour Montélimar, y paraît…
– Ha ! Tu vois !
– Oh, ça, ça serait plutôt signe qu’on va bouger. On a reçu pas mal de matos, ces jours-ci. Même des 20 pour ceux-là…
– … Mais personne pour les servir…
– … Ouais, mais tu sais c’que ça veut dire…
– Yaka d’mander au capitaine, le v’là qui s’ramène !
– Faites pas les cons ! Tout ça, c’est secret ! Marceau m’a fait jurer de rien moufter !
– … rd’à vous !
– Repos, messieurs, repos… Ha, c’est pas mal, Bonestu, pas mal…
– Merci, mon capitaine, mais si j’avais pu, j’aurais évité le beige…
– Bon !…
Le capitaine se frotta les mains. « Je ne suis pas venu pour vous voir jouer les Picasso, et c’est très bien que vous soyez ensemble, ça m’évitera de courir… » Il haussa un sourcil. « Dites donc, sergent, vous ne devriez pas être à… comment… à Barcelonne ? »
– Affirmatif, mon capitaine, mais ça a été vite réglé… J’ai même fait un détour par l’dépôt.
– Hé bien, pour une fois… Bon… Rassemblez votre monde, fini de tirer au flanc, nous allons faire une petite visite de courtoisie chez nos amis d’en face. On partira des grottes, là-haut.
Il pointa la direction du doigt.
– On va à la pêche, mon capitaine ?
– Juste une reconnaissance.
Il se passa la main sur le visage, puis leva l’index en direction de Martinez : « Pas besoin de me faire connaître vos objections, sergent ! » Il se tourna ensuite vers Jacob. « Les bleus resteront en arrière avec vous, sergent. Je sais que je peux compter sur vous. Il est temps que le sergent Bonestu tâte du terrain. Et pour ça, ce sera avec vous, Martinez. Départ…» Il consulta sa montre : «… dans une heure. Exécution ! »
Jacob et Bonestu détalèrent, mais Martinez s’attardait.
– Un problème, sergent ?
– Heu… Non, pas vraiment, mon capitaine… mais… ben… on reçoit du matos, des nouveaux… On nous envoie en reco… On va bouger ?
– Sergent, vous en savez autant que moi ! Sinon plus ! C’est tout ?
– C’est que… vous voulez que je sois la nounou de l’Africain ? Et puis, si en plus il faut s’trimballer les autres bleusailles…
– Et que diable voulez-vous ? Qu’on les garde au chaud et qu’on continue à leur faire faire de la peinture et creuser des latrines ? Ne vous ai-je pas entendu vous plaindre qu’on manquait de monde ? A un moment, il faudra bien qu’ils y aillent ! Vous voulez attendre que ce soit quand ceux d’en face se remueront ? Non ? Bon ! Rompez !
Martinez n’avait pas fait trois pas que le capitaine le rappelait :
– Au fait, Martinez, un détail : où habitiez-vous, gamin ?
– Heu… Eh bien… A Tanger, mon capitaine… répondit l’autre, interloqué. Vous l’savez bien : pas très loin de la Place des Nations, mais là, j’étais déjà grand. Tout môme…
– C’est bien ce qu’il me semblait. Merci, ce sera tout, fit l’officier en secouant la tête avant de lui signifier son congé d’un geste de la main.
………
Ils avaient quitté Châteaudouble et cheminé rapidement jusqu’à l’épingle d’où la route se hissait péniblement sur le plateau. Entre les branches dépouillées, tout le vallon sous leurs yeux était un no man’s land aux hameaux désertés, si pas incendiés, sous les feux à la fois des Allemands, qui occupaient les rebords de la falaise, et des Français, qui en bloquaient les débouchés vers le Rhône.
Entreville, de la 3e Compagnie, les attendait à la carrière, en compagnie d’un autochtone, un quadragénaire en velours côtelé nommé Croydoux, qui disait avoir parcouru les lieux en long et en large depuis qu’il était capable de marcher. Le capitaine fit les présentations. De Fresnay prisait fort peu de travailler avec des civils. L’idée d’écoper de l’un d’eux faisait plus que le hérisser, mais son pair le rassura : il était hors de question que l’homme fasse ne serait-ce qu’un mètre avec les tirailleurs. Il allait juste apporter des précisions sur le chemin prévu.
Laissant le petit personnel s’occuper du quotidien – à savoir : installer un bivouac dans les grottes – les deux officiers et le sieur Croydoux gagnèrent le sommet de la falaise pour préparer le lendemain. Ce qui les frappa en premier, c’était le bruit que faisaient les soldats, à leurs pieds. On percevait bien comme une volonté de discrétion, mais ça n’allait pas plus loin.
– Eh bien, si vous faites autant de raffut demain, commenta Entreville, c’est pas gagné ! Le premier imbécile venu vous entendra !
– On va y remédier, grinça De Fresnay en resserrant son écharpe. Où les boches risquent-ils de se trouver ?
– En bordure de falaise, mon capitaine, fit le civil, montrant par là qu’il lui restait des souvenirs des bonnes manières acquises en caserne. On en a déjà discuté avec le capitaine. Sans doute pas tout du long. De sûr, au Pas du Touet, vous voyez, là, juste en face de nous. Deux bornes, à vol d’oiseau, environ. A vol d’oiseau, hein…
Il pointait la falaise du doigt : « Y’a un chemin qui monte des baraques, là, et qui file là derrière chez l’Auguste… Après, la roche tourne vers la droite, comme ça… puis elle revient là…» Il cessa de ponctuer ses indications de ronds de bras pour se baisser et tracer une ligne sur le sol à l’aide d’une brindille. « Et après, elle rejoint l’Epenet, la montagne, là bas. Et là… » Il piqua sa brindille « …c’est là qu’arrive la route de Barbière. C’est une sorte de col… Là, ils y sont, pas de doute… »
– D’accord. Et c’est cette route qui mène à l’abbaye…
– Voilà… Ensuite, entre le col et le Pas, par là…
Il tendit le bras vers les crêtes proches : « Y’a les Roches. On est à onze cents, onze cent dix, on peut voir quasiment tout l’pays, à commencer par la route de Peyrus. »
– Qu’en penses-tu, Entreville ?
– Que ça va être finaud à jouer. C’est plein coupé de ravins, ton chemin. Avec le brouillard qu’on a en ce moment…
Deux paires de jumelles se mirent à scruter les lieux.
– Mais dites-moi, Croydoux, vous m’aviez parlé d’un autre endroit…
– Mer…, c’est vrai ! Ça s’appelle les Rancs. On les voit d’ici. Tenez, là, en face ! Belle vue, aussi, d’là-haut. Comme l’autre : dans les onze cents.
Un silence se fit, qui s’éternisa, jusqu’à ce que le Croydoux comprenne et prenne congé, alors que le soleil baissait. Puis Entreville regagna son poste, à savoir un observatoire aménagé sur l’éminence proche, et De Fresnay s’en retourna auprès des siens, décidé à leur passer le savon carabiné que motivait leur discrétion.
Quand il trouva ses hommes installés aussi bien que possible dans la cavité avec, sur les foyers dissimulés aux vues d’observateurs potentiels, le café ou le thé déjà prêts, avec les sentinelles à leurs postes, ses feux retombèrent et il se contenta d’un petit laïus sur les répercussions des sons en pied de falaise. Ce qui serait d’ailleurs le gros problème du lendemain : les éboulis qu’on allait parcourir était si sonores qu’ils tintaient comme autant de pièces de métal.
Bonestu s’était avancé dans l’inconnu, mais, sans lumière, il ne put aller bien loin : c’était sombre, et humide. Savoir ce qu’il pouvait y avoir, là, comme gouffres, à-pics et abîmes… Le chuchotement soudain de Martinez le fit tressaillir :
– Alors, l’Africain, tu cherches les chiottes ?
– Pas spécialement. Ça va loin ?
– Aucune idée. Autant que je sache, on pourrait y caser au moins deux compagnies, mais faut pas craindre la flotte ni les courants d’air. On pense pas que ça aille jusque chez les Chinois, c’est tout.
– Ça pourrait p’têt ressortir chez les Boches ?
– C’est ça. Et toi, avec ta peinture et ton pinceau, tu en profiterais pour leur faucher les plans de leur dispositif ?! Arrête de rêver, et viens prendre ton tour…
Au matin, le froid se fit d’autant plus vif que le brouillard matinal collait au rocher et noyait l’univers. On n’y voyait pas à dix mètres, raison pour laquelle on se trouvait là. L’ennui était que la nappe qui les dissimulait ne faisait pas de discernement : si aucun observateur ne pouvait les voir, chacun d’eux se sentait seul au monde. Les copains disparaissaient sitôt qu’on rêvassait un tant soit peu, et lorsqu’on avançait, les arbres squelettiques semblaient surgir du néant sans logique.
Se faufiler entre les buis, les broussailles et les arbustes, sans butter sur une racine, glisser sur un reliquat de neige gelée ou déclencher une averse de pierraille, demandait une attention de tous les instants. Il n’y avait même pas de sente tracée par les bêtes, et on devait sans cesse s’éloigner de la falaise pour contourner d’abrupts éboulis.
Périodiquement, on faisait une pause, histoire de changer les gars de tête et de permettre au capitaine de refaire le comptage de ses troupes. Tout le monde suivait, même les bleus.
Brusquement, le coton qui les entourait s’effilocha et de grands pans de bleu apparurent au-dessus de leurs têtes, dévoilant leur but. Au loin, les cris d’un geai coléreux percèrent le silence. Bonestu s’approcha de son prédécesseur : la file s’était immobilisée, et les soldats étaient aux aguets. Certains commençaient à s’écarter dans la pente, dispersés du geste par De Fresnay.
Le caporal El Mardi se tourna vers le sergent Bonestu : « T’as entendu, chef ? »
– L’oiseau ?
L’autre opina du chèche et continua : « C’est pas nous qui l’a dérangé. »
Sur ce, passa le capitaine : « On est au sentier, mais il y a du monde dans le coin. Vous deux, une fois arrivés au chemin… »
Il en montra la direction de la main : «… Traversez, planquez vous et attendez. Je vais placer le sergent Jacob et les bleus. »
Le caporal se mit en route. Trois pas plus loin, il se retourna et murmura : « Pas comme ça, chef. Tu restes là, tu fais gaffe, et tu me rejoins quand je siffle. »
Leurs haleines se joignant aux gros lambeaux de brouillard qui montaient maintenant par à-coups à l’assaut de la crête, les soldats se terraient sous les pins et les chênes dégouttant de perles irisées.
Attendre… L’activité principale du soldat. Défense de fumer, mais pas de becqueter. Bonestu mâchonnait un morceau de pain sec, tout comme le caporal, quelques pas plus bas. Parfois, il distinguait un mouvement, lorsque l’un des hommes changeait de position, incommodé par l’humidité, la pierraille aux arêtes aigües, ou une crampe.
Attendre, avait dit le capitaine. Et surtout pas de coup de feu ! Ceux qui étaient passés auparavant n’étaient qu’une poignée, trois ou quatre, ou six, sans doute le ravitaillement pour un poste dans le vallon. On allait tenter de les serrer en douceur au retour. C’était pas prévu dans les carnets du capitaine, mais ce dernier entendait profiter de l’aubaine. Restait plus qu’à espérer que les clients repasseraient par le même chemin, et surtout que ce ne soit pas une patrouille plus étoffée, ni à la nuit !
Le soleil montait dans le ciel, finissant par dissiper les dernières nappes grises. Un minuscule passereau vint sautiller sur une brindille à deux pas du sergent. En aval éclata brusquement le cri rauque d’un geai. Alors que le skrrèèik courroucé résonnait une nouvelle fois en sous-bois, chacun se tendit. Bonestu sentit son pouls s’accélérer, et il se massa furieusement le mollet, soudain pris de fourmillements.
D’abord on entendit rouler une pierre, puis un tintement métallique. Ensuite apparurent quatre silhouettes sombres, qui discutaient à voix basse tout en marchant.
– Händen raus !
Le capitaine venait de leur barrer le passage.
Les Teutons pilèrent et obtempérèrent. Pas le temps de réfléchir à autre chose : les tirailleurs déboulaient de chaque côté, et ce qu’ils maniaient semblait bien plus dangereux qu’une carabine ! Avec des mimiques diverses, les quatre hommes se laissèrent désarmer, mettant bien sagement les mains sur leurs casques.
– Da sind sie die Franzosen ! fit l’un d’eux, un sous-off, à première vue, à l’adresse d’un rougeaud.
Tandis que Chakir, Ahmed et Khaled se chargeaient d’armes et d’équipements divers, le caporal Santini, faisant preuve d’originalité, osa un : « Ha, laisse kapoute ! Hitler Kapoute ! »
– Es iste ein Lüge !
La répartie avait fusé aussi sec.
On n’allait pas s’éterniser. D’un geste, le caporal leur indiqua la direction à prendre. Pour le retour, on avait décidé de couper au plus court, à travers les bois, bien en aval du chemin aller, ce qui ne promettait pourtant pas d’être une simple promenade. Au bout d’une centaine de mètres, on autorisa les invités à baisser les bras pour éviter qu’ils se cassent la g… figure.
A la première pause, Martinez, qui venait de rejoindre, les pointa du menton en s’adressant au capitaine : « Nous f’ront pas d’histoire. »
– Hon hon…
– Z’ont même l’air soulagés, risqua Bonestu.
– Pas autant que moi quand on sera rendus ! commenta son mentor. En tout cas, z’ont l’air crevés ! Et les pompes de çui-là ! Matez-moi ça ! Y’a du laisser-aller chez Adolf !
– Sergent, le premier adjudant qui vous croiserait dans cet état dans une caserne vous en collerait quatre, et il n’aurait pas tort ! Allez, on repart ! Gardez l’œil sur eux, hein…
– Bah, mon capitaine, y’a pas de machinfürher, alors…
– Gardez un œil sur eux !
– A vos ordres !
– Heu… pardon mon capitaine…
– Oui, sergent ? Un problème ?
– Tout à l’heure, l’autre là, quand le caporal leur a parlé d’Adolf…
– Oui ?
– Il a répondu un truc bizarre… Il a dit que c’était un mensonge…
– J’oubliais que vous avez bénéficié de cours particuliers… Un mensonge ? Et donc…
Bonestu vit le regard noir de Martinez.
– Ben… Rien… C’est bizarre, c’est tout. “Adolf kaput !” ils doivent l’entendre souvent, non ? Pourquoi a-t-il réagi comme ça ?
– Ecoutez, sergent, nous allons tâcher de regagner nos lignes sans bobo, de préférence avec nos cinq pékins, et sans que leurs collègues nous chauffent les miches. Alors, vous allez rester en arrière avec Martinez et utiliser votre cervelle dans ce but ! Et si tout se passe bien, vous pourrez peut-être vous pencher sur le problème à vos heures perdues !
Sur ce, le capitaine et Martinez empoignèrent l’un ses jumelles pour scruter la crête, et l’autre le bras de la bleusaille pour la tirer en arrière, avec un air qui en disait long sur la suite à venir. Et une fois rentrés sans anicroche, la suite vint. Un remontage de bretelles comme celui-là, Bonestu n’en n’avait pas eu depuis un bail.



20 mars
Accalmie
Sud de la France
– Rien à signaler ce jour en dehors de quelques échanges d’artillerie. Les tireurs d’élite des deux camps n’ont rien à se mettre sous la dent, ou plutôt sous la gâchette, tant l’activité est réduite.


21 mars
En montagne
Alpes
– On a donné au “patron” du 7e BCA, le chef de bataillon Lorin, la mission de déborder les Alpini fascistes du I/2 Reggimento au-delà de la Tête de la Canonnière, en direction de Freissinière et de l’Argentière-la-Bessée. Cette action, confiée au Commando de Haute Montagne du 7e BCA (créé au sein du bataillon), masque une autre opération, plus ambitieuse, à la jonction entre la Division Monterosa et la 188. Gebirgs Division. Ainsi, le 22e BCA, avec l’appui d’une partie de l’artillerie divisionnaire, a reçu pour mission de prendre le col de Jaffuel, tandis que les 27e et 6e BCA vont mettre la pression au sud sur le 904. Rgt de la division autrichienne. Le 27e doit profiter de sa compagnie de choc de haute montagne, emmenée par le lieutenant Maurice Herzog, pour tenter de déborder le col de Parpaillon, à 2 700 mètres, tandis que le 6e partira de la vallée de Barcelonnette.
En fin de journée, si le 7e BCA progresse bien face aux Italiens et si le 22e Bataillon a pris le col de Jaffuel, la situation est toujours indécise au sud. Les éléments du lieutenant Herzog ont avancé et ont même rejeté une contre-attaque allemande, mais restent sous le feu des mortiers ennemis, tandis que le 6e BCA a été repoussé et devra repartir de l’avant le lendemain.


22 mars
En montagne
Alpes
– Au nord, le 7e BCA progresse d’autant plus vite que les attaques à la roquette des Mustang de la 2e EC, à plus basse altitude qu’en janvier, ont un effet dévastateur sur le moral des Italiens. Le bataillon fait de nombreux prisonniers dans la journée, grâce à des redditions.
Le capitaine Robert Thollon, du GC I/2, témoigne : « Nous avions lu les rapports de la 6e Escadre, sur l’utilisation des roquettes contre les sommets. Ici, il nous semblait que cette arme était mieux adaptée, compte tenu du profil différent de la mission. Je ne suis pas allé sur le terrain vérifier les dégâts, mais je suis sûr que nos roquettes ont flanqué une sacrée pagaille dans les rangs des Ritals. En ce qui me concerne, c’est une arme à ne pas négliger. J’attends de voir si ses performances contre les panzers sont aussi étonnantes que ce que l’on nous promet. »
Un peu plus loin, le 22e BCA pousse son avantage et arrive à envoyer une compagnie sur Vars, coupant ainsi la liaison entre les Alpini et les Gebirgsjägers, au sud. Les Allemands ne tentent qu’une faible contre-attaque, qui échouera à cause d’effectifs insuffisants, du soutien de l’aviation alliée, mais surtout de la section de mortiers et de mitrailleuses montée jusqu’au col de Jaffuel.
Plus au sud, le 904. Rgt de la division autrichienne est englué dans la pince que constituent les attaques des 27e et 6e BCA. Dans ce secteur, les Allemands enregistrent tout de même un succès en reprenant le col de Parpaillon.


23 mars
En montagne
Alpes
– Les chasseurs alpins du 7e BCA entrent dans Freissinières et prennent le col d’Annon, à presque 1 900 mètres. En dépit d’une contre-attaque du I/2 Reggimento, visant plus à se dégager qu’à reprendre le terrain, le bataillon français réussit à faire passer des hommes (dont une section de mitrailleuses) de l’autre côté du ravin des Meyries, pour prendre position au-dessus de l’Argentière-la-Bessée.
Dans le secteur de Vars, les Alpins tiennent toujours et repoussent une molle contre-attaque des Italiens, au nord. Il faut dire que les hommes du II/2 Reggimento sont maintenant sous la pression directe du reste du 22e BCA, qui attaque dans la vallée de Guillestre avec le renfort d’éléments du 85e Btn du Génie et de blindés du I/4 Chasseurs, mais surtout des Mustang de la 2e EC.
Enfin, tout au sud, les combats sont toujours indécis entre les 6e et 27e BCA d’un côté, et les Gebirgsjägers du 904. Rgt de l’autre. Les Français marquent un point, cependant, en reprenant le col de Parpaillon.


24 mars
En montagne
Alpes
– Les Italiens reculent. Alors que le II/2 Reggimento prend position sur le col Garnier et sur les Rochers de Bouchet pour verrouiller la Combe du Queyras, le 1er Btn d’Alpini de ce régiment se replie en direction de Briançon ; il prend position autour de Saint-Martin de Queyrières, contrôlant ainsi les accès à la ville-forteresse.
Ce recul permet au 22e BCA d’entrer dans Guillestre et d’envoyer des éléments en direction de Vars, afin de rallier la compagnie qui s’y trouvait assiégée.
Les Italiens ont prévenu leurs alliés de la 188. GD de ce retrait. La situation du 904. GbJg Rgt devenant intenable, ce dernier se repositionne en bouchon entre Jausiers et Saint-Paul sur Ubaye.


25 mars
En montagne
Alpes
– L’heure est au redéploiement. Tandis que le 7e BCA entre dans l’Argentière-la-Bessée et que le 22e sécurise son secteur autour de Guillestre, le 27e voit enfin la situation se débloquer pour lui. Ses éclaireurs skieurs vont pouvoir progresser dans une montagne vide d’Allemands et déboucher dans la vallée. Après avoir relayé la compagnie du 22e à Vars, ils retrouveront le contact avec les Autrichiens du 904. GbJg Rgt en arrivant vers Saint-Paul sur Ubaye.


26 mars
En montagne
Alpes
– Le calme revient peu à peu sur les cimes, où l’on commence à compter les jours jusqu’au dégel. Beaucoup rêvent à la belle saison et au prochain bond en avant, qui devraient les porter, espèrent-ils, jusqu’à la frontière italienne.


27 mars
Guerre aérienne
Orange
– Les sirènes hurlent pour annoncer l’arrivée d’un bombardier endommagé. Ce dernier est escorté par deux Mustang à queue rouge qui passent en trombe avant de remonter se mettre dans le circuit, l’un d’eux suivant de près le quadrimoteur pour l’assister dans sa descente. Le bombardier est le B-24 Canard Guyennois du GB II/60 du commandant Puget, qui va tenter de se poser sur trois moteurs (dont l’un est sur le point de rendre l’âme), et les Mustang sont pilotés par les lieutenants Curtis et Lester, du 332e FG.
Lorsque tout le monde est posé et que les secours s’affairent autour du quadrimoteur blessé, les mécanos de la base ont la surprise de constater que les pilotes américains sont noirs. Ce n’est pas une raison pour ne pas les inviter au mess où, en plus de faire la connaissance des as du GC II/5, les survivants du bombardier leur offrent à boire.
Dans son rapport, le commandant Puget confirmera deux victoires obtenues par les chasseurs et recommandera l’attribution de la Croix de Guerre à ses deux sauveurs. Il racontera bien des années plus tard cet épisode pour le magazine Icare, à l’occasion d’un numéro spécial consacré à la 60e EB.
« Nous devions aller bombarder Stuttgart en prenant la route des Alpes et nous avions rendez-vous au-dessus du massif de l’Estérel, à l’est de Cannes. Nous nous attendions à devoir faire quelques boucles autour de Fréjus, mais pour une fois nos escorteurs étaient exactement à l’heure, chose qui n’allait pas de soi, même avec nos gars de la 13e Escadre avec qui nous avions l’habitude de travailler. Le reste du vol fut exemplaire, pour des Américains j’entends : chaque fois qu’on levait les yeux vers le ciel, on y trouvait une silhouette à queue rouge, exactement à la place prévue par les manuels, ce qui nous changeait un peu de la discipline moins stricte des autres groupes US. Cela dura ainsi jusqu’en Allemagne.
Nous avons réussi à passer sans encombre le premier barrage de la JG 2 à la sortie des Alpes, et le bombardement s’est déroulé sans pertes, mais plusieurs d’entre nous ont été touchés par la Flak, dont notre Canard : un impact direct a presque arraché la nacelle du trois et un autre nous a salement poivrés de shrapnels, blessant deux hommes. Nous arrivions quand même à suivre à distance la formation lorsque le deux s’est mis à chauffer. Nous ralentissions et je voyais déjà le moment où nous irions nous poser en Suisse. Le commandant des Queues Rouges nous attribua alors deux anges gardiens pour tenter de rallier nos lignes, à encore plus d’une heure de vol.
Si nous étions passés sans problème à l’aller, les vautours de la JG 2 nous attendaient au retour. Quatre Messerschmitt 109 nous sont tombés dessus entre Lyon et Genève. Les Mustang les ont repoussés, en abattant un chacun, et nos mitrailleurs en ont endommagé un autre ; le quatrième n’a pas demandé son reste. Les deux Mustang nous ont accompagnés jusqu’à Orange, où ils se sont posés pour refaire le plein. Nous avons alors découvert, fait exceptionnel dans l’USAAF, que les pilotes étaient Noirs. Cela ne nous a pas gênés (contrairement, si je suis bien informé, à ce qui se passait en pareil cas sur les terrains des groupes de bombardiers américains), surtout ici, dans l’antre du Lafayette, qui comptait depuis longtemps déjà un pilote noir, le fameux Léopold Wade, et même trois le jour de notre passage. Il y avait aussi deux pilotes noirs dans la 13e EC et pas mal de membres de nos propres équipages étaient issus de l’Empire, et des couleurs assorties. En fait, ce sont nos deux gars, Curtis et Lester, qui ont été les plus étonnés en voyant les pilotes noirs du Lafayette et en comptant leurs galons !
Tous deux étaient très réservés, à des kilomètres de l’image exubérante des Noirs américains véhiculée par les clubs de jazz d’avant la guerre. L’un s’est contenté d’un café, l’autre d’une bière (il faut préciser qu’ils devaient encore rallier leur terrain en Italie).
J’ai réussi à rester en contact avec Curtis après la guerre, jusqu’à sa mort en 89. J’ai su que la cinquième victoire de Lester n’avait été reconnue que cette année [2004] ! »



28 mars
En montagne
Alpes
– La 6e BMLE, après recomplètement et quelques jours de repos bien mérités, a aligné les kilomètres pour monter dans les Hautes-Alpes se mettre aux ordres de la 27e DA. Il y a maintenant sur le front, dans ce secteur d’une trentaine de kilomètres, deux BMLE et deux DBLE, ce qui fait dire à certains qu’il y a plus de légionnaires que de chasseurs alpins dans les Alpes, et à d’autres, plus sarcastiques, que l’on parle plus espagnol dans le Dévoluy que dans certaines vallées des Pyrénées.


29 mars
Changement de front
Bouches-du-Rhône
– Les atterrages autour du golfe de Fos, mais aussi les aérodromes proches de l’étang de Berre, voient depuis ce matin se dérouler une activité plutôt inhabituelle. Les navires et les C-47 ne déchargent pas, mais embarquent les hommes et le matériel de la 82e Airborne Division. Cette dernière est en instance de départ pour l’Angleterre, via l’Algérie. Ce départ se fait sans précaution particulière : on espère bien que les éventuels agents allemands profitent au maximum du spectacle. Ainsi, l’attention de l’état-major ennemi ne manquera pas de se tourner vers le nord…

… et à la peine
Front français
– Claire Roman devient la première femme pilote servant dans les forces armées françaises à être déclarée “morte au champ d’honneur”. Si l’état-major de l’Armée de l’Air continue à traîner les pieds, sur le terrain, les femmes sont désormais traitées comme leurs camarades masculins, au moins pour ce qui est des missions de combat.


30 mars
Accalmie
Sud de la France
– Le calme règne sur le front. Les hommes profitent de cette belle journée printanière, bien que certains esprits chagrins soulignent que la pause est trop belle pour durer longtemps.

Sur le terrain
Courrier
Rhône-Alpes
« Ma très chère Constance
Je profite de quelque « liberté » dans mon emploi du temps pour répondre enfin à vos derniers envois, qui ne me sont parvenus que très récemment, hélas !
Et tout d’abord, un grand, un immense merci pour votre colis, arrivé intact malgré quelques péripéties.
Les chaussettes sont une bénédiction, car nous ne cessons de patauger dans la neige et la boue. Heureusement, l’hiver est assez clément, au dire des gens du cru, lesquels ne cessent de nous conter des histoires de froids sibériens, de vents glaciaux et de chutes de neige apocalyptiques ! C’est sans doute pourquoi les équipements hivernaux nous arrivent au compte-goutte. Et comme nous ne sommes quand même pas en été, les caprices du temps ne sont pas loin de nous faire autant de mal que l’ennemi.
Quant aux dattes, divine surprise, je reconnais bien là les marques de votre attention et de votre prévoyance ! Le capitaine Roumilly a reçu tantôt un colis contenant quelques oranges : je n’ose vous décrire l’état de la chose et la déconfiture de ce pauvre Henri-Amédée ! Aussi avons nous partagé fraternellement vos dattes, évoquant Proust et des images de jours heureux, nostalgie que renforça la vue des premières fleurs printanières.
Ne pouvant rien dire du militaire, je peux cependant vous confier quelques mots de mon quotidien. Vous connaissez mieux que moi le Cdt Serviac, aussi ne vous étonnerez-vous point qu’il se déchargeât sur votre serviteur de certaines tâches telles que les rapports avec les civils, décharge dont la raison m’a rapidement sauté aux yeux.
Il faut que vous sachiez que la région a énormément souffert des combats. Les bâtiments que l’ennemi n’avait pas détruits ont souvent été copieusement bombardés par les nôtres. Même dans le plus petit hameau, il ne reste debout que de rares bâtiments délabrés. Bien souvent, dans le meilleur des cas, les habitants en ont fui, chassés par les Allemands ou leur séides, prévenus par les maquis ou bien par quelque obscur instinct animal. L’orage passé, ils s’en reviennent fouiller les décombres pour y rechercher tout ce qui pourrait leur être de quelque utilité, voire pour les aménager, car ils n’ont nul endroit où aller : parents ou amis qui pourraient les accueillir ailleurs sont dans la même indigence, et nous avons ordre de limiter strictement leurs déplacements.
Aussi, lorsque nous sommes « de repos », sachez que cela signifie que nous assumons des tâches des plus imprévues, qui ne sont pas toutes de simple police. En cela, le terme de « repos » ne manque pas de sel !
Il nous faut donc, tout en gardant un œil sur nos adversaires, à la fois contenir les civils et leur interdire l’accès à leurs champs ou à leurs maisons tant que nous ne les avons pas inspectés, car, lors de sa retraite, l’ennemi y a abondamment disséminé des engins de mort. De plus, nous devons régler tous les litiges entre nos hommes et les civils. En effet, la prévôté est débordée et l’administration civile inexistante ou percluse de règlements de compte plus ou moins douteux.
Comme exemple, je vous citerai la visite pas plus tard qu’avant-hier d’un homme venant se plaindre de ce que nos soldats avaient abattu deux arbres, sans penser à mal, pour se chauffer. Or il se trouve que ces deux arbres étaient des noyers. L’homme en pleurait : les arbres avaient été plantés par son père et leur production assurait un petit revenu à la ferme. Devant ce désastre, s’ajoutant à la perte de son troupeau ainsi qu’à l’interdiction (temporaire) d’emblaver ses champs, le bonhomme triturait sa casquette en m’avouant qu’il ne s’imaginait pas que « ça se passerait comme ça ».
Il est loin le temps des bouquets jetés aux soldats embrassés à bouche-que-veux-tu dans les villages libérés ! Ceux-là mêmes qui nous accueillaient avec joie nous font maintenant reproche de ne pas avoir poussé plus avant. Oh, pas ici ! Ici, on n’en est pas encore à penser, tant l’immédiat accapare. Mais à quelques kilomètres, on murmure déjà que la guerre serait plus acceptable si elle se déroulait ailleurs, chez les autres, là-bas, loin, mais pas chez soi, pas si près !
Il n’en est pas de même, non plus, dans les environs de Marseille, par exemple, où l’on trouve effectivement que les combats sont suffisamment éloignés pour que l’on puisse se livrer à des activités plus lucratives. Non pas, hélas, que la misère y soit moindre ! Mais on espère toujours y échapper.
Ici, dans ces petits bourgs et ces fermes misérables, coincés dans les collines, il n’y a d’autre issue pour les civils que de subir. Leur seul espoir est que les « Autres » ne reviennent pas, tant il court d’effroyables récits, ô combien véridiques ! Aussi puis-je comprendre leur hâte à nous voir enfin repartir vers le nord, pour éloigner ce spectre-là !
Et qui sont ces civils ? Essentiellement des vieux, qui n’ont pas voulu, ou pu, abandonner leurs bêtes ni la maison ancestrale, des femmes et des enfants, celles-là par ce qu’elles n’ont pu se résoudre à partir pour l’inconnu avec ceux-ci, et parfois, quelque homme d’âge mûr. Les plus jeunes sont encore au maquis, assez rarement maintenant, ou bien dans un centre de recrutement, tout aussi rarement. Mais pour la plupart, ils sont tout simplement « partis », et personne ne sait ou ne veut savoir ce que ce terme recouvre.
Ce jeudi, le caporal El Mardi, qui est plus ou moins mon ordonnance, un gaillard qui en a vu d’autres, était si retourné d’une scène qu’il venait de voir qu’il me demanda de venir derechef y assister. Je le suivis, m’attendant à tomber sur une abomination, et ne vis qu’une scène des plus banales : entre la carcasse d’un véhicule et un muret écorné jouait un groupe d’enfants, qui pouvaient avoir de 7 à 10 ou 11 ans. Ils jouaient. Qu’auraient-ils pu faire d’autre ? Et à quoi jouaient-ils ? Eh bien, divisés en deux bandes rivales, ils jouaient à la guerre. Tout simplement. Il se produisit une pause dans le jeu, et je crus comprendre que la répartition des rôles entre « Allemands » et « Français » donnait matière à discussion.
Que croyez-vous que je fis ? Rien. Sinon que j’eus beaucoup de mal à faire entendre à mon caporal que ces enfants ne faisaient rien qui sortît de ce que l’on pouvait attendre d’eux.
A vous, chère Constance, je puis avouer que je comprenais ce que cette occupation puérile pouvait avoir de choquant : la guerre nous a marqués, mais elle a certainement encore plus atteint les enfants. Confrontés à des horreurs sans nom, à la mort, à l’injustice, parfois livrés à eux-mêmes, quels adultes deviendront-ils ? Quand nous reconstruirons, les ruines que nous aurons à relever seront aussi celles des âmes.
Mais laissons là ces pensées moroses ! Je joins à ces mots ces trois primevères cueillies non loin de mon antre, sachant bien que vous disposez de floraisons autrement plus prestigieuses. Sans doute vos roses sont-elles sur le point d’éclore et éclipseront alors ce modeste envoi. Voyez cependant en elles un message d’espoir : comme le printemps nous débarrasse des miasmes de l’hiver, il nous débarrassera aussi de nos ennemis. Cela ne peut être autrement.
Alors, je vous reviendrai.
Bien à vous,
Henri »



31 mars
Guerre aérienne
Sud de la France
– Si le calme règne toujours au sol, il n’en est pas de même dans les airs où le capitaine Valentin Georges du GC I/6 s’offre un doublé contre deux Bf 109 du JG 2, ce qui le propulse au rang d’as. Il ne sera cependant crédité à son retour que d’une victoire sûre et une probable. Il devra attendre quelques semaines pour que l’on retrouve les débris de sa deuxième victime dans une combe, le pilote toujours sanglé dans l’habitacle.
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MessagePosté le: Ven Nov 26, 2021 10:53    Sujet du message: Répondre en citant

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MessagePosté le: Ven Nov 26, 2021 11:46    Sujet du message: Répondre en citant

Casus Frankie a écrit:
Sur le terrain
Châteaubon (Drôme)

On est sûr du nom de la localité? En tant que Drômois (d'adoption, certes) ça ne me parle pas.

Casus Frankie a écrit:
Entre les branches dépouillées, tout le vallon sous leurs yeux était un no man’s land aux hameaux désertés, si pas incendiés, sous les feux à la fois des Allemands, qui occupaient les rebords de la falaise, et des Français, qui en bloquaient les débouchés vers le Rhône.

Dans ce coin, ils croiseront peut-être un ancien berger taciturne reconverti dans la sylviculture, du nom d'Elzéard Bouffier...

Casus Frankie a écrit:
Les chaussettes sont une bénédiction, car nous ne cessons de patauger dans la neige et la boue.

Les chaussettes neuves, le Saint-Graal du fantassin.


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houps



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MessagePosté le: Ven Nov 26, 2021 14:07    Sujet du message: Répondre en citant

Mes excuses, Hendryk, il s'agit effectivement de Châteaudouble et non de Châteaubon. Si Casus peut corriger ?
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Casus Frankie
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MessagePosté le: Ven Nov 26, 2021 16:32    Sujet du message: Répondre en citant

Bien sûr !
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Casus Frankie

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demolitiondan



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MessagePosté le: Ven Nov 26, 2021 21:43    Sujet du message: Répondre en citant

Oserai-je ?

Citation:
En défense, la 355. ID achève de prendre position de l’autre côté des gorges du Tarn – le 867. GR réussit même l’exploit de se désengager pour se repositionner 20 km plus à l’ouest, en dépit d’une aviation alliée omniprésente. La 334. ID, de son côté, se repositionne au sud et à l’est de Mende, sans perdre le contact avec sa voisine, la 165. ID.


Sans aller jusqu'à prendre place sur les terres d'Houps, je me dois de retrancher d'un temps à l'autre les répétitions.

Citation:
Mais l’envoyé de Berlin a un autre message, plus inquiétant sans doute pour von Rundstedt. Une offensive majeure se prépare sur le Front Est – elle débarrassera la Heer du souci soviétique pour six mois au moins. .


Wink Wink Wink Wink Wink Wink

Citation:
Alpes – Alors que les éclaireurs-skieurs du 4e RTM obtiennent une percée sur la Tête de Travers avec l’aide de l’aviation, ce sont les mortiers de 160 qui permettent de forcer le dispositif allemand aux gorges de Daluis. Les Gebirgsjägers n’ont d’autre solution que de reculer en direction du Mont Saint-Honorat et de Guillaumes. Dans les gorges, si un coup heureux des artilleurs français a permis la prise du premier tunnel intact, les Allemands se sont retirés en faisant sauter les deux autres, bloquant ainsi la progression des tirailleurs.


Notons que dans les gorges, il y a aussi un pont suspendu des plus acrobatiques à faire sauter (est-il pris intact ?) ainsi qu'un terrain minéral très favorables aux éclats ... et à la terre rouge !

Hé crotte ! Accart est pris ? Bon, j'en prend note...
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patzekiller



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MessagePosté le: Sam Nov 27, 2021 06:59    Sujet du message: Répondre en citant

si tu parles des pilotes/as français que j'ai utilisé dans mes textes, j'ai un fichier à jour avec leurs victoires, fais moi signe, je te l'envoie Wink
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demolitiondan



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MessagePosté le: Sam Nov 27, 2021 10:15    Sujet du message: Répondre en citant

Je veux bien - comme ça on verra qui reste disponible pour l'Est. Very Happy
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Etienne



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MessagePosté le: Sam Nov 27, 2021 10:32    Sujet du message: Répondre en citant

Oui, sauf que j'en ai utilisé aussi, sans faire de fichier!

Notamment des gars du NN...
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patzekiller



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MessagePosté le: Sam Nov 27, 2021 10:41    Sujet du message: Répondre en citant

j'ai archivé aussi un truc sur les tour et le neuneu, je vous envoie ça Wink
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demolitiondan



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MessagePosté le: Sam Nov 27, 2021 10:43    Sujet du message: Répondre en citant

Il y a sans doute lieu de centraliser tout ça. Et on pourrait en profiter pour acter quelques carrières FTL de gars pas chanceux OTL. Qu en dites vous ?
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Hendryk



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MessagePosté le: Sam Nov 27, 2021 11:07    Sujet du message: Répondre en citant

demolitiondan a écrit:
Et on pourrait en profiter pour acter quelques carrières FTL de gars pas chanceux OTL.

En effet, notamment parmi ceux qui sont restés dans l'armée de l'air de Vichy OTL. Y en a-t-il ici qui ont lu L'Armée de l'air des années noires: Vichy 1940-1944 par Claude d’Abzac-Epezy? Personnellement c'est un sujet que je n'ai jamais eu l'occasion de creuser.
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