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1940 - La France continue la guerre
 
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Paul-Otto Schmidt

 
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Anaxagore



Inscrit le: 02 Aoû 2010
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MessagePosté le: Sam Juin 27, 2015 11:12    Sujet du message: Paul-Otto Schmidt Répondre en citant

Paul-Otto Schmidt fut à partir de 1923 traducteur officiel de l'Allemagne, à partir d'Octobre 1939 il dirige le service de traduction qui traduit toutes les lettres adressées à Ribbentrop et Hitler.

Cet homme sympathique, à l'humour léger, ce fin observateur, cet excellent psychologue, parfaitement trilingue (Allemand, Français, Anglais) est surtout connu pour son livre "Sur la scène internationale avec Hitler" Il faut dire qu'il était le traducteur préféré d'Hitler. Il était sa "voix" pour l'armistice de 1940, pour son entrevue avec Pétain et avant guerre lors de tous ses entretiens avec les diplomates français, anglais et américains. Il a aussi servi de traducteurs à de nombreuses autres personnalités du régime (comme Goering).

Son livre est étonnant parce qu'en fait, il ne mentionne la guerre que de manière anecdotique. Ce n'est pas son travail, il n'y connais rien (il était simple soldat pendant la guerre des tranchées) et c'est un pacifiste convaincu. Schmidt nous fait découvrir les individus dirigeant le troisième Reich au quotidien, mais aussi la manière dont ils voyaient la diplomatie. Et Ribbentrop en prend plein pour son grade... arrogant, méprisant, accumulant les bévues, et le manque de tact dans des réunions et des dîners officiels. En plus il était insultant et utilisait dans les discussions officiels un vocabulaire de la rue. L’ambassadeur anglais Henderson - que Schmidt décrit comme un parfait gentleman- finira presque par en venir aux mains avec Ribbentrop... il est vrai que l'on est le premier septembre 1939 et que la mobilisation générale en Angleterre commencera le lendemain et que 3 septembre ( à 11 heures) l'empire britannique sera en guerre.

Toujours pour parler de Ribbentrop, Schmidt note que les expressions, les paroles et même les mouvements de bras du ministre sont exactement semblables à ceux de Hitler. Ce qui fait que Schmidt le surnomme "La voix de son maître" comme la publicité pour Marconi qui montre un chien écoutant la voix enregistrée de son propriétaire sortant d'un phonographe.

Schmidt décris de manière plus générale la vie à bord du train spécial "Heinrich" qui héberge - entre autre- les services de Ribbentrop dans ses déplacements au travers l'Europe. Cela fourmille de détail... le train composé de wagons de brics et de brocs certains ultra-modernes d'autres "où avait voyagé Charlemagne". La locomotive aux accumulateurs défectueux ... au bout d'une demi-heure d'arrêt il fallait s'éclairer à la bougie. mais surtout la mésentente entre Henrich Himmler (qui donnait son prénom au train), Ribbentrop et le chef du troisième service hébergé par le train. L'atmosphère au sein même de l'équipe de Ribbentrop était délétère. En un paragraphe, Schmidt accumule entre guillemets les termes utilisés par le ministre des affaires étrangères pour parler aux diplomates professionnels de son équipe : "méprisables lâches" ; "paresseux" etc... voilà comment Ribbentrop parlait des membres de la diplomatie de son pays.

La construction même de "Sur la scène internationale avec Hitler" est de raconter "Comment on en est arrivé à la deuxième guerre mondiale". C'est très intéressant ! La plupart des faits mentionnés par Schmidt sont connus de tout le monde : première guerre mondiale, le Diktat de Versailles, crise de 29, retrait du Japon de la SDN, arrivé au pouvoir de Hitler, réoccupation de la Rhénanie etc... jusqu'à l'invasion de la Pologne.

Cependant, l'éclairage est unique car Schmidt raconte tout ça du point de vue des diplomates qui essayent d'éviter, de discuter, de corriger ces événements.... Il raconte aussi les discussions entre Allemands.

Schmidt qui n'est pas un "personnage" du Reich, mais qui côtoie Goering, Hitler, Himmler et bien d'autres raconte aussi la transformation de l'Allemagne à partir de 1933. A cet égard, une histoire est frappante. Lors de la première visite officielle de Mussolini, Schmidt se retrouve être le seul "civil" des deux délégations. Son arrivé en costume à queue de pie et chapeau haute-forme déchaîne l'hilarité des Berlinois.
Aussitôt Mussolini partis, Hitler convoque Schmidt (je crois que c'est la deuxième conversation personnelle entre le traducteur et le dictateur... ils se côtoient, mais si Schmidt parle pour Hitler, il ne se parlent presque jamais). Là Hitler part dans un monologue sur l'Allemagne, sur le Reich, sur le national-socialisme, sur l'impression qu'il doit rendre... et termine en décrétant que tout le corps diplomatique sera à présent en uniforme ! Schmidt sort de la pièce suivis par Himmler et Goering qui lui tombent dessus dès l'arrivée dans l'antichambre, se disputent et remettent chacun un uniforme au traducteur (un uniforme de la SS et un autre de l'aviation bien sûr).
Finalement le "costumier officiel" du IIIème Reich intervient... c'est à dire un SS qui dessine tous les uniformes et qui était avant le nazisme costumier d'opéra. Schmidt reçoit comme chaque membre de la diplomatie... un uniforme de la marine ! J'imagine bien les disputes dans les coulisses : "Le corps diplomatique portera l'uniforme de la SS" "Non celui de l'aviation" ... "non celui de mon groupe à moi"... "non le mien". Et donc finalement la marine avait gagné.

Voilà donc le corps diplomatique déguisé en "amiraux"... qui apprennent à la dure à dîner avec une épée de cérémonie ou à enfiler des bottes de cavalerie... ce qui est dur pour un civil d'après Schmidt.

Mussolini invite Hitler à venir le voir en Italie. Énorme réception, musique et uniformes partout, journée épuisante pour le corps diplomatique qui doit sans cesse changer de tenue entre la tenue de ville et celle de gala. ironiquement Schmidt raconte qu'après ce voyage il était devenu capable de changer de tenue aussi vite qu'un transformiste de cabaret. Finalement, clou de la journée, ils arrivent à la Scala de Milan où ils assistent à une représentation d'Aida de verdi. Bizarrement Schmidt (pourtant amateur de musique) s'ennuie... il trouve la musique fade, les tenues incolores... il a soudain une révélation. Il vient de passer la journée dans la peau d'un acteur d'opéra.

Plus loin Schmidt enfonce le clou. Pour lui le service diplomatique allemand a été transformé à l'époque du troisième Reich en figurant d'une opérette. Je crois que cette anecdote est celle qui résume le mieux le nazisme dans tout ce que j'ai lu et entendu depuis l'enfance. L'Allemagne nazie était un régime aberrant, ridicule où des incapables donnaient des ordres stupides à des gens bien plus compétents, où le dictateur était prisonniers de lubies et qui agissait au coup par coup, sans plan à longue échéance. Il a fallu un concours de circonstances incroyables pour qu'un régime aussi pathétique réussisse à mettre le monde à feu et à sang.
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Dernière édition par Anaxagore le Sam Juin 27, 2015 11:41; édité 1 fois
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Colonel Gaunt



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MessagePosté le: Sam Juin 27, 2015 11:40    Sujet du message: Répondre en citant

C'est ça qui est frappant, à chaque fois que l'on a un témoignage de première main sur les coulisses ou bien l'envers du décors, on a toujours un témoignage flagrant qu'était l'amateurisme évident de l'appareil nazi.

C'est tellement navrant qu'avec cela ils aient pu aller aussi loin et faire aussi mal, et cela renforce d'autant plus mon dégout pour une partie de l’intelligentsia politique européenne, de sa lâcheté etc...
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Anaxagore



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MessagePosté le: Sam Juin 27, 2015 11:48    Sujet du message: Répondre en citant

Schmidt explique que les Européens et l'Amérique auraient pu arrêter le Reich très facilement. par exemple, lorsque Mussolini attaque l'Abyssinie, laval alors président du conseil recule devant une proposition faite par ses conseillers, l'embargo des produits pétroliers ! L'Italie aurait cédé au bout d’une semaine !
Lors de l'affaire des Sudète, l'Allemlagne n'était pas prête à la guerre. Hitler aurait reculé face à une Europe résolue. Lors de l'unification avec l'Autriche si Mussolini avait dit "non", Hitler aurait reculé. Cette affaire explique d'ailleurs le soutient sans faille de Hitler à Mussolini pendant la guerre.
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Paul



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MessagePosté le: Sam Juin 27, 2015 13:44    Sujet du message: Répondre en citant

Mais Hitler, même ayant reculé face à une Europe déterminée, n'aurait-il pas été toutefois déterminé à appliquer ses plans tels qu'il a écrit dans Mein Kampf, soit ultérieurement, ou bien d'une autre manière, visant par exemple à soudoyer Mussolini pour qu'il accepte l'"Anscluss" en échange d'une aide matérielle en Abyssinie?

En parlant de l'Ethiopie, j'ai une autre question Hors sujet cette fois? Si l'Italie avait d'ores et déjà conquis l'Afrique Orientale fin XIXème siècle, vers qui le Duce se serait penché avant la guerre?
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Capitaine caverne



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MessagePosté le: Sam Juin 27, 2015 14:04    Sujet du message: Répondre en citant

Paul a écrit:

En parlant de l'Ethiopie, j'ai une autre question Hors sujet cette fois? Si l'Italie avait d'ores et déjà conquis l'Afrique Orientale fin XIXème siècle, vers qui le Duce se serait penché avant la guerre?


Vers celui qui lui aurait offert le maximum de bénéfices avec le minimum de risques.
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Anaxagore



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MessagePosté le: Sam Juin 27, 2015 14:29    Sujet du message: Répondre en citant

D'accord avec Caverne.
Dans le livre de Schmidt, il est visible que jusqu'en 40, Mussolini essaie d'éviter le conflit et de "gagner des points". Bon psychologue, le traducteur voit en Mussolini un homme réfléchi qui parle peu mais clairement (Mussolini le négociateur est très différent du tribun que l'on voit dans les discours... contrairement à Hitler qui "négocie" souvent en hurlant des injures !)
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Collectionneur



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MessagePosté le: Sam Juin 27, 2015 19:35    Sujet du message: Répondre en citant

Sujet intéressant, faudra que je trouve le temps (un jour, entre le boulot et un déménagement qui s'annonce long) de trouvé ces mémoires.

Il semble assez récent :

http://www.amazon.fr/Sur-sc%C3%A8ne-internationale-avec-Hitler/dp/2262047251

Mais j'ai lu sur ce forum et ailleurs que les SR français (et d'autres) avaient déjà des info de premières mains de fonctionnaires allemands dans les années 30.

J'ai un trou de mémoire sur le titre mais j'ai au fond d'une armoire un livre un fonctionnaire du ministère des affaires étrangères de Berlin qui travaillait pour les USA par exemple.
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Imberator



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MessagePosté le: Dim Juin 28, 2015 02:15    Sujet du message: Répondre en citant

Anaxagore a écrit:
Son livre est étonnant parce qu'en fait, il ne mentionne la guerre que de manière anecdotique. Ce n'est pas son travail, il n'y connais rien (il était simple soldat pendant la guerre des tranchées) et c'est un pacifiste convaincu.


Sans en être devenu un spécialiste de la chose militaire, s'il a seulement combattu dans les tranchées, il en connaissait déjà bien assez sur la guerre... Et on comprend mieux son pacifisme !


Anaxagore a écrit:
L'Allemagne nazie était un régime aberrant, ridicule où des incapables donnaient des ordres stupides à des gens bien plus compétents, où le dictateur était prisonniers de lubies et qui agissait au coup par coup, sans plan à longue échéance. Il a fallu un concours de circonstances incroyables pour qu'un régime aussi pathétique réussisse à mettre le monde à feu et à sang.


Si l'incompétence sinon la folie des dirigeants nazies ne sont plus à démontrer, l'aveuglement des dirigeants occidentaux leur aura fait écho avec une constance indéfectible.

Et si la guerre a pu devenir une réalité, c'est surtout dû au "courage politique", monstrueusement meurtrier mais cependant téméraire de Hitler et consort auquel, hélas, n'auront répondu que la procrastination et l'irrésolution pour ne pas dire la lâcheté politique de la majeure partie des décideurs occidentaux.
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Anaxagore



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MessagePosté le: Dim Juin 28, 2015 08:55    Sujet du message: Répondre en citant

Cela va plus loin que la "lâcheté". Schmidt met en avant une explication que j'ai souvent entendue, mais que je n’avais jamais prise très au sérieux. En 1939, quelques semaines avant l'invasion de la Pologne un diplomate anglais a dit : " Nous sommes arrivé à la guerre parce que nous avons pris les Allemands pour des Français, et les Français pour des Anglais".

Le bloc Franco Anglais - vainqueur de la première guerre mondial- ne faisait plus front contre l'Allemagne dès 1919. Au traité de Versailles, la France avait demandé que l'acte d’agression porte tout entier sur les épaules de l'Allemagne, alors que l'Angleterre refusait de reconnaître l'Allemagne comme l’agresseur.

Au cours des années 20 et 30, les Anglais ont soutenu le rééchelonnement des réparations de l'Allemagne, son réarmement, et ont même accepté unilatéralement que la Kriegmarine puisse monter son tonnage à 1/3 de celui de la Royal Navy.

A chaque fois, le Royaume Uni est intervenu unilatéralement, sans concertation avec son "allié" français.

Lors de la remilitarisation de la Rhénanie, la France voulait intervenir militairement, mais les généraux français (Gamelin en tête) se sont insurgés et ont dit que seule une mobilisation générale permettrait d'intervenir... les politiciens français ont reculé devant cette idée. Ils ont proposé aux Anglais de participer avec eux et... les Anglais ont non seulement refusé, mais ils ont interdit aux Français d'intervenir.

Jusqu'à l'unification avec l'Autriche, les Anglais ont soutenu Hitler. Ils appliquaient en fait le très vieux programme de domination... affaiblir la puissance continentale dominante (la France) en soutenant ses ennemis (ici l'Allemagne), d'où la petite histoire du diplomate britannique sur la confusion entre Français et Allemands par laquelle j'ai commencé.

Il ne faut pas non plus oublier qu'au début années 30, la peur principale des puissances européennes est "la contagion bolchevique". Or, Hitler est farouchement anti-communiste.

L'Alliance de Benes, le président tchécoslovaque avec l'URSS explique aussi sans doute pour beaucoup que ce pays ait été abandonné à Hitler.
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