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1940 - La France continue la guerre
 
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loic
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MessagePosté le: Jeu Aoû 09, 2007 18:02    Sujet du message: Répondre en citant

Bon, OK, donc pas de changement majeur. C'est vrai que l'issue "normale" de la campagne de France est la FTL, alors que l'OTL est une voie extrême. Mais je pense qu'il est toujours bon de s'interroger sur les conséquences de part et d'autre.
Pour le franchissement du Rhin, sachant que les Français vont avancer leur retrait, il devrait au contraire être plus facile (au fait Laurent, as-tu eu mon mail sur les BCC du GA2) ?
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Casus Frankie
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MessagePosté le: Jeu Aoû 09, 2007 18:56    Sujet du message: Répondre en citant

BON ! Alors on efface tout on recommence ? Enfin, pas tout à fait quand même. Voici donc LE NOUVEAU POD, ou du moins ma version personnalisée. Je vais ensuite aller jusqu'à fin juin, avant d'intégrer toutes les géniales élucubrations qui jaillissent d'un peu partout...
Vous noterez que j'ai d'emblée intégré d'autres éléments de la Chrono.



Chronologie alternative, dite Fantasque Time Line (FTL)

Juin 1940 (1/3)

… … …

6 juin
Paris
Le Général de Brigade (à titre temporaire) Charles de Gaulle est nommé sous-secrétaire d’État à la Guerre (Paul Reynaud, Président du Conseil, faisant office de Ministre). A 11h00, il rencontre Raynaud au ministère de la Guerre, rue Saint-Dominique. L’évolution des événements sur le front est plus qu’inquiétante et les deux hommes discutent d’abord de la possibilité de constituer un “réduit breton” au cas où la situation continuerait de se dégrader. Le Président du Conseil y croit à ce moment beaucoup, mais si Weygand a confié l’organisation de ce “réduit” au Général Altmayer junior, c’est sans y croire.
Les deux hommes parlent aussi de politique intérieure. « Si nos pires craintes pour la bataille en cours devaient se réaliser, demande De Gaulle, ne pensez-vous pas, Monsieur le Président du Conseil, que la présence du Maréchal Pétain au gouvernement pourrait rendre difficile la prise des mesures qui s’imposeraient pour le salut national ? »
– Il est vrai que le Maréchal a toujours critiqué notre entrée en guerre et qu’une défaite militaire pourrait lui offrir la possibilité de faire prévaloir ses vues sur la politique française. Mais je pense pourtant qu’il vaut mieux l’avoir dedans que dehors, répond Reynaud.

Composition du Gouvernement Paul Raynaud le 6 juin 1940
– Président du conseil : Paul Reynaud (AD) (également Ministre de la Défense Nationale et de la Guerre, ainsi que des Affaires Étrangères)
– Vice-présidents du conseil :
o Camille Chautemps (PRS)
o Philippe Pétain
– Ministres :
o Ministre de l’Intérieur : Georges Mandel
o Ministre des Armements : Raoul Dautry
o Ministre des Finances : Yves Bouthillier
o Ministre du Travail : Charles Pomaret (USR)
o Ministre de la Justice : Albert Sérol (SFIO)
o Ministre de la Marine militaire : César Campinchi (PRS)
o Ministre de la Marine marchande : Alphonse Rio (USR)
o Ministre de l’Air : Laurent-Eynac (PRS)
o Ministre de l’Éducation nationale : Yvon Delbos (PRS)
o Ministre des Anciens combattants et des pensions : Albert Rivière (SFIO)
o Ministre de l’Agriculture : Paul Thellier (AD)
o Ministre du Ravitaillement : Henri Queuille (PRS)
o Ministre des Colonies : Louis Rollin
o Ministre des Travaux publics : Ludovic-Oscar Frossard (USR)
o Ministre de la Santé publique et de la Famille Française : Georges Pernot (FR).
o Ministre des Postes, Télégraphe, Téléphone et Transmissions : Alfred Jules-Julien (PRS)
o Ministre de l’Information : Jean Prouvost
o Ministre du Commerce et de l’Industrie : Albert Chichery (PRS)
o Ministre du Blocus : Georges Monnet (SFIO)
o Ministres d’État: Louis Marin (FR) et Jean Ybarnegaray (PSF)
– Sous-secrétaires d’État
o Sous-secrétaire d’État à la vice présidence du Conseil : Robert Schuman (PDP)
o Sous-secrétaire d’État à la Guerre et à la Défense nationale : Charles de Gaulle
o Sous-secrétaire d’État aux Travaux Publics : André Février (SFIO)
o Sous-secrétaire d’État aux Affaires Etrangères : Paul Baudoin
o Sous-secrétaire d’État aux Fabrications de l'Air : Jules Meny

Dans l’après-midi, le gouvernement est réuni pour la traditionnelle photo sur les marches de l’Hôtel Matignon. Malgré l’inquiétude quant à la situation militaire, quelques bouteilles de champagne sont débouchées et Paul Raynaud reçoit les vœux de succès d’Hélène de Portes, sa maîtresse très aimée depuis plusieurs mois. Il a décidé de divorcer pour elle aussitôt que la loi l’y autorisera et la belle Hélène exerce sur lui une influence qui déborde leurs relations personnelles. Quand la jeune femme quitte Matignon, Reynaud lui propose sa voiture, mais le Lieutenant-Colonel Paul de Villelume, qui joue dans son cabinet un rôle important et assure la liaison avec l’Etat-Major, propose de la raccompagner personnellement. « C’est très aimable à vous, Villelume, observe Reynaud, mais n’oubliez pas que nous avons du travail. »
– Je conduirai moi-même, répond Villelume, je ne serai pas long.
Selon les souvenirs d’un autre collaborateur de Reynaud, Villelume aurait en aparté indiqué à Hélène de Portes qu’il souhaitait évoquer avec elle « la personnalité de quelques membres du nouveau gouvernement et notamment d’un certain colonel un peu trop sûr de lui-même… » Comme Charles de Gaulle devait le déclarer par la suite à plusieurs de ses collaborateurs, et en particulier à Geoffroy Chaudron de Courcel, Paul de Villelume était un homme certes brillant, mais irrémédiablement prévenu contre lui. Il n’avait cessé de mener auprès de Paul Reynaud une sourde guerre intestine contre ses idées, ainsi que contre la poursuite des hostilités.
La voiture de Villelume file dans la rue de Varennes, prend à vive allure le boulevard des Invalides. Alors qu’au bout du boulevard, elle tourne à gauche vers l’esplanade, roulant toujours aussi vite, son conducteur en perd le contrôle, pour une raison inconnue. Bien après la guerre, des témoignages ont prétendu qu’une mystérieuse voiture, surgie de la rue de Grenelle, l’aurait percutée à l’arrière… Quoi qu’il en soit, l’automobile heurte brutalement un réverbère et verse sur le côté. Les secours arrivent très vite et les deux occupants, ensanglantés, sont conduits à l’Hôtel-Dieu. Là, on ne peut que constater qu’Hélène de Portes a été tuée sur le coup.

Mort d’une Comtesse (article paru deux semaines plus tard dans Time)
« Les historiens oublient toujours ce que les romanciers n’oublient jamais : les problèmes des hommes d’état ne sont pas exclusivement ceux de l’Etat. C’est ainsi que nous avons appris le 7 juin qu’avait eu lieu en France une tragédie privée qui, tout en n’étant rien à côté de la tragédie vécue par le pays, n’en est pas moins à signaler.
Il y a quelques année, la fille d’un riche négociant du port de Marseille prit dans ses filets un véritable Comte, l’épousa et s’installa à Paris, où elle se mit à tenir salon pour les journalistes et les hommes politiques. Hélène de Portes était petite, brune, nerveuse, jalouse et pas très brillante intellectuellement, mais elle avait apparemment quelque chose capable de faire faire à un Français n’importe quelle folie. Devenue veuve il y a deux ans, elle jeta son dévolu sur un brillant économiste nommé Paul Reynaud. Bientôt Reynaud, qui avait jusque là été un bon père de famille, quitta sa femme. Peu après, la loi sur le divorce fut modifiée et l’économiste put espérer être libre au bout d’un an au lieu de trois.
Le 21 mars dernier, Paul Reynaud devint Président du Conseil. Il s’adapta bien au pouvoir, mais ce dernier monta à la tête de la Comtesse de Portes. Elle commença à se voir jouer le rôle d’une éminence grise et tandis que la situation de la France devenait catastrophique, sa voix importune devenait plus perçante. Elle devint hystérique quand elle sut que l’on murmurait que la fleur de lys française était supplantée par une fleur de lit fanée… Début juin, elle se mêlait sans cesse des délibérations gouvernementales, qu’elle prétendait chaque soir ajuster à ses goûts personnels – auxquels la poursuite de la guerre ne convenait pas du tout. C’est alors qu’au coin d’une rue de Paris, les rêves de grandeur de la Comtesse de Portes s’écrasèrent contre un réverbère… »

Reynaud, prévenu, accourt à l’Hôtel-Dieu, accompagné de son directeur de cabinet, Dominique Leca. Devant le corps de sa maîtresse, il s’écroule en larmes : « Je ne pourrai pas continuer, Dominique. Je vais démissionner… »
– Ne faites pas ça, Monsieur le Président du Conseil. La France a besoin de vous ! plaide Leca, qui poursuit (non sans quelque hypocrisie) en désignant la morte : Pensez à elle ! Elle vous aimait, elle se passionnait pour les affaires de l’Etat, elle n’aurait pas souhaité que vous abandonniez votre tâche !
L’argument semble toucher Reynaud, qui se tait et médite, silencieux, quelques minutes. C’est alors que surgit Paul de Villelume. Il n’est que légèrement blessé et arbore sur le crâne un volumineux pansement qui lui donne l’air passablement ridicule. « Monsieur le Président, balbutie-t-il, je suis tellement navré, je… »
Reynaud l’interrompt et s’exclame, avec des sanglots dans la voix : « Comment osez-vous… Vous conduisiez, c’est de votre faute… Disparaissez, je ne veux plus jamais vous voir, jamais ! »

Villelume (Paul de) – (…) Après son renvoi par Paul Reynaud à la suite du décès de la Comtesse de Portes, il resta en France et offrit en octobre 1940 ses services à Pierre Laval. Celui-ci finit par le nommer Ambassadeur de France en Allemagne. En 1944, il tenta de passer en Espagne, mais n’y parvint pas et fut emprisonné. Condamné à mort pour intelligence avec l’ennemi, il refusa de demander la grâce présidentielle. Il est vrai qu’entre temps, Reynaud était devenu Président de la République et portait toujours, dit-on, le deuil d’Hélène de Portes. (Extrait du Grand Larousse de la Seconde Guerre Mondiale, Paris 1965)

Dans la soirée, après discussion avec Dominique Leca, Reynaud décide d’attribuer les fonctions de Villelume à Roland de Margerie, qui est déjà le responsable de son cabinet diplomatique. « Les jours qui suivront verront Reynaud, affecté mais “libéré” (selon le mot de De Gaulle), laisser Roland de Margerie acquérir une influence croissante, au point de devenir un Président du Conseil bis, au grand dam de la fraction défaitiste du gouvernement. » (Jean Lacouture, De Gaulle, t. II – Le Combattant, Paris, 1984).
Nous avons récemment appris, grâce aux Mémoires de l’Amiral Philippe de Gaulle, combien le Général avait été frappé de la disparition simultanée de la scène de Paul de Villelume et de celle qu’il avait surnommée (en privé) la « mégérie » de Reynaud, compte tenu de sa farouche opposition à la ligne jusqu’au-boutiste. « Cet événement, raconta-t-il à son fils, m’apparut véritablement comme un signe de la Providence. Le destin de la France n’était décidément pas de se laisser aller aux sirènes du désespoir. »


7 juin
Paris
Alors que la presse parisienne, du Populaire à gauche au journal le Jour à droite, en passant par l’Aube et le Matin, salue avec chaleur la nomination de De Gaulle au gouvernement, celui-ci constitue son propre cabinet. Il se concerte avec De Margerie, dont il constate immédiatement la solidité des convictions jusqu’au-boutiste. Le Général rencontre ensuite Reynaud, qui le charge de porter un message à Churchill pour demander l’engagement à grande échelle de la RAF dans la Bataille de France. Avant de se rendre à Londres, le nouveau sous-secrétaire d’État à la Guerre doit consulter Pétain et Weygand.

8 juin
Montry (GQG de l’Armée française)
De Gaulle, qui n’a pu rencontrer Pétain aux Invalides comme prévu, se rend à Montry pour rencontrer le Chef d’État-Major, le Général Weygand. La discussion entre les deux hommes est houleuse. Weygand fait un sombre tableau de la situation : « Les hommes sont littéralement épuisés, ils se battent de jour, marchent de nuit et tombent endormis sur leurs nouvelles positions. Nous n’avons plus aucune réserve. La seule chose qui pourrait nous sauver, c’est que l’adversaire soit encore plus fatigué et soit amené à s’arrêter faute de souffle. » Mais il n’y croit visiblement pas et apparaît aux yeux De Gaulle comme « désespéré ». Il qualifie ainsi « d’enfantillage » tout projet de repli sur l’Afrique du Nord. Ses proches collaborateurs ne tiennent pas d’autres propos.

Paris
Sitôt de retour, De Gaulle se rend chez Paul Reynaud. Celui-ci, qui a assisté le matin même à l’enterrement d’Hélène de Portes, est très déprimé. De Gaulle l’adjure de remplacer Weygand, proposant pour ce poste le Général Huntziger. Reynaud hésite, car Huntziger a été l’un des vaincus de l’attaque allemande du 13 mai. Cependant, sous l’influence de De Margerie, qui assiste à l’entretien, il accepte l’idée que Weygand pourrait devoir être bientôt remplacé.
– Au moins, demande De Gaulle, acceptez de rassembler tout ce qui reste de nos unités blindées en un corps unique. Séparées, elles seraient impuissantes. Unies et commandées par un chef capable, elles peuvent encore faire quelque chose.
– Mais quel chef ? demande Reynaud, désabusé.
– Le Général Delestraint. J’avais déjà fait cette proposition à Weygand le 2, il n’en a pas tenu compte. Si vous ne souhaitez pas renvoyer Weygand tout de suite, nommez du moins Delestraint.
De Margerie approuve et Reynaud accepte cette proposition.

9 juin
Londres
A l’aube, le Général de Gaulle quitte Le Bourget pour Londres, où il rencontre Winston Churchill en fin de matinée. Le Premier Ministre se refuse à déployer de nouvelles unités de la RAF en France, expliquant que leur utilité et leur efficacité pour la défense de la Grande-Bretagne sont bien plus grandes que celle qui pourrait résulter de leur emploi en France dans la confusion actuelle. A la fin de l’entretien, rapporte le Général Edward Spears (présent en qualité de représentant de l’état-major britannique auprès des forces françaises), De Gaulle déclare à Churchill : « C’est vous qui avez raison. »
En début d’après-midi, la délégation française voit encore Anthony Eden (alors ministre de la Guerre) et Jean Monnet, qui préside la Commission mixte franco-britannique d’achat de matériel de guerre. Alors que la situation militaire se détériore rapidement, De Gaulle est rappelé d’urgence à Paris, où son avion se pose en fin de journée au Bourget au milieu des cratères de bombes.

Paris
Dans la nuit, une réunion se tient au Ministère de la Guerre. La victoire allemande sur le continent apparaît inéluctable. Soutenu par De Margerie, De Gaulle plaide pour un repli sur l’Afrique du Nord. Dominique Leca, directeur du cabinet de Paul Reynaud, les appuie fermement. Reynaud est alors convaincu d’opter pour ce qui est qualifié par Leca de « solution hollandaise ». Les troupes qui ne seront pas destinées à être évacuées devront se battre en Métropole jusqu’à la limite de leurs possibilités, puis elles se rendront. « Cependant, prévient De Gaulle, il faut que vous sachiez, Monsieur le Président du Conseil, que cette solution se heurtera certainement à l’hostilité de certains. Hélas ! Hélas ! Au premier rang de ces hommes, il y aura le chef de notre Armée, le Général Weygand ! »
Pour organiser l’ultime défense, il est décidé que les autorités politiques et militaires se replieront vers le sud et, dans un premier temps, sur la Loire.


10 juin
Bataille de France
Face aux Allemands, sur tous les fronts, les troupes françaises luttent désespérément. Cependant, les mouvements de repli s’intensifient, sous des bombardements aériens qui ne se heurtent plus à aucune opposition cohérente. Certaines unités trouvent déjà les ponts prématurément coupés devant elles lorsqu’elles atteignent les lignes d’eau qu’elles sont censées défendre.
En Champagne, les blindés allemands s’engouffrent dans la brèche de Rethel et poussent sur la Rethourne. Au sud de l’Aisne est créé un “groupement cuirassé” avec la 3ème DCR et la 7ème DLM, sous le commandement du Général Buisson. Les blindés français parviennent à retarder quelque peu l’avancée du 39ème PanzerKorps.
Sur le front de la VIème Armée, l’ennemi s’infiltre sur l’Ourcq et l’Aisne. Sur le front de la Xème Armée, les Allemands franchissent la Seine en plusieurs points, mais des unités françaises combattent toujours autour de St-Valéry (sur la côte de la Manche) avec les forces britanniques. Une partie du 9ème Corps, isolée, est capturée, l’autre partie se replie sur le Havre, où l’opération “Cycle” permet d’évacuer 11 000 hommes.
Le GQG est transféré à Briare.

Paris
En fin de matinée, le Général Maxime Weygand rencontre à sa demande Paul Reynaud, Président du Conseil, au ministère de la Guerre. Au grand agacement du chef d’état-major, ce dernier est entouré du Général de Gaulle, secrétaire d’Etat à la Guerre, et de Roland de Margerie, conseiller militaire. Weygand remet à Reynaud une note dans laquelle il plaide pour un armistice dans les plus brefs délais. En réponse, De Gaulle lui expose la “solution hollandaise”. Weygand bondit.
– Un abandon du territoire métropolitain serait un enfantillage, un enfantillage dangereux ! Vous rendez-vous compte que vous laisseriez ainsi les mains libres aux communistes ? De Gaulle, vous êtes un soldat, je ne comprends pas que vous acceptiez une sottise pareille. Cette prétendue solution est en réalité une manœuvre pour faire porter à l’Armée, par l’inévitable capitulation des unités restées en Métropole, la responsabilité des fautes du pouvoir politique !
– La question n’est pas ici de savoir qui porte quelles responsabilités, coupe De Margerie. Général, nous devons savoir si vous exécuterez les ordres du pouvoir républicain, même si ces derniers devaient être contraires à la note que vous venez de nous remettre et à votre opinion !
– Je suis un soldat. J’exécuterai tout ordre conforme à l’honneur de l’Armée, répond évasivement Weygand.
Les divergences de vue entre lui et ses interlocuteurs apparaissent définitives. Reynaud décide une courte interruption de séance où il consulte Leca et, par téléphone, Georges Mandel. Puis il revient dans la salle de conférence et, sans même s’asseoir, il tranche : « Général Weygand, j’ai le regret de vous dire que je dois vous retirer la charge de chef d’état-major des Armées. » Weygand, blême, articule : « Vous faites une folie ! » et sort sans ajouter une syllabe. Reynaud s’assied lentement et soupire : « Bien, De Gaulle, c’est fait… Voudriez-vous joindre Huntziger pour lui demander d’accepter le poste, je vous prie… »
– Je vais moi-même me rendre à son QG, Monsieur le Président du Conseil. Mais avant, encore un mot : il faudrait nommer le Général de Lattre, qui vient de se distinguer dans la défense de Rethel, à la tête du camp retranché de Paris.
– Ah pour ça non ! Défendre Paris dans les conditions actuelles provoquerait un nombre considérable de victimes civiles. Paris n’a pas de défense propre, nous devons lui donner un caractère de ville ouverte. Nommez votre De Lattre à la tête d’un groupement combinant les unités encore disponibles en Région parisienne et donnez-lui l’ordre de retarder le plus possible l’ennemi entre la Seine et la Loire, mais pas de défendre Paris.
Reynaud restera inflexible sur ce point. Dans l’intérêt du maintien de l’ordre et de la protection de la population, le Général Héring, qui commande la place de Paris, donnera l’ordre à tous les services publics de rester sur place.

Arcis-sur-Aube (QG du Général Huntziger)
De Gaulle annonce à Huntziger la destitution de Weygand et lui propose de prendre sa succession. Huntziger est si surpris qu’il téléphone à Reynaud pour avoir confirmation de ce que lui annonce le sous-secrétaire d’État à la guerre. Le Président du Conseil le convainc d’accepter.

Paris
Après avoir quitté la rue Saint-Dominique, Weygand, ulcéré, s’est rendu aux Invalides. Là, il rencontre Pétain vers 18h00 : « Monsieur le Maréchal, il faut agir. Vous seul pouvez mettre fin à cette folie ! »
Dans la soirée, Reynaud reçoit Huntziger et lui confie « l’une des plus graves, plus tristes et plus nécessaires mission qu’un officier puisse recevoir de son gouvernement : retarder l’invasion du territoire national par l’ennemi, sans espoir de le repousser, mais seulement pour permettre la poursuite de la lutte en exil. »
Reynaud télégraphie ensuite à Roosevelt pour lui demander de « jeter dans la balance le poids de la puissance américaine afin de sauver la France, sentinelle avancée de la démocratie. » Roosevelt, très ému, confie alors à ses collaborateurs : « Je n’imaginais pas que la situation française était si épouvantable. En lisant les premières lignes, j’ai craint que que. Reynaud ne m’annonce la capitulation ! Mais le pire est évité, la France continue la guerre. Le monde l’a échappé belle, je crois. »
En estimant que le pire est évité, Roosevelt est quelque peu optimiste. De Margerie, pressentant une poussée politique du camp défaitiste, organise une réunion privée entre de Gaulle et Léon Blum. Le chef de la SFIO est acquis aux idées de De Gaulle depuis le mémorandum “L’avènement de la force mécanique”, que ce dernier avait fait circuler le 10 janvier 1940. C’est ensemble que les trois hommes quittent Paris vers 23h00, en direction de la Loire. Ils ont été précédés de quelques heures par Georges Mandel, envoyé à Tours pour organiser le repli du gouvernement et qui, avant de partir, a proposé à Reynaud d’arrêter préventivement un certain nombre de “défaitistes”, comme Clemenceau l’avait fait en 1917. Selon les notes de Dominique Leca, le nom de Pierre Laval, qualifié par les Renseignements Généraux de « sénateur aux accointances mussoliniennes » aurait été cité.

Poitiers
Conseil des Ministres du gouvernement belge en exil en France. Le Conseil prend connaissance d’un certain nombre de documents communiqués par le Roi Léopold III concernant la capitulation de l’armée belge le 28 mai (voir annexe 40-1).

Norvège
La campagne prend fin avec l’évacuation des dernières troupes alliées.

Rome
16h30 - Le comte Galeazzo Ciano, ministre italien des Affaires Etrangères, communique à l’Ambassadeur de France, André François-Poncet que « l’Italie se considérera en état de guerre avec la France à partir de demain, 11 juin, à 00h01. » En se retirant, l’ambassadeur prévient : « Vous verrez que les Allemands sont des maîtres exigeants. »
Une déclaration de guerre analogue est remise à l’Ambassadeur de Grande-Bretagne.
Cependant, la décision de Mussolini d’entrer en guerre surprend non seulement la population, mais aussi l’Armée. À l’origine, le Duce n’avait pas prévu d’entrer en guerre avant 1942 ou 1943. Lorsque Hitler lui avait annoncé son intention d’attaquer la Pologne en 1939, il avait été scandalisé et avait adopté une politique de non-belligérance (à défaut de neutralité), allant même jusqu’à autoriser certaines entreprises italiennes (Caproni, par exemple) à vendre de l’armement à la Grande-Bretagne. Il avait commencé à changer d’opinion au mois de mars et décidé en avril d’entrer en guerre. Ciano lui avait pourtant signalé en février que seules dix divisions pouvaient être considérées comme prêtes et que les dépôts de munitions et d’équipement pour l’artillerie étaient à 8% de leur niveau théorique.
Jusqu’à la dernière minute, les généraux italiens ont donc supplié le Duce de repousser sa décision d’au moins deux semaines, si ce n’est quatre, car les forces italiennes ne sont absolument pas prêtes à faire la guerre. Placée devant la perspective d’affronter les Alliés sur deux fronts, l’armée d’Afrique n’a pas le moral. Le taux de disponibilité de ses avions et de ses blindés est très bas (parfois moins de 50%) et une partie des stocks militaires ont été renvoyés d’Afrique du Nord en Italie pour envahir l’Albanie en 1939.
Dans les airs, la Regia Aeronautica souffre de graves faiblesses. Certes, l’intérêt des unités de bombardiers-torpilleurs (Aerosiluranti) pour mener une guerre en Méditerranée a bien été perçu par l’état-major, mais ces unités ne seront pas prêtes avant la fin de l’année.
Seul point positif : la flotte est bien préparée et compte de nombreux navires, mais elle ne fait pas le poids face aux marines britannique et française combinées. La doctrine établie est donc celle d’une fleet in being (flotte “en existence”, exerçant une menace potentielle), qui ne doit mener d’actions offensives qu’avec ses forces légères.
Mais Mussolini, persuadé que l’effondrement de la France est imminent et que les Britanniques ne poursuivront pas la guerre tout seuls, a refusé tout délai. Lorsqu’il a finalement annoncé au Maréchal Badoglio que le pays entrerait en guerre le lendemain, celui-ci a sombrement répondu : « C’est le suicide de l’Italie. »
– Ne soyez pas si inquiet, a rétorqué Mussolini. Au prix de quelques milliers de morts, l’Italie va gagner un siège de premier ordre à la table de la nouvelle Europe !

Mer Rouge
Au petit matin, le vapeur italien Umbria se saborde au large de Port-Soudan.
Lancé en 1911, l’Umbria avait été acheté en 1935 par le gouvernement italien et converti en transport de troupes. Pendant deux ans, il avait assuré l’acheminement de milliers de soldats dans les diverses colonies d’Afrique Orientale. Revendu à une compagnie privée, il continuait à faire l’aller-retour entre l’Italie et divers ports de la Méditerranée et de la Mer Rouge. Au mois de mai 1940, en prévision de l’effort de guerre à venir, il avait embarqué pour l’Afrique Orientale divers équipements et denrées dans les ports de Gênes, Livourne et Naples. 360 000 bombes, 60 caisses de détonateurs et d’autres équipements de même nature, pour un total de 8 600 tonnes, avaient aussi été embarquées, dans le plus grand secret. Arrivé à Port-Saïd le 3 juin, le navire avait été bloqué pendant trois jours par la Royal Navy, avant d’être finalement autorisé à repartir, car l’Italie était encore techniquement neutre.
L’Umbria était arrivé le 9 juin à proximité de Port-Soudan lorsque l’aviso HMS Grimsby, qui l’avait suivi à la trace, l’avait obligé à jeter l’ancre à proximité du rivage. Le croiseur léger HMNZS Leander, arrivé sur place dans l’après-midi, avait dépêché une vingtaine d’hommes pour inspecter le navire, en principe à la recherche de contrebande. Ces hommes avaient passé la nuit sur l’Umbria.
A l’aube du 10 juin, le capitaine italien, écoutant la radio, entend la déclaration de guerre de son pays à la France et à la Grande-Bretagne. Etant le seul à bord au courant de la nouvelle, il réussit à saborder son navire pratiquement sous le nez des marins britanniques.
Après la guerre, une équipe de démineurs examinera l’épave et signalera qu’une éventuelle explosion soufflerait la moitié de Port-Soudan, tout proche. Depuis, l’Umbria n’a pas bougé. Sa cargaison non plus…

Afrique Orientale Italienne
Quatre sous-marins partent immédiatement pour patrouiller devant les ports alliés de la région : le Macallè devant Port-Soudan, le Galvani devant Oman, le Ferraris devant Djibouti et le Galilei devant Aden.


Dernière édition par Casus Frankie le Sam Aoû 11, 2007 17:53; édité 4 fois
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Casus Frankie
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MessagePosté le: Jeu Aoû 09, 2007 18:59    Sujet du message: Répondre en citant

Post-scriptum

Un moment, j'avais été tenter de situer l'accident sous le pont de l'Alma. Mais je n'ai pas osé... Laughing
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MessagePosté le: Jeu Aoû 09, 2007 21:09    Sujet du message: Répondre en citant

La question qu'on peut se poser, c'est sur la nouvelle du remplacement de Weygand et la décision de l'exil en AfN commencent à filtrer, auquel cas ça pourrait retarder la décision italienne (encore que ...). Idem pour la réaction du gvt belge.
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MessagePosté le: Ven Aoû 10, 2007 10:07    Sujet du message: Répondre en citant

Brillant!

Mort de rire, le coup de l'Alma Very Happy

J'ai fait un petit copier-coller avec l'actuel POD (Juin 1940).
Ca fait 64 pages dans Word... colossal ! Shocked
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MessagePosté le: Ven Aoû 10, 2007 16:17    Sujet du message: Répondre en citant

J'ai un peu rectifié la partie 6 au 10 juin (surtout au début, avec la composition du gouvernement).
Ci-dessous, le 11, avec, en guest-star, la première apparition d'un tankiste allemand qui n'est pas ma "créature", mais celle d'un jeune Allemand rencontré sur le NFB et que je souhaite encourager.


11 juin
Bataille de France
Lors des combats de Heunières, la 1ère DLM inflige un coup d’arrêt aux forces allemandes. Malgré quelques contre-attaques de ce genre, la IVème Armée doit se replier pour s’aligner sur la VIème. Devant cette dernière, les blindés allemands ont forcé l’Ourcq et atteint Château-Thierry. La VIIème Armée se retire sur la position avancée de Paris. Face à la Xème armée, les Allemands ont pris Elbeuf et Les Andelys et atteint Louviers. Les troupes de von Kleist ont franchi la Marne. Reims ne va pas tarder à tomber.
A Paris, De Lattre, à peine nommé, ordonne l’incendie de toutes les réserves de carburant de la région qui ne peuvent être évacuées. Il constitue à Vincennes le “Groupement De Lattre”, avec les unités stationnées autour de Paris et différentes unités rescapées des combats de Champagne.
Dans le port du Havre, où les raffineries ont été incendiées volontairement le 9, les flammes et la fumée créent une atmosphère d’apocalypse que l’on retrouvera à de nombreuses reprises aux quatre coins du monde dans les années suivantes. Cinq navires de commerce qui participent à l’évacuation (dont les Belges Albertville et Piriapolis) sont coulés par les Stukas et un sixième doit s’échouer. Le vieux cuirassé Paris, qui couvre la zone, est également endommagé.
À la frontière franco-italienne, on ne note pour le moment que des reconnaissances aériennes de part et d’autre. Malgré les mauvaises conditions météorologiques, un Fiat BR-20 du 43ème Stormo (basé à Cameri) effectue une mission de reconnaissance sur Toulon et parvient à prendre de nombreuses photographies du port.

Journal de Hans Gruber (rassemblé par son petit-fils Markus Gruber, Reutlingen) [Le 11 juin 1940, Hans Gruber, fils d’un officier tombé à Sedan en 1914, est lui aussi officier, dans la 7e Panzerdivision, sous les ordres du Général Erwin Rommel. Il n’a pas participé à la campagne de Pologne. Après un mois de combats presque continuels, il prend enfin un peu de repos.]
« J’ai vu Rommel aujourd’hui. Sa voiture est passée près de notre char pendant que je soufflais un peu avec mes gars. Mon équipage est vraiment merveilleux. Des types remarquables, dévoués et efficaces. Jusqu’ici, par bonheur, nous avons eu étonnamment peu de pertes. Nous avons perdu Jochen Heldmans et son char, incendié par un S-35 il y a deux semaines, et le char de Hannens a été démoli par un 25 mm hier. Pas de remplaçants pour le moment.
Le QG du bataillon vient de nous annoncer que l’Italie était entrée en guerre de notre côté. Leur radio annonce qu’ils ont attaqué dans les Alpes et qu’ils avancent sur tout le front. Attendons un peu pour voir ce qu’il y a de vrai là-dedans. »

Région de la Loire
Les autorités françaises s’installent sur la Loire (Reynaud au château de Chissay, le Président de la République, Albert Lebrun, au château de Cangé, De Gaulle au château de Bauvais, Huntziger au château du Muguet, près de Briare, et le Ministère de l’Intérieur à Tours et celui des Affaires Étrangères au château de Villandry. Pendant cette installation, De Margerie avertit Reynaud que Paul Baudouin (secrétaire au Comité de Guerre) « a pris langue avec Pétain et Weygand. »
Dans la journée, respectant les formes, la France déclare la guerre à l’Italie, suivie par la Grande-Bretagne et ses dominions, Australie, Canada, Nouvelle-Zélande et Afrique du Sud. Cependant, à Poitiers, où il est réfugié, le gouvernement belge approuve la recommandation de son ministère des Affaires Etrangères de ne se considérer en guerre avec l’Italie qu’à partir du moment où ce pays aura déclaré la guerre à la Belgique ou aura fait contre elle acte de belligérance.

Briare (château du Muguet)
Conseil Suprême Interallié
A 19h00, après bien des péripéties, la délégation britannique, annoncée pour 17h00, arrive enfin. Elle est composée de Winston Churchill, Anthony Eden (ministre de la Guerre), les généraux Sir John Dill (chef de l’état-major impérial), Ismay (Chef d’état-major de l’Armée britannique) et Spears et du capitaine Berkeley. La délégation française comprend Paul Reynaud, Philippe Pétain (en tant que vice-président du Conseil), Charles de Gaulle, le Général Huntziger, le Général Georges (convoqué à la demande d’Ismay et de Churchill) et Roland de Margerie. Pétain, déjà mécontent d’être privé de Weygand, constate avec humeur l’absence de Villelume.
Le début de la réunion est fixé à 22h00, après un dîner où Churchill et de Gaulle ont le loisir de s’entretenir longuement.
Dans le même temps, Reynaud s’absente un moment pour rencontrer Baudouin en compagnie de Leca et de Margerie. Baudouin, qui avait été chaudement recommandé à Reynaud par Hélène de Portes, au point qu’il avait obtenu le poste initialement prévu pour de Gaulle, sent bien qu’en l’absence de sa protectrice et de Villelume, sa position est devenue fragile. Il ne se dérobe pas cependant aux questions que Reynaud et de Margerie lui posent quant à ses contacts avec Weygand et Pétain : « Dans la situation actuelle du pays, j’ai souhaité maintenir un lien avec ces deux grands soldats pour éviter à la France un désastre aux conséquences incalculables. Tous deux m’ont affirmé que la prolongation des combats était inutile, vu la tournure désespérée des opérations. L’obstination ne pourrait que conduire à une paix plus dure, et d’autant plus dure que les combats dureraient. Monsieur le Président du Conseil, je vous en prie, ne vous enlisez pas dans une position stérile ! Seule l’ambition effrénée du colonel de Gaulle (sic) motive son attitude ! »
– Je vous remercie de votre franchise, répond Reynaud, mais ma décision est prise. Vous savez le deuil qui m’affecte ; cependant, je me dois aujourd’hui à la France et à elle seule. Vous comprendrez que, dans ces conditions, je ne puis vous conserver au poste que vous occupez.
Ainsi prend fin le paradoxe qui avait vu Reynaud, choisi pour son intransigeance quant à la poursuite de la guerre, désigner comme secrétaire du Comité à la Guerre un homme convaincu de l’inutilité de cette dernière. Baudouin présente sa démission, qui est sur le champ acceptée.
Le Conseil commence donc à 22h00. Plusieurs sources (dont le procès-verbal rédigé par le Capitaine de Margerie) nous permettent aujourd’hui de décrire son déroulement avec une certaine précision.
Alors que les deux délégations entrent dans la salle où le Conseil doit se tenir, De Margerie annonce au Général de Gaulle qu’il hérite sur le champ des attributions de Baudouin. Le sous-secrétaire d’État ne cille point. Churchill, dont l’ouïe savait, quant il le fallait, ne pas être mauvaise, se tourne vers Spears (qui racontera l’anecdote dans ses Mémoires) et lui dit en français « Voici l’homme du destin ! » Si de Gaulle entend cette remarque, bien digne des sorcières de Macbeth, il n’en laisse rien paraître.
Le Conseil commence par un rapport d’Huntziger sur la situation militaire. Le nouveau commandant en chef des armées françaises dresse un tableau sombre, mais non désespéré : « Notre renseignement sait que les forces ennemies, si elles restent bien plus puissantes que ce que l’Armée française peut leur opposer, ont un besoin urgent de se ravitailler et de combler leurs pertes. Une défense en bon ordre, à condition d’être immédiatement décidée et entreprise, permettrait certainement de gagner plusieurs semaines. »
– Mais où pourriez-vous les arrêter ? demande Churchill. Sur la Loire ? Ailleurs ?
– Je crains, Monsieur le Premier Ministre, précise Huntziger d’une voix assourdie, que nous ne puissions les arrêter qu’au bord de la Méditerranée. L’issue des combats en Métropole, je sois l’avouer, ne peut faire de doute.
Winston Churchill ne cache pas un étonnement qui est peut-être feint : « Ne pourriez-vous conserver une tête de pont sur l’Atlantique, en Bretagne par exemple ? » Il rappelle qu’au printemps de 1918, on était revenu d’une situation que tous croyaient perdue, annonce la mise en route de quatre divisions britanniques et affirme : « Si l’Armée française peut tenir, vingt à vingt-cinq divisions britanniques se trouveront à sa disposition au printemps 1941. »
Pétain réagit violemment : « La Loire ! La Bretagne ! Ce sont des rêveries dangereuses ! A l’époque à laquelle vous faites allusion, lorsque les forces du Maréchal Gough ont été mises en danger par les Allemands, j’ai lancé quarante divisions à leur secours. Où sont vos quarante divisions aujourd’hui ? »
Churchill ne se laisse pas démonter : « S’il est impossible d’établir une ligne de défense classique sur la Loire, la guérilla pourrait ralentir substantiellement l’avance ennemie. » Pétain s’en étouffe presque : « La guérilla ? Vous voulez donc la perte de notre pays ? »
– C’en est assez, Monsieur le vice-président du Conseil ! s’exclame De Gaulle. Il est odieux de vouloir faire porter à nos alliés des responsabilités qui ne sont que trop françaises !
– Des responsabilités françaises ? A qui donc croyez-vous faire allusion ? gronde le vieux maréchal.
– Vous le savez fort bien !
L’hostilité entre les deux hommes est violente et réciproque. Sous les yeux médusés de la délégation britannique, Reynaud doit intervenir pour interrompre l’altercation : « Monsieur le Maréchal, je dois vous demander de songer, quelle que soit votre opinion sur la politique de nos alliés, que nous avons signé le 28 mars avec M. Chamberlain un accord proscrivant toute paix séparée. »
– Si l’Armée française se voyait forcée d’interrompre la guerre, proclame Churchill, l’Angleterre la poursuivra, espérant qu’Hitler sera ruiné par ses victoires mêmes. Dans tous les cas, l’Angleterre poursuivra la lutte, même si elle est envahie et connaît toutes les horreurs de la guerre sur son territoire. Avec son aviation et sa flotte, l’Empire pourra résister des années et imposer à l’Europe le blocus le plus sévère. Ce sera rapidement une guerre de continents. Il est possible que les Nazis dominent l’Europe, mais ce sera une Europe en révolte, et tout ne peut finir que par la chute d’un régime surtout soutenu par la victoire de ses machines. Nous espérons seulement que la flotte française restera à nos côtés.
– La détermination du gouvernement français n’est pas moindre, affirme Reynaud sur le ton le plus solennel possible (bien que sa voix ne l’aide guère). La France combattra, que ce soit en Métropole ou dans l’Empire, et sa flotte continuera à œuvrer en étroite coordination avec la marine britannique. Quel que soit l’aspect militaire de la question, le problème de la continuation de la guerre est d’ordre politique et relève des décisions du gouvernement.
La discussion reprit alors sur un ton plus apaisé, même si la tension était toujours forte.
Le Général Georges réclame une nouvelle fois l’engagement massif d’une grande quantité d’avions britanniques en France. Churchill refuse : « Ce serait une faute de disloquer le seul instrument de combat qui nous reste pour apporter à la bataille de France une contribution insuffisante à modifier le bilan de la situation. »
Huntziger reprend la parole pour exprimer ses doutes quant au le “réduit breton”, mais il n’en condamne pas totalement l’idée. Du moins une défense sur la Vilaine permettrait-elle de procéder à une évacuation en bon ordre des forces situées en Basse-Normandie et en Bretagne.
Reynaud et De Gaulle interviennent à nouveau pour affirmer leur détermination de tout mettre en œuvre pour permettre le passage en Afrique du Nord des moyens les plus importants possibles et continuer la lutte.
Churchill assure alors la délégation française de l’engagement total (« total commitment ») de la Royal Navy pour aider à cette évacuation : « Dès la fin du Conseil, je donnerai aux Amiraux Cunningham et Somerville des instructions en ce sens. Par ailleurs, les forces britanniques restant en France n’hésiteront pas à se battre avec les forces françaises pour retarder l’avance de l’ennemi. »
La séance du Conseil suprême interallié est levée à minuit.

Malte
Dans la nuit du 10 au 11 juin, des avions italiens décollent de Sicile et lancent leurs premières bombes sur Malte. Dans la journée, l’île verra huit autres incursions de l’aviation italienne.

Tunisie
La base aéronavale de Karouba est violemment bombardée par l’aviation italienne, mais aucun appareil n’est détruit.

Athènes
Face aux déclarations agressives de Mussolini, le Général Alexandre Papagos, chef d’état-major de l’armée grecque, assure qu’il fera respecter la neutralité de son pays, si besoin par les armes.

Libye
Premiers raids aériens britanniques. Les jours suivants vont avoir lieu les premières escarmouches à la frontière avec l’Egypte.

Afrique Orientale
L’aviation italienne bombarde Port-Soudan et Aden, pendant que l’aviation britannique effectue des raids sur l’Erythrée.
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patzekiller



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MessagePosté le: Sam Aoû 11, 2007 05:38    Sujet du message: Répondre en citant

finalement, que reste il à rediger et à simuler? une poignee de semaine en aout septembre 40 si j'ai le bon compte?
_________________
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loic
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MessagePosté le: Sam Aoû 11, 2007 09:10    Sujet du message: Répondre en citant

Simuler et rédiger plutôt ...
On est arrêté au 12 juillet en Libye. Tout reste à refaire en France.
Puis Sardaigne, Afrique Orientale, Dodécanèse ... Rolling Eyes
_________________
On ne trébuche pas deux fois sur la même pierre (proverbe oriental)
En principe (moi) ...
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Casus Frankie
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MessagePosté le: Sam Aoû 11, 2007 18:11    Sujet du message: Répondre en citant

Suite de ma version. Bien entendu, j'avais évoqué avec Fantasque mes idées de modifications. En son absence, je les poste ici, en sachant que je les retravaillerai si besoin (j'apporte d'ailleurs déjà régulièrement de petits coups de lime aux posts précédents). Et puis il y aura quelqus changemtns dans la Campagne de France, et dans les Aventures du gouvernement Belge (aïe, aïe, du boulot en perspective... je pense faire un premier ajustage rapide, que Sa Sainteté corrigera)

12 juin
Londres
Le Négus Haïlé Sélassié, en exil à Londres, propose la participation de l’Éthiopie à la guerre contre l’Italie aux côtés des Alliés.

Bruxelles
Sous la pression de la Militärverwaltung (l’administration militaire allemande), qui menace de les mettre hors-jeu, le Collège des Secrétaires Généraux des ministères signe un protocole ayant trait à ses rapports avec les autorités d’occupation, dans l’espoir de conserver un maximum de leviers de décision entre des mains belges (le Parlement avait voté le 10 mai une loi leur déléguant certains pouvoirs exécutifs pour les territoires se trouvant sous occupation ennemie) (voir annexe 40-1).

Brest
L’Emile-Bertin s’élance pour un nouveau trajet Brest-Halifax (son précédent voyage date du 21 mai) avec 254 tonnes de lingots et pièces d’or. C’est un des nombreux convois qui doivent mettre en sécurité l’or de la Banque de France (voir annexe 29).

Bataille de France
En Champagne, Reims est prise, et plus à l’est, les blindés allemands ont atteint Bétheniville. Le 39ème PanzerKorps de Guderian prend Châlons-sur-Marne sans résistance. La VIème Armée s’est ressoudée à la IVème sur la Marne. La VIIème se rétablit péniblement sur la position avancée de Paris. La Xème a perdu définitivement le contact avec le 9ème Corps. St-Valéry est pris. Une grande partie de la 21ème division britannique Highland est capturée. Les Allemands étendent leur large tête de pont au sud de la Seine. Ils traversent la Marne à Dormans et poussent sur Montmirail.
À Angevillers, dans l’Oise, les Allemands fusillent trente soldats sénégalais qui se sont pourtant rendus.
Sur les trente divisions tenant la ligne Weygand, 11 ne possèdent plus que 50 % de leurs effectifs, 13 sont réduites à 25 % et les autres ne sont que des débris. Devant la dislocation inéluctable de la dernière ligne de défense, la décentralisation des commandements est organisée pour que Groupes d’Armées et même Armées puissent combattre séparément, sur des axes généraux fixés. La rupture prévisible entre le front et la Région Fortifiée met impitoyablement en évidence l’absence quasi-totale de défense arrière de la Ligne Maginot. On envisage de l’évacuer après avoir mis hors d’usage le matériel qui ne pourrait être emporté.
Les trois DLM du corps de cavalerie sont chargées de couvrir la retraite des troupes de la Région parisienne, en retardant notamment le 15ème PanzerKorps. A proximité d’Evreux, la 1ère DLM arrête ainsi la 27e DI allemande, pendant que la 2ème DLM conduit de violents combats de retardement à Jaudrais et Senonches.
La 4ème DLM doit couvrir la VIIème armée, qui retraite d’Epernay vers Meaux.
Paris est officiellement déclarée ville ouverte.
Sur les côtes du Cotentin, le vieux cuirassé Courbet bombarde les troupes de Rommel qui progressent difficilement vers Cherbourg.
En fin d’après-midi, un des six avions de transport Farman 224 que possède l’Armée de l’Air, non armé et sans escorte, est abattu par deux Messerschmitt Bf-110 ; il s’écrase dans la forêt de Rambouillet.
Un Fiat BR-20 du 7ème Stormo (basé à Milan-Linate) effectue une reconnaissance sur les aérodromes du Cannet-des-Maures, de Cuers-Pierrefeu et d’Hyères et sur le port de Toulon. L’appareil est endommagé par la chasse française, mais il parvient à rejoindre l’aérodrome de Torre-Pallavicino.

Blois
Alors que Reynaud se retire, épuisé de fatigue et de chagrin, pour tenter de trouver un peu de repos, De Margerie organise à Blois une rencontre entre Mandel, Blum et De Gaulle, qui se déroule aux premières lueurs de l’aube. Mandel connaît peu De Gaulle. Il tient à s’assurer de sa fiabilité : « Nous aurons besoin de vous au prochain Conseil des Ministres, Général. Vous comprenez qu’il faudra, à nos côtés, un soldat, un homme qui sache se battre et qui soit prêt à continuer. Certains d’entre nous viennent de formations politiques qui n’ont peut-être pas votre sympathie, mais devant les périls de l’heure, chacun doit savoir surmonter ses préjugés… » De Gaulle saisit fort bien : « Comme vous l’avez dit, Monsieur le Ministre, il s’agit de se battre. Et aujourd’hui, il n’y a plus de droite ou de gauche, il n’y a plus que ceux qui se couchent et ceux qui se battent. J’avais craint que les premiers fussent majoritaires au gouvernement, mais puisque vous vous battez, je serai à vos côtés. »
Les quatre hommes décident d’unir leurs efforts pour soutenir la résolution de Paul Reynaud de lutter jusqu’au bout et de tout faire pour déjouer les manœuvres du “parti défaitiste”. Ce “pacte du 12 juin”, qui fut dénoncé par les partisans de l’armistice comme la “conjuration de Blois”, inclut la décision de Blum d’engager la SFIO au gouvernement si Reynaud en avait besoin. Quant à Mandel, il affirme être prêt à « faire arrêter et mettre hors d’état de nuire tous les défaitistes, comme Clemenceau le fit en 1918. »

Région de la Loire
De Blois, Mandel réussit à joindre Louis Marin (Ministre d’État), Alphonse Rio et César Campinchi (Ministres de la Marine Marchande et de la Marine Militaire) et à s’assurer de leur soutien.
Tandis que De Gaulle part en voiture pour Rennes où, à la demande de Churchill et Reynaud, il doit explorer les possibilités d’une défense de la Bretagne, De Margerie, Blum et Mandel se rendent à Tours. Dans la matinée, ils rencontrent Edouard Herriot (Président de la Chambre) et Jules Jeanneney (Président du Sénat). Les deux hommes acceptent d’adhérer au “Pacte de Blois”, surtout Jeanneney qui, comme Mandel, est un ancien collaborateur de Clemenceau. Herriot est plus hésitant dans son ralliement. Finalement, il se rend aux arguments de Blum, qui lui expose que la SFIO, principale formation de la Chambre, est décidément favorable à la poursuite de la guerre et que, si la Chambre votait, ce serait dans ce sens.
Pendant ce temps, De Gaulle, arrivé à Rennes, consulte les responsables militaires locaux. Il constate que l’option du “réduit Breton” est désormais impraticable. Tout au plus peut-on espérer que Brest tienne jusqu’au 22 ou 23 juin, laissant le temps d’évacuer en bon ordre un nombre considérable de troupes. De Gaulle rentre alors au château de Beauvais (à une vingtaine de kilomètres de Tours). Là, une conférence, organisée avec le Général Colson, donne un résultat relativement optimiste : avec l’aide britannique et l’engagement total de la flotte, au moins 500 000 hommes pourraient être évacués des ports de Méditerranée et de la côte Atlantique vers l’Afrique du Nord.
De Margerie l’appelle à ce moment pour l’informer qu’un Conseil des Ministres est prévu pour la soirée au château de Cangé, résidence d’Albert Lebrun. « C’est l’instant crucial, mon Général. Nous allons certainement faire face à une véritable offensive des défaitistes, sous la conduite de Pétain. Nous l’avons privé du soutien de Weygand et il sent que notre position autour du Président du Conseil est de plus en plus solide. Il va donc tenter de forcer le cours des événements, en profitant du fait que le Général Georges, devant l’avance ennemie, vient d’ordonner la retraite générale pour les forces situées sur la Seine et en Normandie. MM. Herriot et Jeanneney nous ont assurés ce matin de leur soutien, mais comment pourrions-nous renforcer encore la résolution du Président Reynaud ? Sans doute, il est de cœur avec nous, mais il est épuisé et vous savez qu’il a été très affecté… Je crains un accès de pessimisme… »
– Conseillez-lui d’appeler le Général Noguès [résident général au Maroc et commandant en chef des troupes en Afrique du Nord], conseille De Gaulle. Je suis convaincu qu’il tiendra le langage de fermeté qui s’impose.
En fin d’après-midi, avant de partir pour Cangé, Reynaud, en compagnie de Margerie et de Leca, arrive à joindre Noguès, auquel il fait part des pressions des « milieux défaitistes qui souhaitent un armistice immédiat. » La réponse de Noguès est en effet des plus fermes : « L’Afrique du Nord toute entière est consternée par une telle perspective. Les troupes demandent à continuer le combat. » Vers 19h00, Noguès envoie un câble chiffré où il confirme ses dispositions et ajoute qu’elles sont partagées par le résident général en Tunisie (M. Peyrouton) et le gouverneur général de l’Algérie (M. Le Beau). Dans la nuit arriveront aussi des messages de Gabriel Puaux (Haut-Commissaire en Syrie) et du général Mittelhauser (commandant des forces françaises au Moyen-Orient), allant dans le même sens que le câble de Noguès.
A 20h00 enfin, au moment de partir pour Cangé, Reynaud reçoit un nouvel appel. C’est Churchill, qui a parlé en fin d’après-midi à De Gaulle : « Un Conseil des Ministres crucial va se tenir cette nuit, lui a dit le Général. Le destin de mon pays est en balance. Mais sachez-le, Monsieur le Premier Ministre, quelle que soit l’issue de cette réunion, la France ne vous abandonnera pas, dussé-je rester son seul porte-drapeau. » Après avoir ressassé deux heures durant la signification des propos d’un De Gaulle visiblement ému, le Premier Ministre sent qu’il doit faire quelque chose : « Je voyais la France capituler, dira-t-il à ses collaborateurs, et De Gaulle arriver à Londres en disant qu’il continuait la guerre tout seul ! Nous aurions été bien avancés ! » C’est pourquoi Churchill appelle personnellement Paul Reynaud pour l’assurer que la Grande-Bretagne soutiendra « fraternellement » tous les efforts du gouvernement français pour continuer la guerre. « Je dis tous vos efforts, en toutes circonstances ! Je sais que la situation de votre pays est dramatique, mais vous ne devez pas lâcher prise ! s’exclame-t-il. Monsieur le Président du Conseil, hold firm ! Tenez bon ! J’en appelle à l’honneur de la France ! » conclut-il, rappelant le mot de Joffre interpellant French au pire moment de l’été 1914. Bien plus tard, Paul Reynaud écrirait dans ses mémoires : « Cet appel me fit une impression profonde. L’épouvantable accent du Premier Ministre anglais donnait à ses propos dramatiques une touche comique qui ne faisait que les rendre plus impressionnants. »
C’est donc un Reynaud en deuil mais déterminé qui se rend à Cangé, emmenant dans sa voiture Margerie, Leca et Jeanneney. Mandel suit dans son propre véhicule de fonction avec Herriot et Blum, auquel s’est joint Jules Moch. Ce dernier les informe qu’il a pu s’entretenir le 3 juin avec l’Amiral Darlan et que ce dernier lui a déclaré : « Si l’on demandait un jour l’armistice, je finirai ma carrière par un splendide acte d’indiscipline. Je prendrai le commandement de la flotte et nous rallierons l’Angleterre ! » Mandel informe alors les autres passagers qu’il a pris, de concert avec De Margerie, les dispositions nécessaires pour que « force reste à la légalité républicaine. »
A Cangé, une collation est servie dans le salon du château. Moch peut alors répéter à Reynaud ce qu’il vient de dire à Blum, Herriot et Mandel. Ce dernier s’assurer de son côté de la loyauté de Pernot, Queuille et Alfred Julien.
………

Méditerranée Occidentale
Les sous-marins mouilleurs de mines français posent des mines devant certains ports italiens (le Saphir devant Cagliari, le Nautilus devant Tripoli et le Turquoise devant Trapani).

Méditerranée Orientale
Les sous-marins italiens sont très actifs. Le Bagnolini coule le croiseur léger britannique Calypso au sud de la Crète. Plus à l’ouest, le Naiade coule le pétrolier norvégien Orkanger (8 029 GRT). Enfin, le mouilleur de mines Pietro Micca place un champ de mines devant Alexandrie.

Tunisie
La base aéronavale de Karouba est à nouveau bombardée par l’aviation italienne. Cette fois, quatre hydravions Loire-70 de l’escadrille E7 sont détruits et un cinquième endommagé, sur les six que compte l’unité. Des LeO H-257bis seront envoyés pour les remplacer.

Libye
La canonnière italienne Berta est coulée dans le port de Tobrouk par des avions anglais.

Italie du Nord
Turin et Gênes sont bombardés par la RAF.

Rome
L’Italie rompt ses relations diplomatiques avec les Pays-Bas, dont la Reine et le gouvernement sont réfugiés à Londres.

Egypte
Le pays rompt ses relations diplomatiques avec l’Italie.

Mer Rouge
Au début de la nuit, le sous-marin italien Ferraris est surpris en surface par au moins un destroyer britannique. Au cours de la plongée rapide, une fausse manœuvre provoque l’entrée d’eau de mer dans le local des accumulateurs, endommageant gravement les batteries. Le bateau peut cependant rentrer à Massaouah, mais il en a pour deux mois de remise en état. Le Ferraris est le premier, mais non le dernier, navire de la flotte d’AOI à expérimenter la lenteur des moyens de réparation locaux.


Nuit du 12 au 13 juin
Tours – Château de Cangé
Conseil des Ministres
Le Conseil s’ouvre à 22h00 dans une ambiance électrique, en présence d’Albert Lebrun. Pétain demande la parole et lit une longue déclaration. Il critique d’abord les conditions de la déclaration de guerre (pénurie de matériel, faiblesse de l’aviation française) puis attaque avec violence les jusqu’au-boutistes, et De Gaulle au premier rang, avant de réclamer un armistice : « La folie ambitieuse de quelques arrivistes, profitant de l’affaiblissement du pouvoir politique, a obtenu de ce dernier une décision inconsidérée et malavisée : le départ du Général Weygand, chef de grand talent, soldat exemplaire, dont le retour immédiat est une nécessité absolue. Ces inconscients ont ainsi détourné le gouvernement de l’urgence actuelle : demander au plus tôt aux autorités allemandes une armistice dans l’honneur. En effet, c’est le cœur serré que je vous l’affirme, mais il serait pire de se leurrer : la France a perdu cette guerre et il faut cesser le combat. Seule la cessation des hostilités pourrait sauver de l’invasion une partie importante du territoire national et maintenir l’ordre et la cohésion dans les troupes décimées et harassées. Il est clair aujourd’hui que la poursuite du conflit serait fatale au pays. »
Ces déclarations provoquent un choc frontal avec Reynaud : « C’est en ma double qualité de Président du Conseil et de Ministre de la Guerre que j’ai décidé librement le renvoi du Général Weygand et c’est en cette double qualité que je l’assume aujourd’hui ! Quant à demander un armistice alors que la France est engagée dans une lutte qui met en jeu l’essence même de notre civilisation, il s’agirait bel et bien d’une forfaiture et je m’y refuse avec la dernière énergie. Je suis scandalisé et profondément attristé d’entendre un tel discours dans la bouche du vainqueur de Verdun, et seul le poids de l’âge peut expliquer un tel défaitisme ! La France est un Empire. Si la Métropole est perdue, l’Empire la sauvera. Les Armées de mer et de l’air combattront aux côtés des forces britanniques. Les Etats-Unis enverront chars et avions. Le gouvernement gagnera l’Afrique du Nord et même l’Afrique Noire pour y attendre les concours qui donneront la victoire. »
– Taisez-vous, crache Pétain, vous n’êtes qu’un civil et vous n’y connaissez rien ! »
De Gaulle se lève brusquement et se dresse de toute sa haute taille : « Monsieur le Vice-Président, dit-il, évitant avec soin de donner à Pétain son titre de Maréchal, comment prétendez-vous vous y connaître vous-même ? Depuis des années, vous n’avez rien fait pour moderniser notre Armée, et vous avez tué dans l’œuf toutes les tentatives de développer une doctrine d’utilisation efficace de nos forces dans une guerre moderne ! Le désastre qui nous frappe aujourd’hui, c’est vous et vos affidés qui l’avez préparé ! »
– Jeune insolent ! répond Pétain, Je vous connais depuis longtemps ! Je connais votre ambition effrénée et je sais que vous prenez vos lubies pour la réalité.
– Je sais au moins ce qu’est la parole donnée, répond De Gaulle, et je sais que demander l’armistice serait une trahison de notre allié, à qui la France a donné sa parole il y a moins de trois mois ! [il fait référence à l’accord Reynaud-Chamberlain du 28 mars]
– Les Anglais ont commis bien d’autres perfidies ! proclame le ministre d’Etat Jean Ybarnegaray. Plutôt être une province de l’Allemagne que les esclaves de l’Angleterre !
– Une province de l’Allemagne ! C’est là votre idéal ! grince De Gaulle. Est-ce aussi le vôtre, Monsieur Philippe Pétain ?
Pétain : « Sachez à qui vous parlez, Colonel, je suis Maréchal de France, non “Monsieur” ! »
De Gaulle : « Le Maréchal Pétain est mort en 1925 ! » Référence à l’intervention de Pétain au Maroc, lors de la révolte d’Abd-El-Krim, où il déposséda de fait le Maréchal Lyautey de ses pouvoirs et provoqua son rappel par le gouvernement.
Le brouhaha est indescriptible. Camille Chautemps (second vice-président du Conseil) donne de la voix pour soutenir Pétain, avant qu’Albert Lebrun ne parvienne à ramener un peu de calme.
– Monsieur le Président, demande alors Reynaud, il me semble nécessaire, en ces heures difficiles, d’entendre la voix du Parlement. MM. Herriot, président de la Chambre, et Jeanneney, président du Sénat, sont ici, peuvent-ils entrer nous donner leur sentiment ?
Lebrun y consent et les présidents des deux chambres, devant un Pétain et un Chautemps médusés, viennent affirmer le soutien du Parlement à Paul Reynaud. Chautemps est le premier à se ressaisir : « Je proteste contre cette mascarade ! Ces messieurs ne représentent qu’eux-mêmes. Souvenez-vous, Monsieur le Président, que M. Paul Reynaud n’a obtenu l’investiture que d’une seule voix le 22 mars dernier ! »
– Il est vrai, riposte Reynaud, que le soutien du groupe socialiste, le plus important de l’Assemblée, m’avait alors manqué. Mais les choses ont changé. M. Léon Blum vous le dira lui-même, il n’est pas loin.
Lebrun, surpris, hoche à peine la tête et Georges Mandel bondit pour introduire Blum : « Monsieur le Président, explique celui-ci, je suis venu vous assurer que, dans les tragiques circonstances actuelles, les socialistes, tout comme en 1914, feront leur devoir et prendront leurs responsabilités pour la poursuite de la guerre. Vive la France ! » Selon une récente biographie, ce « Vive la France ! » marquait sa revanche sur tous ceux qui l’avaient depuis des années traité de “sale juif cosmopolite”. Quoi qu’il en soit, cette exclamation est reprise par la grande majorité des membres du Conseil : « Vive la France ! ».
Alors que Blum, Herriot et Jeanneney sont ressortis, la séance reprend. Camille Chautemps tente de finasser : « Dans la situation actuelle, il conviendrait néanmoins de s’enquérir auprès de l’ennemi des conditions d’un armistice, quitte à le rejeter sis ses conditions étaient inacceptables. »
Pétain reprend la parole : « Nous venons enfin d’entendre une parole de sagesse, mais je ne puis oublier l’insulte faite à ma personne. J’exige des excuses publiques et la démission ou la destitution de l’insulteur. De plus, encore une fois, c’est folie que de priver le pays du Général Weygand. Il faut le rappeler sur l’heure. »
– Qu’il s’agisse du renvoi d’un membre du gouvernement ou de la nomination du chef d’état-major, de telles décisions n’appartiennent qu’à moi, réplique Reynaud. Monsieur le Maréchal, le gouvernement accepte votre démission de vos fonctions ministérielles.
Alors Pétain : « C’est ridicule ! Vous et vos amis êtes disqualifiés pour conduire le pays. Seul un soldat tel que moi peut encore empêcher un désastre total et obtenir de l’ennemi une paix dans l’honneur. Je suis prêt à faire don de ma personne à la France pour mener ces négociations, puis pour relever notre malheureux pays. Je me propose, Monsieur le Président [il se tourne vers Lebrun], avec votre autorisation, de me mettre à la tâche dès demain. »
« C’est l’instant décisif, le point de rupture. Georges Mandel l’a bien compris. Avant que quiconque ait pu réagir, il se dresse : « Ce discours relève de la haute trahison ! Monsieur le Président du Conseil, il faut agir. Le destin du pays, le destin de la France est entre vos mains ! »
Lentement, Reynaud se lève à son tour : « Ce que nous venons d’entendre de votre bouche, Monsieur Pétain, ne peut être qualifié autrement que de haute trahison. Vous en rendrez raison sur le champ. » Un profond silence s’abat sur la salle du Conseil. Cependant, Georges Mandel fait entrer deux policiers.
(De nombreux historiens se sont demandés comment Mandel avait pu trouver des policiers qui ne seraient pas susceptibles d’hésiter au moment d’arrêter une Gloire Nationale telle que Pétain. L’hypothèse la plus souvent évoquée est la bonne : Mandel avait pris contact avec le Grand Orient de France, et les deux policiers étaient francs-maçons. En juin 2000, une “tenue blanche” du Grand Orient ouverte au public, organisée à l’occasion du 60ème anniversaire de l’événement, a présenté des témoignages de première main qui ne laissent aucun doute, précisant même que ces policiers, repliés sur la Loire avec le personnel du ministère de l’Intérieur, étaient membres de la loge parisienne La Philosophie Positive.)
– Philippe Pétain, déclare Mandel avec froideur, je vous accuse de conspiration et de haute trahison. Messieurs, arrêtez cet homme.
C’est un vieillard affolé qui est emmené, balbutiant « Comment osez-vous… » On sait que Pétain sera frappé quelques heures plus tard par le premier des accidents vasculaires cérébraux qui devaient finir par l’emporter après des mois d’une lente agonie. Dans un geste de propagande condescendante, les Allemands le firent inhumer à Douaumont, où les autorités françaises l’ont laissé reposer après la guerre.
Se rasseyant, Mandel annonce d’une voix calme que ses services arrêteront tous ceux qui se rendront coupables de défaitisme. » (Nicolas Sarkozy, Georges Mandel, Le Moine de la Politique, Paris, 1992)
Il est 00h35, le 13 juin.
Reynaud demande à Lebrun une suspension de séance, pendant laquelle il lui soumet, avec l’approbation de Jeanneney, la liste d’un gouvernement remanié. Lebrun, très choqué par ce qui vient de se passer mais « heureux de voir que les deux chambres soutiennent largement le chef du gouvernement », accepte. Reynaud annonce alors personnellement à Chautemps qu’il ne fait plus partie du gouvernement, au moins temporairement. Celui-ci subit le coup sans mot dire – sans doute craignait-il une sanction plus sévère.
La séance reprend à 01h05.
Reynaud annonce d’abord le remaniement gouvernemental. Outre l’arrestation de Pétain « pour haute trahison et forfaiture » et la démission de Baudouin, Chautemps (vice-président du Conseil), Pomaret (Travail), Prouvost (Information) et Ybarnegaray (ministre d’Etat sans portefeuille) s’en vont. Entrent au gouvernement Léon Blum, Jules Moch, Jean Zay, Roland de Margerie et Philippe Serre. Mandel et Blum sont nommés vice-présidents du Conseil et ministres d’État. Charles de Gaulle devient ministre de la Guerre (fonction que Reynaud cumulait avec celle de Président du Conseil). Jules Moch devient ministre du Travail, Jean Zay remplace Prouvost à l’Information et Philippe Serre devient sous-secrétaire à la Guerre, secrétaire du Comité à la Guerre (fonction que de Gaulle ne peut occuper, devenant ministre en titre), tandis que De Margerie remplace Baudouin comme sous-secrétaire d’État aux Affaires Etrangères.
Reynaud lit ensuite une courte déclaration, rédigée par De Margerie : « (…) Nous ne pouvons pas capituler. Les raisons qui nous l’interdisent sont nombreuses. (…) Enfin, la France doit honorer sa parole envers ses alliés, à commencer par le Royaume-Uni. Il en va de son honneur. La guerre peut et doit continuer, si nécessaire à partir de notre Empire, avec le soutien fraternel de nos alliés ! Elle continuera jusqu’à la victoire. »
Après un instant de silence inquiet, Yves Bouthillier demande la parole : « En tant que ministre des Finances, je ne saurais soutenir le gouvernement sur la voie d’une lutte menée depuis l’Empire. Les ressources financières de l’Empire sont loin d’être à la mesure de la tâche immense qui serait la nôtre si nous devions quitter le territoire métropolitain. L’endettement auprès de nos alliés et des neutres placerait alors la France dans un état de sujétion qui ne serait pas différent de celui que les armes seules pourraient nous imposer. » Sans avoir demandé la parole, De Gaulle lance alors d’un ton sec : « L’honneur, la grandeur et l’avenir de la France ne se mesurent pas à l’aune d’un comptable. » Après un dernier regard à Reynaud, dont il fut un fidèle collaborateur, Bouthillier comprend qu’il ne trouvera aucun appui. Il présente sa démission et son poste est rattaché, provisoirement, à la Présidence du Conseil.
Le Conseil se sépare à 01h35, après que Reynaud ait indiqué qu’un nouveau Conseil suprême interallié se tiendrait dans la journée, à Tours.

Le gouvernement Reynaud du 13 juin 1940
Président du conseil :
o Paul Reynaud (AD) (Ministre des Affaires Étrangères et, provisoirement, Ministre des Finances)
Vice-présidents du conseil :
o Léon Blum (SFIO)
o Georges Mandel (Ministre de l’Intérieur)
Ministres :
o Ministre de la Défense Nationale et de la Guerre : Charles de Gaulle
o Ministre des Armements : Raoul Dautry
o Ministre du Travail : Jules Moch (SFIO)
o Ministre de la Justice : Albert Sérol (SFIO)
o Ministre de la Marine militaire : César Campinchi (PRS)
o Ministre de la Marine marchande : Alphonse Rio (USR)
o Ministre de l’Air : Laurent Eynac (PRS)
o Ministre de l’Éducation nationale : Yvon Delbos (PRS)
o Ministre des Anciens combattants et des pensions : Albert Rivière (SFIO)
o Ministre de l’Agriculture : Paul Thellier (AD)
o Ministre du Ravitaillement : Henri Queuille (PRS)
o Ministre des Colonies : Louis Rollin
o Ministre des Travaux publics : Ludovic-Oscar Frossard (USR)
o Ministre de la Santé publique et de la Famille Française : Georges Pernot (FR).
o Ministre des Postes, Télégraphe, Téléphone et Transmissions : Alfred Jules-Julien (PRS)
o Ministre de l’Information : Jean Zay (SFIO)
o Ministre du Commerce et de l'Industrie : Albert Chichery (PRS)
o Ministre du Blocus : Georges Monnet (SFIO)
o Ministre d’État : Louis Marin (FR)
Sous-secrétaire d’État
o Sous-secrétaire d’État à la vice présidence du Conseil : Robert Schuman (PDP)
o Sous-secrétaire d’État à la Guerre et à la Défense nationale : Philippe Serre (PDP)
o Sous-secrétaire d’État aux Travaux Publics : André Février (SFIO)
o Sous-secrétaire d’État aux Affaires Etrangères : Roland de Margerie
o Sous-secrétaire d’État aux Fabrications de l’Air : Jules Meny
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loic
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MessagePosté le: Dim Aoû 12, 2007 09:29    Sujet du message: Répondre en citant

Casus Frankie a écrit:
Une grande partie de la 21ème division britannique Highland est capturée.


La Highland, ce n'est pas la 51ème plutôt ?
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On ne trébuche pas deux fois sur la même pierre (proverbe oriental)
En principe (moi) ...
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MessagePosté le: Dim Aoû 12, 2007 11:16    Sujet du message: Répondre en citant

je crois bien aussi avoir lu que c'est la 51ième DI
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MessagePosté le: Dim Aoû 12, 2007 12:55    Sujet du message: Répondre en citant

Vous avez raison (l'erreur existait déjà dans l'ancienne version dont j'avais fait un copier-coller).
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Benoit XVII



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MessagePosté le: Dim Aoû 19, 2007 12:21    Sujet du message: Répondre en citant

En preview, voici la réaction du Gouvernement belge au décès d'Hélène de Portes Wink

Paris, le 7 juin
Ayant appris le décès d’Hélène de Portes, Paul-Henri Spaak, le Ministre belge des Affaires Etrangères, prépare un message de condoléances à l’intention de Reynaud. Mais le Premier Ministre Pierlot, chez qui le juriste pointilleux le dispute au catholique rigoureux, s’étouffe d’indignation : «Une démarche officielle du Gouvernement belge ne peut paraître légitimer une relation qui n’a aucune espèce d’existence légale, et dont la nature même offense les principes de la morale ! » Cet épisode ne fera qu’ajouter encore quelque piment aux relations déjà difficiles entre les deux chefs de gouvernement. Toutefois, Spaak, ainsi que Jaspar, le Ministre de la Santé Publique lui-même divorcé et remarié, enverront à titre personnel des marques de sympathie à Reynaud.


Dernière édition par Benoit XVII le Dim Aoû 19, 2007 12:44; édité 1 fois
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MessagePosté le: Dim Aoû 19, 2007 12:43    Sujet du message: Répondre en citant

Savoureux ! Mort
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Benoit XVII



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MessagePosté le: Mar Aoû 21, 2007 23:21    Sujet du message: Répondre en citant

Voici la nouvelle version du Conseil des Ministres belges suite à l'arrestation de Pétain. Je me suis inspiré largement des Conseils qui eurent lieu les 14 et 15 juin historiquement, où les Ministres commencent à se rendre compte que la Bataille de France est perdue. Alors qu'ils pensaient à ce moment que la France continuerait malgré tout à se battre depuis l'AFN, le Gouvernement belge avait décidé de se rendre à Londres. La capitulation française allait les faire changer d'avis.


13 juin, 11h00 – Poitiers (siège du gouvernement belge)
Ayant appris de l’Ambassadeur Pol Le Tellier l’arrestation de Pétain dans la nuit, le Premier Ministre Hubert Pierlot convoque un Conseil des Ministres impromptu.
Pierlot : « Messieurs, il semble que le Conseil des Ministres du Gouvernement français cette nuit ait fait l’objet d’événements dramatiques : pour des raisons qui nous sont encore inconnues, le Maréchal Pétain a fait l’objet d’une arrestation pour haute trahison. »
Paul-Emile Janson (Ministre de la Justice) : « Les Français sont-ils devenus fous ? Après le limogeage incompréhensible de Weygand, voici qu’ils arrêtent l’homme qui les a conduits à la victoire pendant la Grande Guerre ! »
Pierlot : « Il semble que le nouvel homme fort du Gouvernement soit un certain Général de Gaulle, qui était sous-secrétaire d’Etat, et qui devient ministre de la Guerre. Ii aurait obtenu quelques succès sur le terrain. Qui d’entre vous sait quelque chose sur ce général ? »
Général Henri Denis (Défense Nationale) : « C’est le grand spécialiste français des blindés. On aurait d’ailleurs mieux fait de l’écouter avant la guerre, à juger des victoires allemandes. Il paraît que c’est un jusqu’au-boutiste. »
La discussion se poursuit, chacun y allant de son interprétation sur le sens des événements de la nuit. Alors que la discussion tourne en rond, un huissier vient annoncer à Pierlot et à Spaak que Le Tellier vient d’arriver et souhaite leur parler immédiatement, car il a des éléments neufs. Pierlot et Spaak s’éclipsent, puis reviennent quelques minutes plus tard, la mine défaite. « Messieurs, les nouvelles sont extrêmement préoccupantes », reprend Pierlot d’une voix tremblante, « Le Tellier a appris que des instructions sont envoyées à travers toute la France pour préparer un repli de l’armée française vers l’Afrique du Nord. Ces préparatifs ne peuvent avoir qu’un seul sens : la bataille de France est perdue ! »
La foudre frappant au milieu de la table du Conseil n’aurait pas produit plus d’effet. Jusqu’alors, le Gouvernement belge avait axé toute sa politique sur la ferme mais ô combien naïve conviction que l’armée française finirait par rétablir la situation par un nouveau miracle de la Marne. Mandel n’avait-il pas affirmé il y a quelques jours que « la France ira[it] vers la victoire, de catastrophe en catastrophe » ? Devant l’abîme qui s’ouvre à leurs pieds, les Ministres doivent affronter une éventualité qu’ils ne s’étaient même jamais imaginée.
Surmontant l’atmosphère d’abattement qui est tombée sur le Conseil, Pierlot rassemble son énergie et poursuit : « Monsieur le Ministre des Affaires Etrangères, quelles sont à votre avis les implications pour la position politique de la Belgique ? »
Paul-Henri Spaak (Affaires Etrangères), reprenant ses esprits : « En toute probabilité, les Français n’abandonneront pas leur empire colonial. Ils continueront sans aucun doute à se battre depuis l’Afrique du Nord. Les Britanniques se battront quoi qu’il arrive, il y va de leur intérêt ! A mes yeux, nous courrions un risque majeur de perdre le Congo si nous nous dissociions des Alliés. »
Camille Gutt (Finances) : « Monsieur Spaak a entièrement raison. Si l’Angleterre continue la guerre, et la France poursuit la lutte sous l’une ou l’autre forme, nous devons la continuer aussi. »
Pierlot : « En ce cas, où faudrait-il établir le siège du Gouvernement ? A Londres ?»
Spaak : « Je me demande si nous pouvons partir comme cela, et abandonner nos collaborateurs réfugiés en France, alors que nous n’avons de toutes façons plus d’armée. »
Denis : « Plus d’armée ? Dois-je rappeler à Monsieur le Ministre des Affaires Etrangères que nous avons près de 100 000 soldats sous les drapeaux ici en France, et encore au moins autant de jeunes gens dans la Réserve d Recrutement ? »
Spaak ; « Vous avez raison, mon Général. Une raison de plus de ne pas nous dérober à nos responsabilités dans ce qui apparaîtrait comme une fuite. Peut-être faudrait-il scinder le Gouvernement : une partie des ministres s’en vont pour représenter le Belgique dans la lutte qui se poursuit, tandis que les autres restent pour terminer les tâches qui n’auraient pu l’être. »
Pierlot : « Cette solution ne saurait m’agréer. Le pouvoir exécutif qui nous est conféré ne peut en aucun cas faire l’objet d’une scission. L’unité de l’action gouvernementale doit être préservée à tout prix ! »
Spaak : « Contrairement à Bruges [allusion à l’entretien de Wynendaele le 25 mai – voir annexe 40-1], je distingue mal où est notre devoir. »
Sentant le manque de détermination de ses collègues, Pierlot reprend: « Si le Roi était ici, devrions-nous alors partir pour l’Angleterre ? »
A cette question, tous les Ministres opinent de la tête. Pierlot poursuit alors :
« Pourquoi ne pas alors prendre la même attitude maintenant que le Roi n’est pas avec nous ? »
Spaak : « Parce que d’un point de vue belge, le Roi représente plus que les quatorze ministres tous ensemble ! »
Obstiné, Pierlot continue: « Que fera le Gouvernement si le souhait des Britanniques est que nous partions pour la Grande-Bretagne, et s’ils attachent de l’importance à cette décision ? »
Spaak : « Cela ne change rien : dès le moment où une partie des Ministres rejoignent l’Angleterre, la position politique de la Belgique sera préservée auprès des Alliés, y compris pour ce qui concerne le Congo. »
Denis : « Pour ma part, je ne puis m’imaginer que nous partions avant d’avoir réglé le sort des réfugiés et militaires belges en France. Nous risquons en plus de perdre le soutien moral de la population belge si nous nous établissons en Grande-Bretagne. »
Pierlot, impérieux : « Notre premier devoir est de nous occuper des intérêts politiques du pays et de la colonie. Pour ce qui est des Belges en France, des fonctionnaires peuvent parfaitement s’en occuper. Même si la France devait cesser le combat – ce qui heureusement paraît aujourd’hui entièrement exclu, il faudrait que le Gouvernement dans sa totalité parte pour l’Angleterre ! »
Arthur Vanderpoorten (Intérieur) : « De fait, les Gouverneurs de Province, dont plusieurs se trouvent en France, pourraient s’occuper des réfugiés. Mon état de santé ne me permet plus de voyager [Vanderpoorten sortait d’une convalescence difficile lors de l’attaque du 10 mai], je me propose donc de rester avec eux pour coordonner les opérations, après avoir remis mon mandat si Monsieur le Premier Ministre y consent. »
Denis : « Et l’armée ? »
Marcel-Henri Jaspar (Santé Publique) : « Et bien, faites comme les Français, évacuez-les soldats, et la réserve de recrutement tant que vous y êtes ! Nous ne serons pas de trop pour pouvoir rendre les coups aux Allemands. Mon épouse est juive, et j’ai visité l’Allemagne d’Hitler plusieurs fois ces dernières années. Devant un régime d’une telle barbarie, nous ne pouvons pas renoncer au combat !»
Albert De Vleeschauwer (Colonies) : « Oui, il faut partir pour Londres, et évacuer un maximum de soldats et de recrues ! Notre flotte marchande est réfugiée en Angleterre et dans les ports de l’Atlantique, mettons-là à contribution !»
Gutt : « Avec l’or évacué et les ressources du Congo, nous aurons tous les moyens financiers nécessaires ! »
Janson : « Aussi vrai que du sang français coule dans mes veines, nous n’abandonnerons pas nos compagnons de combat ! A Londres ! »
Devant cette montée d’enthousiasme, les Ministres se rallient les uns après les autres à la position déterminée de Pierlot. Denis est chargé de préparer les plans d’évacuation, tandis que Pierlot et Spaak doivent contacter les Gouvernements alliés pour les informer des décisions prises par le Gouvernement belge.
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