Fantasque Time Line Index du Forum Fantasque Time Line
1940 - La France continue la guerre
 
 FAQFAQ   RechercherRechercher   Liste des MembresListe des Membres   Groupes d'utilisateursGroupes d'utilisateurs   S'enregistrerS'enregistrer 
 ProfilProfil   Se connecter pour vérifier ses messages privésSe connecter pour vérifier ses messages privés   ConnexionConnexion 

Mai 1944, petites nouvelles du front
Aller à la page Précédente  1, 2, 3 ... 9, 10, 11, 12, 13  Suivante
 
Poster un nouveau sujet   Répondre au sujet    Fantasque Time Line Index du Forum -> 1944 - Europe du Nord
Voir le sujet précédent :: Voir le sujet suivant  
Auteur Message
houps



Inscrit le: 01 Mai 2017
Messages: 1809
Localisation: Dans le Sud, peuchère !

MessagePosté le: Ven Jan 20, 2023 15:57    Sujet du message: Répondre en citant

Le problème (s'il y en a un) est toujours le même :

XP-72, superbolt ou autre, ( comme le Martin-Baker) la fin de la guerre est proche, la LW ne représente plus une grosse menace (surtout après Bodenplatte) non plus que les forces aériennes japonaises, et contre les unes comme les autres, les matériels récents "font le job" : à quoi bon développer des modèles dont on n'aura aucun emploi même à l'exportation ?
Les jets arrivent. Autant confier leur mise au point finale, et leur mode d'emploi futur à des "moustachus", justement, non ?
_________________
Timeo danaos et dona ferentes.
Quand un PDG fait naufrage, on peut crier "La grosse légume s'échoue".
Une presbyte a mauvaise vue, pas forcément mauvaise vie.
Revenir en haut de page
Voir le profil de l'utilisateur Envoyer un message privé
LaMineur



Inscrit le: 12 Oct 2009
Messages: 414

MessagePosté le: Ven Jan 20, 2023 16:18    Sujet du message: Répondre en citant

Aucun besoin même à l'exportation, c'est vite dit. Nous savons que l'Armée Rouge ne va pas se lancer dans une guerre contre les capitalistes, juste après une guerre contre les fascistes ; mais les acteurs de l'époque ne peuvent pas en être certains. L'URSS est moins prestigieuse vis à vis des peuples occidentaux, mais plus puissante qu'OTL ; l'un compense l'autre.
Revenir en haut de page
Voir le profil de l'utilisateur Envoyer un message privé
solarien



Inscrit le: 13 Mai 2014
Messages: 2675
Localisation: Picardie

MessagePosté le: Ven Jan 20, 2023 16:23    Sujet du message: Répondre en citant

Puis l'armée de l'air va forcement commencer à penser au futur.

Garder un certain nombre de pilote pour maintenir les escadrilles au niveau, former les nouveaux pilotes, tester les nouveaux appareils.

Et contrairement à l'armée de terre, on peux pas vraiment appliquer la conscription à l'armée de l'air, donc tout les pilotes doivent être forcement des militaires de carrière.
Revenir en haut de page
Voir le profil de l'utilisateur Envoyer un message privé
loic
Administrateur - Site Admin


Inscrit le: 16 Oct 2006
Messages: 8936
Localisation: Toulouse (à peu près)

MessagePosté le: Ven Jan 20, 2023 16:33    Sujet du message: Répondre en citant

LaMineur a écrit:
Aucun besoin même à l'exportation, c'est vite dit. Nous savons que l'Armée Rouge ne va pas se lancer dans une guerre contre les capitalistes, juste après une guerre contre les fascistes ; mais les acteurs de l'époque ne peuvent pas en être certains. L'URSS est moins prestigieuse vis à vis des peuples occidentaux, mais plus puissante qu'OTL ; l'un compense l'autre.

Et pourtant OTL le Superbolt et le XP-72 (entre autres) ont été abandonnés précisément parce que la fin de la guerre arrivait. La perspective d'une guerre avec l'URSS ne semblait pas préoccuper USA et GB.
_________________
On ne trébuche pas deux fois sur la même pierre (proverbe oriental)
En principe (moi) ...
Revenir en haut de page
Voir le profil de l'utilisateur Envoyer un message privé
houps



Inscrit le: 01 Mai 2017
Messages: 1809
Localisation: Dans le Sud, peuchère !

MessagePosté le: Ven Jan 20, 2023 17:00    Sujet du message: Répondre en citant

Superbolt Mort
XP-72 : Mort
Martin-Baker Mort
Rolling Eyes
_________________
Timeo danaos et dona ferentes.
Quand un PDG fait naufrage, on peut crier "La grosse légume s'échoue".
Une presbyte a mauvaise vue, pas forcément mauvaise vie.
Revenir en haut de page
Voir le profil de l'utilisateur Envoyer un message privé
Wardog1



Inscrit le: 29 Aoû 2015
Messages: 1033
Localisation: Puy de Dome,France

MessagePosté le: Ven Jan 20, 2023 17:08    Sujet du message: Répondre en citant

C'est hoirrible à dire mais c'est dommage que la fin de la guerre ai empeché la mise en service de belles machines...
_________________
"You and I are opposite sides of the same coin. When we face each other, we can finally see our true selves. There may be a resemblance, but we never face the same direction."

Larry Foulke
Revenir en haut de page
Voir le profil de l'utilisateur Envoyer un message privé
FREGATON



Inscrit le: 06 Avr 2007
Messages: 3994
Localisation: La Baule

MessagePosté le: Ven Jan 20, 2023 17:11    Sujet du message: Répondre en citant

Mais que devient, dans ce cas, l'appendice de l'annexe E Y4 Michel Wibault et le “Superbolt”
_________________
La guerre virtuelle est une affaire trop sérieuse pour la laisser aux civils.
Revenir en haut de page
Voir le profil de l'utilisateur Envoyer un message privé
Finen



Inscrit le: 17 Oct 2006
Messages: 1923

MessagePosté le: Ven Jan 20, 2023 17:14    Sujet du message: Répondre en citant

Ils (les P47J, XP72 et autres) ont été abandonnés aussi et peut-être surtout parce que les ingénieurs disaient pouvoir faire des jets et que cela plaisais beaucoup plus aux décideurs politiques. La fin de guerre sonnant presque comme un prétexte pour avoir du tout nouveau tout beau, limite science fiction du point de vue de l'époque.
Le fait qu'il faille passer par une longue période de mise au point n'a pas semblé déranger quiconque sur le moment...
Revenir en haut de page
Voir le profil de l'utilisateur Envoyer un message privé
Etienne



Inscrit le: 18 Juil 2016
Messages: 2824
Localisation: Faches Thumesnil (59)

MessagePosté le: Ven Jan 20, 2023 17:14    Sujet du message: Répondre en citant

FREGATON a écrit:
Mais que devient, dans ce cas, l'appendice de l'annexe E Y4 Michel Wibault et le “Superbolt”

Bin il devrait être modifié, tout comme celui sur Dewoitine, avec son voyage OTL aux USA... Whistle
_________________
"Arrêtez-les: Ils sont devenus fous!"
Revenir en haut de page
Voir le profil de l'utilisateur Envoyer un message privé Visiter le site web de l'utilisateur
Colonel Gaunt



Inscrit le: 26 Mai 2015
Messages: 1893
Localisation: Val de Marne

MessagePosté le: Ven Jan 20, 2023 18:11    Sujet du message: Répondre en citant

En fait il faudrait une bonne petite guerre de décolonisation, à l'instart OTL de l'Indochine, pour que les états engagés dans de telles guerres, aient besoin de reconstituer leur armée aérienne. La Royale employa de nombreux Corsairs pour appuyer DBP. Ou bien pendant l'affaire de Suez.
_________________
Les guerres de religion consistent à se battre pour savoir qui a le meilleur ami imaginaire
Citation vue sur le net
Revenir en haut de page
Voir le profil de l'utilisateur Envoyer un message privé
le poireau



Inscrit le: 15 Déc 2015
Messages: 1296
Localisation: Paris

MessagePosté le: Ven Jan 20, 2023 19:10    Sujet du message: Répondre en citant

Finen a écrit:
Ils (les P47J, XP72 et autres) ont été abandonnés aussi et peut-être surtout parce que les ingénieurs disaient pouvoir faire des jets et que cela plaisais beaucoup plus aux décideurs politiques. La fin de guerre sonnant presque comme un prétexte pour avoir du tout nouveau tout beau, limite science fiction du point de vue de l'époque.
Le fait qu'il faille passer par une longue période de mise au point n'a pas semblé déranger quiconque sur le moment...


Attention les cas de figure ne sont pas identiques entre tous ces modèles.

Avec des engins comme le XP-72 ou le Martin-Baker on est face à de nouveaux modèles d'avions, par ailleurs très tardifs, qui poussent à leur extrême limite les designs d'aéronefs à moteurs à pistons. Ils sont en effet presque anachroniques, car dépassés par la propulsion à réaction. Et en plus ils seraient arrivés une fois la guerre terminée.

Le P-47J c'est quelque chose de plus précoce, de beaucoup plus simple et bien moins radical et ambitieux. C'est simplement une version améliorée du P-47 de base et pas un nouvel avion. En gros, il est au Thunderbolt ce que le P-51H est au Mustang.
Car les modifications sont loin d'être aussi considérables qu'il n'y paraît : le fuselage est celui du P-47D standard mais il bénéficie d'une version gonflée du moteur P&W Double Wasp et d'un nouveau turbocompresseur, mais OTL ces deux équipements ont été montés de série sur les dernières versions du Thunderbolt (P-47M et P-47N) ; son aile est redessinée et sa structure allégée, mais là encore OTL on a produit de série le P-47N avec une toute nouvelle aile ; enfin il a un nouveau capotage moteur, là oui cette modification n'a jamais été pérennisée.
Si le P-47J n'a pas été produit de série c'est pour des raisons strictement industrielles : d'une part Republic voulait se concentrer sur le futur XP-72 soit-disant plus prometteur mais surtout on ne voulait pas introduire des modifications sur les chaînes de montage ce qui aurait pu désorganiser ou réduire momentanément la production. Un argument quelque peu à relativiser car à peine quelques mois plus tard Republic commence à produire en série le P-47N qui bénéficie d'évolutions significatives par rapport au P-47D de base !

Bref, si il n'y a aucune raison que le XP-72 bénéfice d'un sort différent par rapport à l'OTL, le P-47J est lui bien plus plausible.

Les Britanniques sont passés du Typhoon au Tempest et du Spitfire Merlin au Spitfire Griffon ; le saut du Thunderbolt au Superbolt est du même ordre.
D'ailleurs le terme même de Superbolt est trompeur et plus "cosmétique" et "publicitaire" qu'autre chose ; il donne à croire à un appareil radicalement différent du Thunderbolt alors que c'est très loin d'être le cas, c'est juste une nouvelle version de ce dernier.
De plus la FTL a déjà introduit le Tornado et le Beaumont, le NA-105 et le P-38K, et même de nouveaux appareils français.


Et une dernière chose : en 44-45 OTL comme FTL, aucun décideur aux USA ne songe sérieusement à la préparation d'un futur conflit contre l'URSS ! Ça non, ça viendra plus tard. Churchill y songe peut-être, Patton délire dessus, mais c'est tout. Donc très clairement ce n'est pas un argument en faveur de ces programmes.
_________________
“Il n'y a que deux puissances au monde, le sabre et l'esprit : à la longue, le sabre est toujours vaincu par l'esprit” (Napoléon)
Revenir en haut de page
Voir le profil de l'utilisateur Envoyer un message privé
patzekiller



Inscrit le: 17 Oct 2006
Messages: 3940
Localisation: I'am back

MessagePosté le: Ven Jan 20, 2023 19:16    Sujet du message: Répondre en citant

il ne faut pas se focaliser sur les noms qui sont les mêmes mais parfois avec un design purement ftl (par exemple l'annexe sur le me 210E qui est qq chose différent...sans l'être, un modèle E parce que le E suit le D). ici on est dans le même cas de figure
_________________
www.strategikon.info
www.frogofwar.org
Revenir en haut de page
Voir le profil de l'utilisateur Envoyer un message privé
solarien



Inscrit le: 13 Mai 2014
Messages: 2675
Localisation: Picardie

MessagePosté le: Ven Jan 20, 2023 19:21    Sujet du message: Répondre en citant

le poireau a écrit:
Et une dernière chose : en 44-45 OTL comme FTL, aucun décideur aux USA ne songe sérieusement à la préparation d'un futur conflit contre l'URSS ! Ça non, ça viendra plus tard. Churchill y songe peut-être, Patton délire dessus, mais c'est tout. Donc très clairement ce n'est pas un argument en faveur de ces programmes.


Il faut pas oublier qu'OTL, l'armée russe est très impressionnante en 1945 mais quasi a bout de souffle, cela fait 4 ans qu'elle lutte à mort contre la Wehrmacht et qu'elle subit des pertes effroyables.
En 1941, les généraux alliées pensaient que l'URSS aller être battus avant Noel, et c'est en grande partie grâce à l'aide logistique alliées qu'ils ont pus tenir.
Donc qu'en 1945 OTL, certains généraux pensent qu'ils faut en profiter pour écraser l'URSS, c'est normal.

FTL, c'est totalement différent, l'armée rouge a reculé mais comme les armées alliées face à toute attaque de la Wehrmacht durant cette époque, les pertes s'accumulent coté soviétique, mais elles peuvent être compensé par la population, et les besoins de l'URSS sont plus dans le ravitaillement et la logistique que dans le matériel militaire.
Revenir en haut de page
Voir le profil de l'utilisateur Envoyer un message privé
Casus Frankie
Administrateur - Site Admin


Inscrit le: 16 Oct 2006
Messages: 13715
Localisation: Paris

MessagePosté le: Ven Mai 12, 2023 17:20    Sujet du message: Répondre en citant

Bon, on repart. On avait narré le 11 mai en France.
Pour le reste de Mai, il manque donc du 12 au 31 en France et du 21 au 31 dans les Balkans. Comme Demo Dan manque de paprika et d'hémoglobine pour les Balkans (et qu'il est en train de boucler Cluj-Debrecen), je me remets en personne sur la France.
Enfin, en personne - avec une aide bienvenue d'Etienne, de Tyler, de Patzekiller (dont vous reconnaitrez sûrement les styles) et de Le Poireau (sur le fond).

_________________
Casus Frankie

"Si l'on n'était pas frivole, la plupart des gens se pendraient" (Voltaire)
Revenir en haut de page
Voir le profil de l'utilisateur Envoyer un message privé
Casus Frankie
Administrateur - Site Admin


Inscrit le: 16 Oct 2006
Messages: 13715
Localisation: Paris

MessagePosté le: Ven Mai 12, 2023 17:35    Sujet du message: Répondre en citant

12 mai
Opération Overlord
Les Allemands s’accrochent à Villers-Bocage
Normandie
– Pendant que la zone tenue par la 711. ID autour de la Festung Cherbourg se réduit comme peau de chagrin, les divisions blindées alliées qui débarquent depuis la veille entrent en jeu. Ainsi, la 4th Armored Division participe à l’encerclement puis à l’élimination du 736. Rgt de la 716. ID. Un peu à l’est, dans le secteur de Saint-Jores, les paras de la 101st et les fantassins de l’Ivy Division (4e DI-US) repoussent avec peine le 726. Rgt dans le bocage, mais pendant ce temps, la 2e DB de Philippe de Hauteclocque, débouchant des plages, coupe ce régiment de la 15. LFD, sur sa droite, et exploite jusqu’à Sainteny et Tribehou.
Sur la route de Pont-Hébert, le 175e RI de la 29e DI-US Blue and Gray reçoit l’aide du 506th PIR dans un mouvement de flanquement, ce qui permet le saut de puce suivant. Dans le même secteur, l’Indian Division (2e DI-US), qui a récupéré son 9e RI, met la pression sur le 30. Jäger Rgt de la 15. LFD et le force à reculer. Par contrecoup, la pression devient intenable dans les bois de Cerisy, pris de flanc depuis Cerisy-la-Forêt par le 23e RI de la 2e DI-US et le 741th Tk Bn. Le 116e RI de la 29e DI-US, appuyé par le 79th Art Group, grignote inexorablement du terrain. Il est de même à l’est, où la cote 160 est enlevée de haute lutte par le 115e RI de la Blue and Gray.
Côté britannique, la 43e DI avance vers Villers-Bocage en compagnie des 33rd et 8th Armored Brigades. L’assaut contre la petite ville échoue à deux reprises, mais les Anglais marquent des points en prenant en embuscade toute une compagnie du 653. schw Pz Abt.
Les divisions blindées britanniques ne sont pas encore en ligne, mais cela n’empêche pas la 3rd Infantry Division de progresser et d’élargir son périmètre au sud de Caen, tandis que les Canadiens sécurisent la ville.
A l’est de l’Orne, la tête de pont, qui s’accroche depuis le premier jour face à une série de contre-attaques allemandes, reçoit enfin des renforts importants. Il s’agit de la 4th Armored Division canadienne, qui commence à traverser le fleuve et permet de commencer à repousser les fantassins de la 709. ID.

Le journal de Jacques Lelong
Enfin !
Normandie
« Nous appréhendions tous ces premiers combats mais je dois dire que la peur n’a duré que le temps du premier contact, elle s’est évanouie avec l’éjection de la première douille. Nous étions dans la région de Saint-Lô. La veille, le chef d’escadron nous avait annoncé que nous allions sûrement avoir affaire à des panzers. Certains chefs de section plus âgés, ayant sans doute connu la Corse ou la Grèce, étaient restés silencieux, ils nous avaient regardés, nous autres les jeunes, et avaient simplement hoché la tête. Leur regard était déterminé et on pouvait y lire la confiance de ceux qui ont survécu. Le chef d’escadron avait conclu en s’adressant à nous plus spécifiquement : « Faites le travail pour lequel vous avez été formés et tout se passera bien. » Puis le bla-bla habituel sur les codes radio et les fumigènes pour marquer les objectifs pour l’aviation (bleu), mais nous y portons plus attention que d’habitude, car nous sommes au milieu de troupes américaines.
Le terrain en Normandie est assez inhabituel. Dans le bocage, avec ses haies qui ressemblent à des murs, les possibilités de manœuvre sont plus que réduites pour un blindé. Heureusement, le 2e Génie nous suit de près et nous ouvre des passages dans les haies à grands coup de tank-dozer, ou en utilisant un bricolage qui consiste à monter un ou deux Bangalore sur l’avant du char, qui peut ainsi avancer le museau sans risque au cœur de la haie avant de créer le passage.
Pour notre premier combat, nous avions pu embusquer La Mousson dans une de ces haies lorsque les Schleus sont arrivés. Une silhouette imprécise derrière la végétation…
« Distance 400 mètres, obus antichar, vas-y Damien, mets-lui son compte ! », le grondement du canon, la vue de l’objectif touché dans l’épiscope, le bruit de la douille qui tombe dans l’odeur âcre des fumées, l’ennemi qui commence à brûler, et voilà nous avions perdu notre pucelage.
Dans la journée nous avons tiré à plusieurs autres reprises, détruisant un transport chenillé et un camion, et tirant des obus explosifs selon les indications de l’infanterie vers ce qui nous était signalé comme des nids de mitrailleuse ou d’antichar, sans trop savoir si on touchait ou non. L’escadron a eu des pertes, aussi. Bref nous nous sommes installés dans notre routine guerrière. »


Le chemin de croix (gammée) de la 36. PzGr
Vers la Normandie
A l’est de Dieppe, 06h00
– Sous les yeux des pilotes de Typhoon délégués à la recherche de la Panzerdivision allemande en route vers Rouen, une fumée épaisse et noire fort suspecte s’élève au loin droit dans le ciel, à peine diluée par la brise matinale de cette belle journée qui s’annonce (météorologiquement parlant). Aussitôt, suivant les ordres de leur leader arguant du fait qu’il n’y a pas de fumée sans feu, les douze avions du Sqn 174 virent comme un seul homme vers la colonne noirâtre. Quelques minutes plus tard, il s’avère que son origine est un bâtiment situé en plein centre d’une bourgade qu’ils identifient comme étant Poix, en Picardie. Une fumée de Poix ? Épaisse ?
En bas, les hommes qui s’acharnent à éteindre l’incendie font des signes des bras, certains désignant l’ouest avec vigueur. Les Anglais ne s’attardent pas et suivent la route nationale, celle qui mène vers Rouen. Ils ne savent pas ce qui s’est passé, mais ils le devinent, et ont la quasi-certitude d’en trouver la raison un peu plus loin, ou du moins ceux qu’ils cherchent. Et pour cause…
………
Même région, 01h00 – Revenons au milieu de la nuit précédente, lorsque le convoi ferroviaire emmenant la 36. PzGr, parti une demi-heure auparavant de la gare de Longueau, arrive au tunnel du Mont de Rot, une colline boisée d’une quarantaine de mètres d’élévation, quelques kilomètres avant Poix. Moins de 500 mètres d’excavation, mais par habitude, le cheminot a ralenti sa machine. Bien lui en prend. Ce ne sont pas les fanaux ridicules placés sur les voitures de Flak en avant de sa locomotive qui auraient pu l’aider, mais la lune encore bien pleine aurait dû éclairer la sortie au sud-ouest, le tunnel étant rectiligne. Si on y ajoute une sourde mais vigoureuse déflagration alors que les wagons pénètrent l’ouvrage d’art, et voilà notre machiniste qui coupe la vapeur et envoie toute la puissance sur les freins, dans un crissement métallique propre à faire passer le grincement d’une craie sur un tableau noir pour une douce complainte…
Une centaine de mètres après le débouché du tunnel, au Bois d’en-bas, un groupe de résistants a fait sauter à distance la roche et la terre au-dessus de l’arche de sortie, comblant la voie. Rapidement, ils se replient par le bois vers le village d’Uzenneville, inaccessible pour les Allemands vu la topographie, ce qui leur permet de se disperser et de rentrer tranquillement chez eux pour passer les reste de la nuit sous les draps à rire sous cape de leur exploit.
Côté Teutons, c’est de toute manière la pagaille : il faut d’abord faire reculer le convoi, déjà bien engagé malgré son freinage, il est vrai sur une pente descendante. Envoyer des soldats reconnaître l’ampleur des dégâts par l’intérieur mais aussi par l’extérieur en gravissant la colline. Analyser les résultats, tempêter sur ces foutus terroristes français, se positionner sur une carte. Il y a un chemin pas loin menant à une ferme, puis une ruelle, 2 km jusqu’à la nationale 29 qui longe le parcours du rail. Enfin, ordonner le débarquement du train, on poursuivra par la route !
La ferme de Ménesvillers est plutôt un hameau regroupant plusieurs corps de ferme, il y a même une chapelle. Réveillés par le ramdam des engins motorisés, les habitants hébétés et visiblement étrangers aux événements n’en sont pas moins bousculés par la vindicte des soldats énervés. Heureusement pour eux, les militaires n’ont guère de temps, pressés par leur chef, persuadé à l’étude de la carte que les responsables de l’explosion ont fui au sud, inaccessible sans gros détours. Mais il n’aurait pas fallu mettre le feu aux poudres…
C’est hélas ce qui arrive un peu plus tard, dans le centre de Poix. Ayant probablement abusé d’un produit local à base de fruits macérés, un habitant ouvre ses volets et commence à invectiver les soldats qui défilent sous ses fenêtres. Dame ! Un semi-chenillé, cela fait du bruit sur les pavés, alors toute une colonne… La réponse est claire, nette et précise : une rafale bien ajustée l’envoie dormir de son dernier sommeil, sans retour. Comble de malheur, le vacarme n’a pas réveillé que le buveur : au travers des volets filtre à présent la lumière des foyers. Un cri guttural, les véhicules stoppent, les grenadiers en descendent. Ils s’en vont enfoncer les portes des maisons avoisinantes, en font sortir des habitants mal éveillés et les rassemblent sur un carrefour. Le maire accourt, un bougeoir à la main, vêtu d’une chemise de nuit néanmoins ceinturée d’une écharpe tricolore. Sous la menace des armes, et malgré ses protestations, il rejoint les rangs de ses administrés.
Visiblement énervé, von Neinsdorff descend lentement de son véhicule blindé de commandement en manipulant sa cravache d’officier prussien. Un sourire le prend, un rictus plutôt, en découvrant l’aspect du maire. Il lui tapote l’écharpe du bout de la cravache et commence à parler, dans un bon Français, toutefois mâtiné d’un fort accent germanique.
– Monsieur le maire… On ne vous a pas expliqué, à vous et vos administrés, de rester calmement chez vous au passage de nos troupes ?
– Si, bien sûr, mais comprenez, c’est la deuxième fois que nous sommes réveillés en moins d’une heure…
– Deuxième fois ?
– Il y a déjà eu un passage d’une colonne de véhicules…

Le général consulte sa montre qui marque 03h30, puis se tourne vers son officier d’état-major qui l’a rejoint. Celui-ci murmure en allemand : « Le groupe de Klegermann, je suppose. ». Ce qui signifie dans l’esprit de von Neinsdorff que la colonne partie par la route a pris de l’avance, un peu moins d’une heure. C’était bien la peine de prendre le train, le déchargement a pris du temps, beaucoup trop de temps. Il n’est même pas impossible que la colonne Klegermann soit passée sur la Nationale pendant la manœuvre sans que quiconque s’en aperçoive d’un côté ou de l’autre. Deux kilomètres peuvent suffire dans le vacarme des moteurs et des chenilles.
L’officier revient vers le maire.
– Et vous n’aviez pas entendu une explosion auparavant ?
– Si fait, enfin, je suppose, car après avoir été réveillés, nous avons entendu le bruit des véhicules. J’ai pensé que c’était eux…
– Vous ne savez donc rien de l’explosion du tunnel ?
– Quel tunnel ?
– Celui du chemin de fer, au mont de… Rouge ? Juste avant d’arriver ici.
– Ah, le mont de Rot ? Non, c’était ça l’explosion ?
– Oui ! Provoquée par des terroristes qui pourraient bien provenir de votre ville, monsieur le maire !
– Oh, il n’y a jamais eu ce genre de choses par ici, monsieur le général.
– C’est toujours ce qu’on dit, bien sûr… Voyons... Nous sommes donc à Poix… Y fabrique-t-on de la poix ?
– Dans le passé, peut-être, je suppose, mais plus maintenant.
– Il me semble que la poix est un composé du feu grégeois, n’est-ce-pas ?
– Euh… Je ne sais pas, monsieur le général.
– Ach ! Ces Français ! Ignorants en plus d’être stupides. Eh, bien nous allons le vérifier. Tout le monde dans la mairie !

Puis s’adressant à ses soldats, il leur ordonne d’enfermer les personnes rassemblées dans l’édifice communal. A un officier qui lui demande s’il faut aller chercher les autres habitants, la réponse est claire : « Nein ! Pas le temps. Ceux-là suffiront pour l’exemple ! »
Poussés par les grenadiers, les habitants sont bouclés dans la mairie, dont la porte est barricadée par des bancs et tables qui étaient disposés sur la petite place au-devant, vestiges d’une précédente fête. Quelques ordres gutturaux… De l’huile puis de l’essence sont déversées sur le mobilier, la porte et les volets. Une flammèche, le tout s’embrase.
Le même officier subalterne vient s’enquérir du fait de boucler l’arrière de la mairie. Même réponse : pas le temps.
– Il y a sûrement une sortie de secours, Herr General.
– Je l’espère pour eux ! Ça leur servira d’avertissement, s’ils s’en tirent. Allez, en route. Volker, envoyez une estafette en moto rattraper la colonne de Klegermann pour les informer que nous les suivons. Mais qu’ils ne nous attendent pas, ce n’est pas utile.

A l’intérieur de la mairie, c’est tout d’abord la panique à la vue de la nappe d’huile enflammée qui passe sous la porte de chêne. Les cris fusent, vite calmés par le premier édile qui reprend ses esprits et son autorité. Il fait diriger tout le monde vers l’arrière, et ses deux portes. Nouveaux cris, les portes sont fermées. Le maire, qui cherchait avec des hommes valides (et courageux) à étouffer l’incendie avec des tentures, est obligé de se frayer un chemin pour déverrouiller les serrures – heureusement qu’il avait pris son trousseau de clefs. Les voies se libèrent, mais l’appel d’air attise les feux. Après avoir conseillé à tous de se fondre dans la campagne et de ne pas rejoindre leurs foyers tant que la colonne allemande n’aura pas quitté les lieux, le maire revient vers l’entrée avec un seau de sable, et demande aux présents de faire de même.
Au même moment, de l’autre côté de la ville, dans sa chambre donnant du côté opposé à la rue principale, Monsieur Bonneuil est réveillé par son épouse.
– Louis, lève-toi ! La cloche de la caserne vient de sonner, pas longtemps, mais on voit du feu !
– Hein ? Où ça ? Bon Diousse, c’est vers la mairie… Ça a même l’air d’être à la mairie !

Le pompier auxiliaire passe rapidement son pantalon sur sa chemise de nuit, enfile ses godillots, prend sa vareuse et son casque, et descend dans le noir, se demandant quel est ce grondement qu’on entend, un orage ? Il a encore besoin de sa hache et de ses gants, donc il allume l'ampoule électrique de la pièce du devant (la seule ampoule de la maison). Mal lui en prend : aussitôt une rafale d’arme automatique brise les volets et les vitres, projetant des éclats partout dans la pièce. D’instinct, il se jette à terre. Son casque résonne des impacts, balles ou éclats ? L’obscurité revient, la petite ampoule à filament incandescent a fini sa vie, pulvérisée. Le calme revient aussi, troublé par ce grondement dont Louis sait à présent que ce sont des blindés allemands, puis par la voix de sa femme restée à l’étage…
– Louis ! Ça va ?
– Oui, mais tais-toi, faut pas qu’ils nous entendent et qu’ils viennent.

Sans bruit, l’homme rampe vers l’escalier qu’il grimpe aussi vite que possible. Il part vers la chambre de devant, inoccupée. C’est celle du fils, parti à la guerre, de l’autre côté de la Méditerranée. Heureusement, d’ailleurs, car le lit, soigneusement bordé pour attendre le retour, est jonché de débris de verre et de bois. Les Boches ont criblé toute la devanture. Il s’approche de la fenêtre en restant derrière le mur. En bas, les véhicules défilent, des hommes pointant leurs armes vers les façades. Silencieusement et doucement, il revient dans sa chambre, pour prendre dans ses bras sa tendre petite femme, toute tremblante. Attendre.
………
Aumale, même heure – La colonne dirigée par le major Klegermann s’arrête dans la ville, face à une route barrée par des travaux. Un panneau indiquant une déviation par le sud, les Allemands s’engagent docilement dans cette voie, vers Fleuzy. Informé par une estafette, le major déplie sa carte dans sa voiture et commence à l’étudier avant de s’apercevoir que la direction indiquée lui fait faire un sacré détour pour pouvoir rejoindre la nationale 29. Rugissement de l’officier, qui fait remonter la colonne pour en prendre la tête, sans oublier d’engueuler le responsable irréfléchi. Il a bien fait, car sitôt sorti de la ville, aucun panneau n’ayant annoncé une quelconque déviation aux croisements rencontrés, on a continué sur la route d’Abancourt. Faire effectuer un demi-tour à une colonne blindée se révélant impossible, il faut trouver un raccourci. Grâce à sa carte, l’officier fait obliquer par un chemin vers Rothois, puis Saint Valéry, Villers, Roupied, Coupigny et Illois avant de rejoindre la Nationale. Vingt kilomètres de détour, mais par des routes ou chemins tortueux : pratiquement une heure de perdue. Avec une interruption à la clé, par la faute d’une estafette de von Neinsdorff l’informant que celui-ci est derrière eux ! Klegermann renvoie l’estafette prévenir son supérieur de ne pas suivre la déviation d’Aumale…
………
NP28, pont de la Mission, Rocquemont, 05h48 – Le side-car Zündapp s’engage doucement sur le pont aux pavés disjoints par endroits. Dans l’aube naissante, la fatigue commence à se faire sentir. Vu le bombé prononcé donc peu engageant de la chaussée, le motocycliste passe sur la gauche ; laisser le panier traîner en dévers n’est pas pour l’inciter à respecter le code de la route, d’ailleurs qui l’en blâmerait ? Pas un gendarme français, en tout cas. Membres engourdis, paupières lourdes, le passager inspecte distraitement la voie dans le clair-obscur, puis lève le bras pour faire signe d’avancer à la colonne qui attend au ralenti.
05h50 – Une énorme déflagration propulse dans les airs le blindé semi-chenillé de tête. Délicatement posée sur les pains de plastic par l’ancien artificier, la mine recouverte de pavés posés sur des planches a déclenché sous le poids du lourd véhicule. A mille mètres de là, Léonce sourit : le bruit est de bon augure. Dans l’impossibilité de s’endormir, il a veillé tout habillé dans son lit et se lève rapidement, empoignant la vieille longue-vue de son arrière-grand-oncle, officier de marine de son vivant. De sa fenêtre, il pointe vers le pont, facilement repérable à la colonne de fumée qui monte dans l’air frais du matin. Petit sifflement admirateur, ça n’a pas l’air trop mal.
Évidemment, les Boches vont passer par la route entre les deux hameaux de Rocquemont. Que vont-ils faire ? Ils n’ont pas pour habitude de laisser un crime impuni… Certes, la route qu’ils devraient emprunter ne passe pas directement devant sa ferme, mais sait-on jamais avec eux…
Le père Fouteud descend au rez-de-chaussée, fait chauffer de l’eau pour la chicorée matinale, puis soulève la petite trappe de la veille, le buffet n’étant pas revenu en place, à sa demande. De la cache, il extrait ses reliques de la (première) Bataille de France : une vareuse bleu horizon, un casque Adrian, puis un revolver d’ordonnance avec son étui, deux fusils, un fusil mitrailleur, et une petite caisse avec six grenades, trois bandes chargées pour le FM et une vingtaine de cartouches.
Il endosse la vareuse, boit sa chicorée, se couvre du casque et se ceinture de l’étui du pistolet. Dans un coin de la pièce, il ouvre dans le plafond la trappe du pigeonnier, y adosse une échelle. Une par une, il monte ses armes là-haut.
Le pigeonnier, situé sur un angle de la bâtisse, n’a pas servi depuis le début de la guerre. Dame ! Entre les réquisitions des uns et des autres… Mais l’odeur est restée, même après quatre années et un solide décrassage de la fiente, qui fait un excellent engrais. Deux claires-voies pour le passage des volatiles et une lucarne amènent la seule lumière de la pièce. L’une des ouvertures est pile dans l’axe du chemin qui mène de la route à la ferme, c’est là que l’ancien artificier pose le fusil mitrailleur, posant deux pieds sur l’étagère qui supporte le perchoir où les pigeons se posent à leur arrivée. Une caisse de bois vient tenir provisoirement la crosse. Méthodiquement, le résistant prépare son fourbi. La caisse avec les grenades devant l’autre claire-voie, les fusils posés sur une caisse. Il vérifie puis charge les fusils et le revolver, prépare le FM et ses bandes, les disposant de manière à ne pas chercher ni faire de geste inutile. C’est prêt. Dépliant à nouveau la longue-vue, il se positionne dans l’embrasure, cherchant à voir ce que font les Fridolins.
De ce côté-là, passée la première confusion, on s’est organisé. Verdict des sapeurs : une mine, car pas de fils de trouvés. Les terroristes peuvent donc être à des kilomètres… Comme prévu par Léonce, Klegermann a fait tourner à droite les premiers véhicules de son groupe arrivés à la bifurcation avec la D24 qui rejoint la D98, pendant que ceux qui étaient en tête font demi-tour sur place, empiétant sur les champs non bordés de fossés. Le jour pointe à présent, tandis que les premiers engins enjambent le pont de la D98, avec circonspection et certainement la trouille au ventre pour l’équipage du tout premier. Rien ne se produit, et la colonne s’achemine vers le centre de Rocquemont, délaissant la route d’Yqueboeuf et… la ferme Fouteud ! Dont on ne saurait dire du propriétaire si le soupir qui s’exhale de sa poitrine est de soulagement ou de dépit. Mais il se reprend, et s’installe derrière le FM. Avec ces zigotos-là, allez savoir. Sont capables de ratisser la région. D’ailleurs, une motocyclette vient de passer en trombe sur la route d’Yqueboeuf…
06h20 – Un son différent de moteurs. Des avions ! Depuis le temps, Léonce a appris à les connaître, presque à les reconnaître. Il les voit bientôt, arrivant du nord-ouest, pratiquement dans l’enfilade de la D24. Probable que la fumée du pont les a attirés comme des mouches… Devenu un spectateur privilégié, le fermier voit tout à la fois les monomoteurs piquer sur leurs proies en débandade, les hommes sauter des camions, les canons de Flak aboyer, les explosions au sol se succéder au rythme des obus et des salves de roquettes assenées par les assaillants. Cent mètres à peine séparent le fermier de la route où sont stationnés les engins allemands, et l’homme a du mal à refréner son envie de faire un carton sur les soldats qui s’agitent. Après tout, il n’était pas mauvais au tir dans les tranchées de l’autre guerre, ayant même reçu une citation. Ce n’était que d’extrême justesse, et à cause d’un pays, qu’il était parti faire l’artificier chez les sapeurs…
Quelques minutes plus tard, le silence retombe, troublé seulement pas les cris des blessés et les ordres aboyés. Ne s’armant que de sa longue-vue, en prenant soin de rester dans l’ombre du pigeonnier, Léonce observe les grenadiers. Ceux-ci dégagent hors de la route les véhicules endommagés trop fortement et les débris, balançant tout ce qui gêne dans les bas-fossés. Y a de la récupération dans l’air ! Les blessés sont alignés sur des brancards, les morts dans des remorques, le tout à grande allure, sous les invectives des gradés. Dix minutes après, la colonne s’ébranle à nouveau, à petite allure, les camions récupérant en roulant les retardataires à pied. Ils n’ont vraiment pas le temps, se dit le fermier, surpris de l’absence de toutes représailles. Quelques coups de feu en passant dans le village, cependant, puis le calme revient.
Le fermier soupire, remet les sécurités sur ses armes, puis descend. Un bon bol de chicorée fera du bien, avec une tartine. Les émotions, ça creuse.
Deux petits coups à la porte arrière le font sursauter. Il donne deux coups sur la table, trois coups répondent. En soupirant, il se lève et va ouvrir à un môme de dix-sept ans, petit mais râblé, le dénommé Jeannot de la veille.
– Boudiou, j’avais bien dit de ne pas bouger aujourd’hui, de rester chez vous !
– Bah oui, Léonce, mais c’est bon, ils sont partis…
– P’tête bin, mais p’tête que leurs feldgendarmes vont venir !
– On peut pas dire, et pis dis : s’ils te trouvent avec cette tenue, ça sera pas mieux… Où que t’as trouvé ça ? Dans ta cache ?
– Si on te le demande, tu diras que t’en sais rien !

Le père Léonce ôte sa vareuse, la pose sur un fauteuil rapiécé, prend un bol et deux verres dans le buffet, qu’il pose sur la table. La cafetière suit, avec un litron pris sous l’évier. Sans un mot, il verse les deux liquides dans leurs contenants respectifs. Après un long silence, il reprend.
– T’es cinglé de venir, il pouvait cor’ y avoir des Boches en arrière.
– Y sont trop occupés à l’église, avec leurs blessés.
– Y z’ont laissé les blessés là-bas ?
– Oui, avec un de leurs infirmiers. Ou docteur.
– Tu sais ça comment ?
– J’ai vu en passant par derrière. Les fusils sont posés sur les murets.
– Pas bon, ça, s’il y en a qui restent.
– Bah, un camion va sûrement venir les prendre. Z’étaient pressés de partir après la pâtée qu’ils ont prise, t’as vu ça ?
– Ouais, mais il en reste suffisamment pour te tirer comme un lapin, mon garçon. D’ailleurs, maintenant que t’es là…

Bruit de moteurs et de chenilles sur les pavés, coupant la parole au fermier. Les deux hommes se regardent, interdits. Ils reviennent, ou quoi ? Léonce se lève, reprend sa vareuse et le chemin du pigeonnier, suivi comme son ombre par le jeune homme, qui découvre avec surprise l’arsenal en place et en reste bouche bée, pendant que le fermier remet son casque et prend la longue-vue.
Ce n’est pas un retour, mais une nouvelle colonne qui débouche par le pont de la départementale 98. Celle de von Neinsdorff, qui a profité des déboires de son subordonné pour revenir au contact, bien guidé par radio ou estafettes. Les véhicules passent à vive allure, seulement ralentis par les méandres des rues, pressés par le temps et le jour qui pointe, annonciateur de nouveaux raids aériens des alliés. Le général a eu de la chance : son groupe était protégé des yeux anglais par la localité de St-Martin Osmonville, un village encaissé dans le val de la Varenne, d’où il a pu voir le manège des Typhoon s’abattant sur les engins de Klegermann… Il lui reste moins de 20 km à parcourir jusqu’à l’entrée des faubourgs de Rouen, par de belles lignes droites qui ne devraient pas poser problème. Ce serait bien le diable si d’autres avions se pointaient avant de se trouver à l’abri des rues de Rouen. Abri tout relatif, bien sûr.
Le chemin de croix gammée de la 36. PanzerGrenadier s’achève… Mais elle est irrémédiablement en retard, même si ses hommes ne tarderont pas à comprendre qu’ils n’ont rien perdu pour attendre.
………
De leur pigeonnier, les deux paysans regardent en silence les camions et blindés légers qui défilent sous leurs yeux. La soldatesque germanique semble nerveuse, mais les regards sont plus braqués vers les cieux que vers les maisons ou les pommiers, sauf pour les conducteurs attentifs à la route, bien sûr. A peine passé le dernier blindé, surmonté d’un affût de Flak quadruple, le fermier se retourne vers le jeunot.
– Je disais donc : maintenant que t’es là, tu vas m’aider à aller remettre le buffet en place, sinon la patronne va gueuler en rentrant de chez sa cousine…

Guerre aérienne
Interdiction à distance
Ouest de l’Allemagne
– Les gares de Coblence, Cologne et Bonn sont les cibles des bombardiers lourds de la 9th AF. A présent, les Allemands sont bien convaincus que le Schwerpunkt allié se situe bel et bien en Normandie. Il faut y transférer en urgence le maximum de forces. Les nœuds routiers et surtout ferroviaires deviennent donc névralgiques, et les Alliés, qui en sont bien conscients, s’y intéressent plus que d’habitude.

(seconde partie du 12 mai en France demain)
Revenir en haut de page
Voir le profil de l'utilisateur Envoyer un message privé
Montrer les messages depuis:   
Poster un nouveau sujet   Répondre au sujet    Fantasque Time Line Index du Forum -> 1944 - Europe du Nord Toutes les heures sont au format GMT + 1 Heure
Aller à la page Précédente  1, 2, 3 ... 9, 10, 11, 12, 13  Suivante
Page 10 sur 13

 
Sauter vers:  
Vous ne pouvez pas poster de nouveaux sujets dans ce forum
Vous ne pouvez pas répondre aux sujets dans ce forum
Vous ne pouvez pas éditer vos messages dans ce forum
Vous ne pouvez pas supprimer vos messages dans ce forum
Vous ne pouvez pas voter dans les sondages de ce forum


Powered by phpBB © 2001, 2005 phpBB Group
Traduction par : phpBB-fr.com